Intervention de Bruno Sido

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 17 novembre 2010 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2011 — Mission ecologie développement et aménagement durables - examen des rapports pour avis

Photo de Bruno SidoBruno Sido, rapporteur pour avis :

J'ai été nommé cette année rapporteur sur la mission Écologie en remplacement de notre collègue Jean Bizet. En tant qu'ancien rapporteur des lois Grenelle I et Grenelle II, je vous propose de faire, d'abord, un point général avant d'en venir aux deux programmes de la mission spécifiquement consacrés à l'environnement.

Cet été, deux textes majeurs ont été adoptés. D'une part, la loi Engagement national pour l'environnement, dite « Grenelle II », et d'autre part, la Stratégie nationale de développement durable. Après le temps du débat et de l'adoption des principes du Grenelle, nous sommes maintenant entrés dans une phase directement opérationnelle, d'application concrète des mesures. A cet égard, il est impératif que nous suivions de très près l'élaboration des décrets d'application de la loi Grenelle II, qui auront un impact très important sur la vie de nos concitoyens.

Environ 10 milliards en autorisations d'engagement (AE) et 9,5 milliards en crédits de paiement (CP) sont demandés pour 2011 au titre de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Cela correspond, par rapport à 2010, à une baisse de 2,7 % en AE et 6 % en CP. Mais, il faut rappeler que cette mission a été marquée, ces deux dernières années, par des hausses importantes. Comme l'indique le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2011-2014, la programmation des crédits de la mission Écologie tient compte des engagements politiques forts relatifs à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Avec le nouveau gouvernement Fillon, la compétence en matière d'énergie est retournée du ministère de l'écologie à celui de l'industrie. Ce nouveau partage des compétences devrait se traduire dans le périmètre de la mission budgétaire. Il est encore trop tôt pour savoir s'il impliquera également une scission de la direction générale de l'énergie et du climat qui a été mise en place depuis trois ans.

J'en viens à présent aux deux programmes spécifiquement consacrés à la protection de l'environnement au sein de la mission « Écologie ». Il s'agit tout d'abord du programme 113 qui recouvre les crédits consacrés à l'urbanisme et à l'aménagement, à la gestion de la ressource en eau et à la protection de la biodiversité. Les crédits demandés pour 2011 s'élèvent à 349 millions en autorisations d'engagement et 345 millions en crédits de paiement, soit une très légère baisse de 0,8 % par rapport au budget pour 2010. Je rappelle que ces crédits avaient, l'an dernier, augmenté de 5 %.

Les crédits consacrés à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement sont globalement préservés, à travers notamment le soutien au plan « Ville durable » et les subventions apportées aux principaux opérateurs du programme, comme les parcs nationaux, l'Office national de la chasse, ou encore l'Agence des aires marines protégées.

Sur les crédits affectés à l'urbanisme, je rappelle que, conformément à la révision générale des politiques publiques (RGPP), les missions d'ingénierie exercées dans le champ concurrentiel vont être supprimées sur trois ans, entre 2009 et 2012 ; en revanche, l'assistance technique de l'État au titre de la solidarité et de l'aménagement du territoire, dite « ATESAT », particulièrement importante pour les petites collectivités territoriales, est maintenue, et les effectifs affectés à cette mission se sont élevés à 1 650 en 2009.

Je me félicite ensuite que d'importants chantiers de simplification et de modernisation soient en cours, avec notamment la mise en oeuvre à venir de la dématérialisation des procédures pour les permis de construire et la réforme de la taxe locale d'équipement qui se fera dans le cadre de la loi de finances rectificative. Les élus locaux ne peuvent que se féliciter de ces mesures car, parallèlement, les nouvelles dispositions que nous avons adoptées, dans le cadre du Grenelle II, les obligeront, dans les prochaines années, à intégrer de nouvelles dispositions, assez lourdes, dans leurs documents d'urbanisme.

A ce sujet, je souhaite, comme l'avait fait Jean Bizet l'an dernier, que le nombre de projets de schémas de cohérence nationale (SCOT) aidés augmente davantage. Il est prévu de passer de 14 en 2010 à 20 ou 30 en 2011. On peut se féliciter de cette hausse, mais on est encore loin du nombre de projets de SCOT actuellement à l'étude, d'autant que nous avons voté, dans le Grenelle II, la généralisation de ces documents. Or, ce nombre pourrait être plus important car, comme l'an dernier, l'enveloppe dédiée au financement des plans locaux d'urbanisme (PLU) intercommunaux est, quant à elle, clairement surestimée. L'an dernier, alors qu'il était prévu de financer 20 projets de PLU intercommunaux, seuls 3 ont été soutenus. Il est donc surprenant que le ministère prévoit en 2011 d'en soutenir 40, et il serait souhaitable que ce soutien bénéficie davantage à l'élaboration des SCOT.

J'en viens à présent aux crédits consacrés à la biodiversité. J'ai souhaité cette année évoquer un thème en cours de réflexion, la création d'une Agence de la nature. Cette proposition a été formulée en 2007 dans le cadre de la table ronde du Grenelle de l'environnement consacrée à ce sujet, qui était présidée par nos collègues Jean-François Le Grand et Marie-Christine Blandin. Elle part d'un constat simple et partagé, celui de la complexité assez effarante de l'organisation fonctionnelle actuelle en matière de biodiversité.

