Intervention de Roland Courteau

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 17 novembre 2010 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2011 — Mission ecologie développement et aménagement durables - examen des rapports pour avis

Photo de Roland CourteauRoland Courteau, rapporteur pour avis :

Le programme « Énergie et après-mines » est doté de 741,6 millions en autorisations d'engagement et de 752,2 millions en crédits de paiement pour 2011. Pas moins de 94 % d'entre eux sont consacrés à l'action « Gestion économique et sociale de l'après-mines », laquelle finance les prestations servies par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines aux anciens mineurs et à leurs ayants droit. La démographie de cette population explique la réduction des crédits de 5,7 % observée cette année.

La division par dix des crédits de l'action « Politique de l'énergie » s'explique par le transfert de la subvention destinée à l'ADEME au programme 181. L'essentiel des crédits de cette action est désormais consacré à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. A l'inverse, l'action « Lutte contre le changement climatique », qui finance la subvention allouée au Centre interprofessionnel d'étude de la pollution atmosphérique et aux associations agréées de surveillance de la qualité de l'air, enregistre une hausse de ses crédits de 42,7%.

A ce programme, sont rattachées d'importantes dépenses fiscales estimées à 2,4 milliards en 2011, pour 752 millions de crédits seulement. Le crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie et du développement durable est évalué, à lui seul, à 2,1 milliards. En conséquence de la politique de maîtrise de la dépense fiscale, le coût estimé de ce crédit d'impôt a été réduit de 20,9 % en trois ans. Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit de diminuer son taux de 50 à 25 % pour les panneaux photovoltaïques en France métropolitaine et, en outre-mer, de supprimer totalement les incitations fiscales à l'investissement dans l'énergie photovoltaïque. S'il faut maîtriser la bulle spéculative du photovoltaïque, je m'inquiète de la brutalité de cette correction et souligne qu'il convient de traiter équitablement les projets d'installations en cours d'autorisation ou de raccordement.

Le projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (NOME) sera vraisemblablement prochainement adopté conforme en deuxième lecture par l'Assemblée nationale. Sans vouloir rouvrir les débats, j'ai souhaité faire un point sur le marché de l'électricité. Pour la première fois depuis 1990, la consommation d'électricité a diminué de 2,1% en 2009. Cette réduction exceptionnelle s'explique par le recul de l'activité industrielle à cause de la crise. En revanche, la consommation du secteur résidentiel-tertiaire a progressé de 2 %. La puissance maximale installée s'élève à 119 GW en 2009 : 25,4 pour l'hydraulique, 63,3 pour le nucléaire, 24,7 pour le thermique classique et 5,6 GW pour les énergies renouvelables autres que l'hydraulique. D'après RTE, nous aurons besoin de 3 GW supplémentaires avant 2015. EDF a assuré 86,6 % de la production nationale en 2009, loin devant GDF Suez et E.On qui ont respectivement fourni 4,1 % et 1,2 % de la production. Les prix du marché ont augmenté sensiblement pour les consommateurs industriels depuis 2002 : ils sont passés de 22-23 euros le MWh en 2001 à 50-60 euros en 2010, en passant par un pic à 90 euros en 2008. Pour la troisième année consécutive, on enregistre une hausse des tarifs réglementés : 3 % pour le tarif bleu domestique et de 4 à 5,5 % pour les tarifs professionnels bleu, jaune et vert, le 15 août 2010. L'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH), introduit dans le projet de loi NOME, risque de ne pas être aussi intéressant pour le consommateur que le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché (TaRTAM). Pour faire bref, les jours des tarifs réglementés sont comptés. Le chiffre d'affaires d'EDF augmente de 3,9 % globalement, mais baisse de 0,8% en France. L'entreprise prévoit d'investir 24 milliards d'euros par an en France entre 2010 et 2012, contre 19 milliards à l'étranger. Cette expansion à l'international trouve ses limites dans l'endettement du groupe qui s'élève à 44,1 milliards au 30 juin 2010.

Concluons ce panorama par les énergies renouvelables. Si l'énergie éolienne a connu une progression régulière, le photovoltaïque s'est envolé : la puissance installée a été presque multipliée par trois l'an dernier. L'annonce d'un ajustement des tarifs d'achat, sans doute prématurée, a entraîné fin 2009 un dépôt massif de projets : la file d'attente dépassait 4000 MW. Résultat, la contribution aux charges du service public de l'électricité est passée de 1,8 milliard en 2009 à 2,2 milliards en 2010, sans être compensée intégralement comme l'avait prévu la loi. Les députés ont corrigé cette anomalie en introduisant dans le projet de loi de finances pour 2011 une disposition qui prévoit l'ajustement automatique du taux de la CSPE en fonction de l'évaluation faite par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), ce qui entraînera une augmentation des tarifs réglementés. Le Gouvernement, face à la bulle spéculative du photovoltaïque, a diminué le tarif d'achat et les avantages fiscaux. Ce coup de frein, sans décourager les purs spéculateurs motivés par des taux de rendement internes élevés, compromet le développement d'une filière industrielle française allant de la construction des panneaux photovoltaïques à la production d'électricité. Aujourd'hui, nous achetons des panneaux de mauvaise qualité aux Chinois ! Même coup de frein concernant le soutien à l'éolien : l'article 59 du projet de loi de finances pour 2011, après les mesures restrictives de la loi portant engagement national pour l'environnement, porte l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) spécifique à l'éolien de 2 913 euros à 5 000 euros le MW, soit une augmentation de 45 %. Ces évolutions mettent en lumière le manque de cohérence entre les objectifs du Grenelle de l'environnement pour les énergies renouvelables et les mesures adoptées ou proposées ces derniers mois.

Pour toutes ces raisons, je propose un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion