Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du 20 octobre 2010 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission procède à l'audition de M. Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat, sur le projet de loi de finances pour 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Au nom de la commission je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Nous avons en effet pensé avec M. François Patriat, rapporteur de l'avis budgétaire consacré au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat », qu'il serait intéressant que vous puissiez nous exposer les ressorts et la portée de la nouvelle fonction de commissaire qui est la vôtre au sein de l'Agence des participations de l'Etat (APE), et nous expliquer l'évolution de la politique des participations financières de l'Etat.

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'accueillir aujourd'hui pour parler devant votre commission, mais je souligne d'emblée mon inexpérience au poste de commissaire aux participations de l'Etat dans la mesure où j'ai été nommé le 3 août 2010 et où je n'ai pris mes fonctions que le 15 septembre dernier. C'est pourquoi je suis accompagné de M. Elie Beauroy, secrétaire général de l'APE, qui a une connaissance plus précise de certains aspects du fonctionnement de l'agence et qui pourra utilement compléter mon propos.

Je suis en réalité à la fois commissaire aux participations de l'Etat et directeur général de l'APE. Ce que le Gouvernement a voulu faire en élargissant le périmètre de l'APE et en « rehaussant » le titre de la personne se trouvant à sa tête, c'est élargir la vision du rôle de l'Etat actionnaire : il s'agit de passer d'une stratégie purement patrimoniale à une stratégie industrielle à long terme, dans le respect bien entendu de ses intérêts patrimoniaux et de l'objet social de chacune de ses participations. Il est important que l'Etat dépasse le seul intérêt patrimonial et financier, qu'il puisse discuter avec les entreprises dans lesquelles il détient des participations et marquer son influence dans les orientations stratégiques que ces dernières vont prendre. Au-delà des aspects industriel et patrimonial, cette nouvelle orientation comporte aussi un aspect social : il s'agit pour l'Etat de pouvoir fournir aux 1,5 millions de salariés concernés par ces entreprises des perspectives d'emploi et de développement de projets de formation professionnelle. Nous sommes attentifs à toutes les conséquences des décisions que peuvent prendre les entreprises, que ce soit en matière d'emploi, que de délocalisation ou de relocalisation.

Comment cette nouvelle organisation est-elle concrètement mise en oeuvre ? L'Etat réunit tous les six mois les présidents des entreprises concernées au niveau du ministre de l'économie. Ces réunions sont approfondies ; elles durent généralement au moins deux heures et sont préparées en amont. Elles sont l'occasion pour les entreprises dont l'Etat est actionnaire d'exposer leur stratégie. Les contacts sont également réguliers entre ces réunions puisque l'Etat participe aux différents comités de gouvernance de toutes ces entreprises.

Concernant l'aspect social, des revues sont régulièrement faites sur la répartition par pays ou par zone des investissements des entreprises, de l'emploi, de la valeur ajoutée. Ces informations sont demandées à l'ensemble des entreprises dans lesquelles l'Etat détient des participations afin d'évaluer la contribution de chaque entreprise au développement économique et industriel du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Tout d'abord, je tiens à remercier le président de notre commission de donner de l'importance à cet avis budgétaire qui concerne en effet des questions tout à fait sensibles ayant un fort impact économique, stratégique et social. M. le commissaire, votre introduction répond à ce que j'affirmais déjà dans mon rapport l'année dernière, à savoir que l'Etat semble de plus en plus se comporter comme un actionnaire ordinaire, cherchant, d'une part, à maximiser son investissement, notamment en encaissant des dividendes et, d'autre part, à assurer un niveau de bonne gouvernance pour les entités dans lesquelles il détient une participation, mais qu'il est en revanche circonspect sur le rôle de l'Etat dans la stratégie industrielle des entreprises. Vous avez en effet rappelé qu'il n'était pas question que l'Etat s'immisce dans la gestion directe d'une entreprise ni ne se substitue au rôle de son président. Il appartient en revanche à l'Etat de ne pas être un actionnaire ordinaire.

Peut-être pourriez-vous, M. le commissaire, approfondir un peu votre propos. En effet, un communiqué du conseil des ministres a indiqué, concernant la nouvelle fonction de commissaire aux participations que vous occupez, qu'elle s'inscrivait « dans une évolution majeure du rôle que doit jouer l'Etat actionnaire et de ses modes d'intervention afin d'améliorer son efficacité, sa pertinence économique et industrielle et la compréhension que les citoyens en ont ». Je vous le demande donc aujourd'hui : quelle est précisément l'orientation d'une telle évolution ? Comment l'APE compte-t-elle s'y prendre pour améliorer son efficacité et sa pertinence économique ? L'Etat actionnaire agit-il aujourd'hui au bénéfice d'une stratégie industrielle bien identifiée ? D'une manière plus spécifique d'ailleurs, quelles seront les modifications concrètes apportées à l'organisation de l'APE ?

Par ailleurs, je rappelle que l'Etat mène une politique actionnariale au travers de plusieurs leviers, de plusieurs instruments, comme le Fonds stratégique d'investissement (FSI), la Caisse des dépôts et des consignations (CDC) et, bien sûr, l'Agence des participations de l'Etat (APE). Or, c'est un fait que ces instruments n'ont ni les mêmes objectifs ni les mêmes stratégies d'intervention. Comment envisagez-vous donc d'améliorer la lisibilité de cette politique ? Quelle est la part de chacun de ces différents acteurs dans la définition et la mise en oeuvre de la politique actionnariale de l'Etat et comment sont organisés les rapports entre ces entités ?

Enfin, j'aimerais que vous nous apportiez un éclairage sur l'impact qu'a eu la crise sur les entreprises dans lesquelles l'Etat détient des participations.

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Le gouvernement a en effet souhaité changer le statut de l'APE. Cette volonté se traduit concrètement par deux éléments : une séparation stricte entre l'APE et la Direction générale du Trésor, et un changement de profil à la tête de l'APE. Le directeur général de cette agence doit en effet avoir un profil d'expérience variée, c'est-à-dire tant au sein du secteur public que privé, afin de pouvoir parler d'égal à égal avec les dirigeants des entreprises publiques. Il est essentiel que l'APE ne soit pas vue de façon désincarnée. Le profil que j'incarne est ainsi plus à même d'épouser le tournant de la politique actionnariale de l'Etat.

Que modifier pour marquer cette nouvelle orientation ? Il n'est pas prévu de changer les modalités d'organisation pratique de l'APE. En revanche, seront développées les études sectorielles relatives à la place des entreprises dans leur secteur d'activité, national et international, afin de disposer de données et d'analyses dont l'Agence ne disposait pas auparavant. J'ai obtenu, dans ce cadre, davantage de crédits d'études, ainsi que la possibilité de recruter des contractuels. La réorientation de la stratégie de l'APE se traduira également via l'accompagnement des entreprises et des propositions d'orientation stratégique à moyen terme.

Il convient également de ne pas perdre de vue qu'une entreprise au sein de laquelle l'Etat détient des participations doit être considérée comme une entreprise : l'Etat doit être un actionnaire responsable et adapter son processus de décision à la vie de l'entreprise. Lorsque je suis arrivé par exemple, j'ai découvert que, dans certaines entreprises, les éléments, les critères de la rémunération variable des dirigeants pour 2010 n'avaient pas encore été fixés. Comment, dans ces conditions, avoir un dialogue crédible avec elles ?

Concernant le Fonds stratégique d'investissement (FSI), il a été créé, vous le savez, en 2008. Il est vrai qu'on a pu avoir l'impression, au départ, d'une dispersion de ses investissements. Le FSI en tire aujourd'hui les conséquences en posant des critères d'investissement clairs. Une règle forte a ainsi été acceptée : tous ses investissements doivent se faire sous la forme d'une augmentation du capital. Il n'est pas question en effet que le FSI assure la liquidité d'un actionnaire existant d'une entreprise sans projet de développement particulier et sans apport de moyens nouveaux à l'entreprise. Au contraire, le FSI doit pouvoir apporter des moyens nouveaux en fonds propres à une entreprise qui a des projets de développement. On a pu constater au cours des deux dernières années que la partie la plus importante des fonds investis par le FSI avait été mal utilisée du point de vue de ce critère. Il ne s'agit pas d'exclure complètement évidemment des opérations de liquidité. Lorsqu'il s'agit de marquer un signal fort vis-à-vis d'un prédateur potentiel pour une entreprise qu'on considère comme stratégique, comme Vallourec par exemple, le FSI a clairement un rôle à jouer. A contrario, lorsqu'il s'agit d'assurer la sortie du fonds d'investissement d'une entreprise, il n'a aucun rôle à jouer. Il faut ré-articuler la politique d'investissement du FSI au profit du développement des entreprises, sans oublier la possibilité pour le FSI de marquer l'intérêt public pour une entreprise qui serait menacée par des acheteurs.

Comment la crise a-t-elle affecté les entreprises au sein desquelles l'Etat détient des participations ? Tout d'abord, par une baisse très sensible en 2009 des dividendes versés à l'Etat actionnaire : ils sont passés de 5,5 milliards d'euros à 4,2 milliards d'euros. Pour les 57 entreprises prises en compte dans les comptes combinés, le résultat net est de 7,4 milliards d'euros contre 8,3 milliards d'euros en 2008, le chiffre d'affaires est de 128 milliards d'euros contre 147 milliards d'euros en 2008. Mais l'Etat ne s'est pas contenté de perdre des dividendes, il a réagi en créant au sein du FSI des fonds spécialement dédiés comme le Fonds de modernisation des équipementiers de l'automobile (FMEA).

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Et la Caisse des dépôts et consignations (CDC)?

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Il est clair que c'est l'APE qui incarne le rôle de l'Etat actionnaire et l'Etat n'entend pas déléguer ce rôle à la CDC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Il serait intéressant que vous nous expliquiez l'intervention de la CDC dans la recapitalisation de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Deneux

Votre nomination marque un virage dans le rôle de l'Etat au sein des entreprises dans lesquelles il détient des participations. Confirmez-vous que l'Etat aura donc désormais les moyens de mener une politique actionnariale cohérente ? Comment êtes-vous intervenu dans le cadre des différentes dispositions mises en place par le grand emprunt de 2010 ? Avez-vous par ailleurs les moyens de vous coordonner avec les différentes politiques régionales d'investissement ? J'aimerais également savoir comment l'APE intervient concrètement en bourse. Enfin, collaborez-vous avec les grandes fédérations industrielles comme le MEDEF par exemple ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

J'ai pour ma part deux questions. La première est relative à La Poste. En novembre 2009, nous avons débattu sur le projet de loi relatif au changement de statut de La Poste : malgré la pugnacité de l'opposition, il a été adopté et il prévoit la création d'une société anonyme, qui, à ma connaissance, est effective depuis le 1er mars 2010. Or, il était indiqué qu'à part un petit actionnariat privé constitué par les salariés, l'intégralité du capital serait détenue par l'Etat et la CDC. Les évaluations sur la valeur de La Poste ont été menées. Je pense que la CDC a une idée précise de ce que représenterait, en pourcentage du capital de La Poste, son apport de 1,5 milliard d'euros. En revanche, l'Etat devait apporter 1,2 milliard d'euros, or aucun projet de loi de finances initiale ou rectificative à ce jour n'a apporté quoi que ce soit à La Poste. Où en est-on aujourd'hui à ce sujet ?

Deuxième question, vous avez indiqué qu'en matière d'évolution des participations financières de l'Etat, le rôle de l'APE devait être d'accompagner les réflexions des pouvoirs publics et d'apporter des réflexions et des orientations, pouvez-vous alors nous dire où en est le rapprochement entre EDF et Areva ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Le Grand

Dans le droit fil des questions posées précédemment par François Patriat, je voudrais, pour ma part, faire un focus sur le transport aérien et les politiques aéroportuaires. La loi aéroportuaire dont j'ai été le rapporteur a autorisé les aéroports régionaux à évoluer dans leur structure et dans leur management, et notamment avec une possibilité de cession des parts de l'Etat. Or, l'Etat détient actuellement à peu près 60 % de chacun des cinq grands aéroports régionaux. Quelle est donc l'intention de l'Etat en matière de cession de ses parts dans les aéroports régionaux, et notamment dans celui de Toulouse-Blagnac ? Ma seconde question concerne l'orientation que vous souhaitez impulser par le biais de votre fonction. Il y a quelques années, j'ai été le co-auteur d'un rapport sur l'évolution d'EADS avec mon collègue Roland Ries. Nous avions relevé que l'APE était à l'époque un partenaire muet dans le conseil d'administration d'EADS. Qu'en est-il aujourd'hui avec la nouvelle impulsion que vous souhaitez donner au rôle de l'Etat actionnaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Navarro

Je crois que notre stratégie est trop franco-française et n'aborde pas assez les rapprochements européens. Des ratés comme celui qui a eu lieu entre AREVA et Siemens sont mal perçus. Où en sont donc des partenariats européens ? Deuxième question, pourquoi assiste-t-on en Chine à une véritable compétition entre EDF et AREVA ? Ne pouvez-vous pas les influencer pour qu'ils investissent en Chine ensemble ? Vous avez un rôle très politique et j'observerai votre travail avec beaucoup d'attention. Vous avez la responsabilité d'engranger le plus grand nombre de dividendes afin que l'Etat puisse les redistribuer. Les questions de rémunérations des dirigeants de ces entreprises doivent passer au second plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Pourriez-vous nous indiquer votre rattachement ? Y a-t-il une note qui précise le fonctionnement de l'APE ? Il y a en effet un enjeu fabuleux en termes de stratégie économique de notre pays. Comment vous placez-vous, dans ce cadre, par rapport au ministère de l'Economie ?

Deuxième question, quelle relation entretenez-vous ave la CDC ? Serait-il d'ailleurs possible d'avoir, pour chacune des entreprises dans lesquelles l'Etat détient des participations, la liste des autres actionnaires et le mode de gouvernance de chacune de ces entités ?