Ainsi, pas moins de 45 organismes sous tutelle ou agréés et financés par l'État interviennent dans le domaine de la biodiversité, dont 21 établissements publics administratifs. S'y ajoutent 45 parcs naturels régionaux, 164 réserves naturelles nationales, 160 réserves naturelles régionales, 21 conservatoires régionaux des espaces naturels, 8 conservatoires départementaux et les organisations qui gèrent les espaces sensibles des départements.

Dans leur rapport remis en juillet, l'inspection générale des finances et le conseil général de l'environnement estiment que cette organisation menace le respect de nos engagements internationaux, y compris le réseau Natura 2000 et la trame verte et bleue.

Depuis le Grenelle, la création d'une Agence de la nature a été proposée en juillet par le conseil de modernisation des politiques publiques, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Cette idée apparaît également dans le rapport assez critique de la Cour des comptes sur Parcs nationaux de France (PNF), dont les auteurs suggèrent le rapprochement avec d'autres établissements, comme le Conservatoire du littoral ou l'Agence des aires marines protégées. Un même vocable peut abriter des philosophies différentes !

Lorsque nous avons auditionné Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, elle envisageait un texte de loi pour l'année prochaine. Il est important que nous soyons associés à cette réflexion, car nous devons veiller à ne pas complexifier davantage le paysage institutionnel : il ne faut pas juste ajouter un nouvel organisme. Nous devons également éviter tout coût supplémentaire, ce qui suppose une réelle mutualisation des fonctions supports. Enfin, les élus locaux doivent prendre une très large part à la nouvelle gouvernance de la biodiversité, car cette problématique les concerne au premier chef, notamment pour la mise en oeuvre de la trame verte et bleue.

J'en viens au programme 181, relatif à la prévention des risques.

Les dotations demandées pour 2011 s'élèvent à 373,5 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 7 %, et à 303,5 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse d'environ 1 %. L'an dernier, ces crédits avaient augmenté de quelque 30 %.

Cette année, le programme présente trois particularités marquantes.

Tout d'abord, les crédits demandés pour la prévention des risques technologiques et des pollutions atteignent 215,4 millions d'euros en autorisations d'engagement, la hausse étant principalement due aux mesures foncières prises dans le cadre des plans de prévention des risques technologiques, dont le retard d'élaboration doit être rattrapé d'ici la fin 2011. Nous devrons surveiller attentivement la réalisation de cet objectif.

Ensuite, le programme 181 est marqué par la montée en puissance des ressources de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), car la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) affectée à cet établissement va passer de 490 millions à 508. L'article 71 prolonge cette affectation en 2012 et 2013, à hauteur de 485 millions d'euros, en plus de la totalité du produit de la « TGAP incinération ». Cette hausse doit permettre de financer un traitement des déchets conforme au Grenelle de l'environnement, puisque l'intégralité des TGAP nouvelles sur les déchets devait être affectée à cette politique. En 2009, leur montant a été estimé à 87 millions d'euros. En contrepartie, l'engagement de 1'ADEME en faveur des déchets est passé de 59 millions d'euros en 2008 à 109 en 2009. On peut se réjouir de cette forte hausse, mais le produit supplémentaire de TGAP s'est en réalité largement substitué aux sommes que l'ADEME consacrait déjà aux déchets en 2008.

Le troisième point concerne le plan de prévention des submersions marines et des crues rapides, élaboré à la suite de la tempête Xynthia et dont la nécessité a été accentuée par les événements survenus dans le Var. Sa mise en oeuvre, qui commencera en 2011, s'articulera avec la directive européenne sur les inondations. Il comporte 6 axes : la réduction de la vulnérabilité dans les zones menacées par la maîtrise de l'urbanisation, l'amélioration de la prévision, le renforcement des digues, l'organisation de leur maîtrise d'ouvrage, une meilleure sécurité des ouvrages de protection et l'amélioration de la connaissance.

J'en viens au renforcement des digues, dont l'article 71 permettra le financement par le « Fonds Barnier » pour ce qui est des ouvrages domaniaux. La mission sénatoriale sur la tempête Xynthia ayant insisté sur la défectuosité de leur entretien, nous ne pouvons que nous féliciter de cette initiative : il faut reprendre 75 kilomètres de digues sur 103 en Vendée et 120 kilomètres sur 224 en Charente-Maritime. En outre, ce Fonds devra financer la délocalisation des biens exposés aux risques de submersion marine dans les départements de Charente-Maritime et de Vendée. Il s'agit en clair des expropriations, dont le coût est évalué à 400 millions d'euros, dont 170 en 2010. Vu l'ampleur de cette dépense, le présent projet de loi de finances comporte l'affectation au fonds d'un dividende exceptionnel de la Caisse centrale de réassurance, dans la limite de 100 millions d'euros.

En conclusion, les crédits consacrés à l'environnement dans le budget pour 2011 marquent, dans un contexte budgétaire contraint, une volonté forte de poursuivre l'engagement de l'Etat dans ce domaine. C'est pourquoi je vous propose d'adopter les crédits des programmes 113 et 181, ainsi que les articles rattachés 71 à 72.

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