Intervention de Georges Tron

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 11 mai 2010 : 1ère réunion
Dialogue social et fonction publique — Audition de M. Georges Tron secrétaire d'etat chargé de la fonction publique

Georges Tron, secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique :

Je suis très heureux de vous présenter ce texte, qui est issu des accords dits de Bercy de juin 2008 sur le dialogue social dans la fonction publique. Cet accord a été approuvé par 75% des organisations syndicales, et cette adhésion traduit une certaine évolution de la négociation dans la fonction publique : le Gouvernement entend donc le reprendre, sans s'interdire, cependant, de le compléter par des dispositions propres à mieux défendre les agents ou à améliorer le service public rendu.

Avec ce texte, l'élection devient le fondement de la représentativité des syndicats : tout agent sera éligible et électeur, même les non-titulaires, aux comités techniques de la fonction publique de l'Etat. Autre innovation, les élections professionnelles seront ouvertes à tous les syndicats légalement constitués depuis au moins deux ans, ce qui corrige le système actuel de la représentativité par présomption. Il suffira d'adhérer aux valeurs de la République - qui peut trouver ce critère restrictif ? - et d'avoir une ancienneté de deux ans pour pouvoir présenter des candidats. C'est un dispositif large et souple.

Second pilier, ce texte renforce la négociation à tous les niveaux de l'administration. Le champ de la négociation est élargi bien au-delà des questions salariales : y seront inclus notamment le déroulement des carrières, la formation, l'action sociale, la protection sociale complémentaire, l'hygiène et la sécurité au travail, le handicap, en somme tout ce qui concerne le travail et les carrières des agents.

Ce texte détermine les conditions de validation des accords : il leur faudra, à compter de 2014, recueillir l'approbation d'au moins 50% des votants. Le gouvernement fait ici un pari, la barre est élevée, mais les accords passés ces dernières années démontrent qu'elle peut être largement dépassée : les accords de Bercy ont recueilli les trois quarts des suffrages et l'accord sur la santé et la sécurité au travail, 80%. Ce texte prévoit en outre une période transitoire jusqu'en 2014 : les accords seront reconnus à la double condition de recueillir l'approbation d'au moins 20% des votants et que 50% des votants ou plus ne s'y opposent pas.

Le Gouvernement ne s'est toutefois pas interdit de compléter les accords de Bercy, pour mieux protéger les agents et améliorer le service.

Ce texte crée un Conseil commun, - dénomination que l'Assemblée nationale, sur proposition de l'opposition, a préférée à celle de Conseil supérieur de la fonction publique -, qui examinera les questions communes aux trois fonctions publiques, de façon à éviter que le dialogue social ne progresse différemment pour chacune d'elle.

Nous proposons également d'abandonner, pour la fonction publique de l'Etat, la parité numérique dans les négociations. Ce point a suscité bien des interrogations sur tous les bancs de l'Assemblée nationale, il mérite des explications. La parité numérique, qui a été abandonnée de longue date dans la fonction publique hospitalière, conduit les auteurs d'un texte à le défendre devant le Conseil, ce qui revient à leur demander de faire deux fois le même travail, c'est souvent une perte de temps, sans valeur ajoutée. Pour la fonction publique territoriale, la question est un peu différente puisqu'on ne saurait attendre une vision uniforme des 55 000 employeurs concernés. Le Gouvernement a entendu les remarques qui ont été faites et l'Assemblée nationale a assoupli la rédaction initiale, en rendant possible le maintien de la parité numérique, ce qui devrait lever toutes les inquiétudes.

Nous modifions aussi la politique de rémunération dans la fonction publique, avec la prime de fonctions et de résultats (PFR). La rémunération résultera ainsi de trois critères : le grade, la fonction et le mérite. Nous créons également un nouvel échelon, baptisé « grade à accès fonctionnel » (Graf) pour les agents de la catégorie A au sommet de la grille. Cette amélioration répond à celles intervenues pour la catégorie C en 2006 avec l'accord « Jacob » et pour la catégorie B en 2008 avec l'accord « Woerth ». Les syndicats voulaient certes aller plus loin, mais ils reconnaissent que le Graf va dans la bonne direction.

Nous faisons converger les dates des élections syndicales dans les trois fonctions publiques, ce qui suppose de modifier également la durée des mandats, actuellement de trois ans dans la fonction publique d'Etat, de quatre ans dans la fonction publique hospitalière et de six ans dans la fonction publique territoriale. Une date d'élection commune est donc proposée à la mi-2011 pour les fonctions publiques d'Etat et hospitalière, une autre en 2014 pour les trois fonctions publiques, ce qui supposera d'adapter les mandats en cours. Il faudra veiller à la compatibilité des modes d'élection des comités techniques de la fonction publique d'État ; les élections de 2010 devront être validées pour éviter de nouvelles élections en 2011.

Nous créons un comité d'hygiène, de santé et de sécurité au travail, en précisant les règles d'éligibilité et d'élection.

Enfin, l'article 30 de ce texte valorise le statut des infirmières en leur reconnaissant l'accès à la catégorie A, avec un droit d'option pour les infirmières en poste, ouvert pendant six mois. Les infirmières demandent depuis longtemps l'accès à la catégorie A, qui correspond à leur niveau d'études de trois ans après le bac. Cet accès les intègre au parcours LMD et doit revaloriser leur rémunération, comme leur pension, tout en se traduisant par un report du départ à la retraite de 55 ans à 60 ans. Les infirmières qui auront décidé de rester en catégorie B, pour leur part, bénéficieront également d'une bonification de rémunération.

Le texte que je vous présente est important pour le dialogue social dans la fonction publique, il en rend les conditions plus claires et mieux lisibles ; il reprend les accords de Bercy en valorisant l'élection et la négociation, ce qui préfigure, me semble-t-il, l'avenir des discussions dans la fonction publique.

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