Le gouvernement a en effet souhaité changer le statut de l'APE. Cette volonté se traduit concrètement par deux éléments : une séparation stricte entre l'APE et la Direction générale du Trésor, et un changement de profil à la tête de l'APE. Le directeur général de cette agence doit en effet avoir un profil d'expérience variée, c'est-à-dire tant au sein du secteur public que privé, afin de pouvoir parler d'égal à égal avec les dirigeants des entreprises publiques. Il est essentiel que l'APE ne soit pas vue de façon désincarnée. Le profil que j'incarne est ainsi plus à même d'épouser le tournant de la politique actionnariale de l'Etat.
Que modifier pour marquer cette nouvelle orientation ? Il n'est pas prévu de changer les modalités d'organisation pratique de l'APE. En revanche, seront développées les études sectorielles relatives à la place des entreprises dans leur secteur d'activité, national et international, afin de disposer de données et d'analyses dont l'Agence ne disposait pas auparavant. J'ai obtenu, dans ce cadre, davantage de crédits d'études, ainsi que la possibilité de recruter des contractuels. La réorientation de la stratégie de l'APE se traduira également via l'accompagnement des entreprises et des propositions d'orientation stratégique à moyen terme.
Il convient également de ne pas perdre de vue qu'une entreprise au sein de laquelle l'Etat détient des participations doit être considérée comme une entreprise : l'Etat doit être un actionnaire responsable et adapter son processus de décision à la vie de l'entreprise. Lorsque je suis arrivé par exemple, j'ai découvert que, dans certaines entreprises, les éléments, les critères de la rémunération variable des dirigeants pour 2010 n'avaient pas encore été fixés. Comment, dans ces conditions, avoir un dialogue crédible avec elles ?
Concernant le Fonds stratégique d'investissement (FSI), il a été créé, vous le savez, en 2008. Il est vrai qu'on a pu avoir l'impression, au départ, d'une dispersion de ses investissements. Le FSI en tire aujourd'hui les conséquences en posant des critères d'investissement clairs. Une règle forte a ainsi été acceptée : tous ses investissements doivent se faire sous la forme d'une augmentation du capital. Il n'est pas question en effet que le FSI assure la liquidité d'un actionnaire existant d'une entreprise sans projet de développement particulier et sans apport de moyens nouveaux à l'entreprise. Au contraire, le FSI doit pouvoir apporter des moyens nouveaux en fonds propres à une entreprise qui a des projets de développement. On a pu constater au cours des deux dernières années que la partie la plus importante des fonds investis par le FSI avait été mal utilisée du point de vue de ce critère. Il ne s'agit pas d'exclure complètement évidemment des opérations de liquidité. Lorsqu'il s'agit de marquer un signal fort vis-à-vis d'un prédateur potentiel pour une entreprise qu'on considère comme stratégique, comme Vallourec par exemple, le FSI a clairement un rôle à jouer. A contrario, lorsqu'il s'agit d'assurer la sortie du fonds d'investissement d'une entreprise, il n'a aucun rôle à jouer. Il faut ré-articuler la politique d'investissement du FSI au profit du développement des entreprises, sans oublier la possibilité pour le FSI de marquer l'intérêt public pour une entreprise qui serait menacée par des acheteurs.
Comment la crise a-t-elle affecté les entreprises au sein desquelles l'Etat détient des participations ? Tout d'abord, par une baisse très sensible en 2009 des dividendes versés à l'Etat actionnaire : ils sont passés de 5,5 milliards d'euros à 4,2 milliards d'euros. Pour les 57 entreprises prises en compte dans les comptes combinés, le résultat net est de 7,4 milliards d'euros contre 8,3 milliards d'euros en 2008, le chiffre d'affaires est de 128 milliards d'euros contre 147 milliards d'euros en 2008. Mais l'Etat ne s'est pas contenté de perdre des dividendes, il a réagi en créant au sein du FSI des fonds spécialement dédiés comme le Fonds de modernisation des équipementiers de l'automobile (FMEA).