Enfin, sur la question des ports, je voudrais savoir comment l'Etat peut investir. Si l'on considère par exemple les deux entités Le Havre-Rouen et Marseille, on s'aperçoit que nous avons le meilleur positionnement stratégique de l'Europe du Nord, alors que le positionnement en termes de trafic est moins bon. Quand je vois les investissements énormes qui sont faits dans les autres ports, je m'interroge. Quelle est votre marge de manoeuvre en la matière pour influer dans tel ou tel sens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Quel est le rôle stratégique de l'APE ? Comment relancer l'industrie française et mieux organiser nos filières industrielles ? L'APE doit optimiser ses effets de levier et ne pas être passive au sein des conseils d'administration quel que soit le niveau de participation financière de l'Etat. Si nous avions dans ce pays une vraie volonté politique, le Gouvernement aurait mis en place une véritable politique industrielle qui concerne à la fois les grands groupes, mais aussi et surtout les PME, à l'instar de ce que l'on observe en Allemagne. Là-bas, les PME sont de taille beaucoup plus importante qu'en France, et bien plus dynamiques. Bien entendu, l'Europe doit aussi être plus ambitieuse en matière de politique industrielle. Enfin, je m'interroge sur la pertinence de certains investissements réalisés par la CDC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

La part de l'Etat dans EADS est-elle si faible qu'elle empêche la France de peser dans les orientations stratégiques de ce groupe ? Si oui, je ne vois pas à quoi cela sert de conserver des participations financières de l'Etat dans des entreprises industrielles. Si l'on cumule la part de 15 % de l'Etat et celle de 7,5 % du groupe Lagardère au sein d'EADS, on arrive pourtant à la conclusion que les membres français du conseil d'administration d'EADS ont des moyens d'agir et des devoirs bien spécifiques. Lors de l'élaboration et de la mise en oeuvre du plan « Power 8 », les représentants de l'Etat et du groupe Lagardère ont été transparents, alors que de nombreux emplois étaient supprimés en France. En outre, je plaide pour que les représentants de l'APE dans les conseils d'administration soient issus du monde industriel plutôt que de la banque. Il faut veiller par ailleurs à ce que le FSI protège les travaux des bureaux d'étude et l'activité de recherche et développement en France. Enfin, je m'interroge sur l'avenir de la filière aéronautique française à l'heure où l'entreprise Latécoère risque de passer sous le contrôle d'une entreprise étrangère. Le Gouvernement doit tout faire pour constituer une filière française performante et préserver nos emplois grâce au FSI.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Il faut des leviers de financement dans les secteurs en bonne santé, mais également des prises de participation dans les secteurs industriels en difficulté afin d'accompagner leur mutation en se fondant sur l'exemple des Länder allemands. La création d'emplois industriels doit être une priorité pour notre Gouvernement. N'attendons pas une hypothétique aide de l'Union européenne : l'Allemagne compte sur ses propres forces avec le succès que l'on connaît ! S'agissant du FSI et du FMEA, l'APE est-elle favorable à une décentralisation des aides, au niveau régional notamment, à destination des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME), qui génèrent de nombreux emplois comme chacun sait ? Par ailleurs, imposez-vous des contreparties lorsque vous aidez financièrement une entreprise, comme par exemple l'interdiction de délocaliser l'activité, ou la préservation de l'emploi en France ? Nous avons tous des exemples d'entreprises aidées par l'Etat qui quittent ensuite le territoire national. C'est pourquoi il faut moraliser ces aides publiques en imposant des conditions très précises.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Je pense que le rôle de l'Etat doit être aujourd'hui d'accompagner et d'orienter la stratégie des entreprises dans lesquelles il a des participations, sans se substituer à leurs dirigeants. Effectivement, une attention particulière doit être accordée aux TPE et aux PME, qui souffrent actuellement énormément de la crise économique. Comment peut-on les aider au niveau local ? Par ailleurs, je relève que le plan « Power 8 » a permis indiscutablement de renforcer la compétitivité d'EADS. Mais, je m'interroge sur l'avenir de la présence française au sein du conseil d'administration d'EADS. Quel sera l'opérateur qui remplacera l'opérateur actuel ? En outre, il faut que l'Etat envoie, dans les conseils d'administration où il a des participations, des représentants qui ont une réelle expérience du monde industriel. Certains hauts fonctionnaires ne connaissent pas forcément le monde de l'entreprise ! Enfin, je plaide pour une intervention dans le dossier Latécoère afin que cette entreprise ne tombe pas aux mains des industriels américains.

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Je tiens d'emblée à rassurer M. Alain Chatillon : les représentants de l'Etat ont des compétences réelles dans le monde industriel. Par ailleurs, l'Etat ne veut pas se substituer aux stratégies des entreprises mais, en aucun cas, il ne s'agit d'un actionnaire passif. Les représentants de l'Etat, comme n'importe quel actionnaire, discutent des stratégies industrielles avec les dirigeants des entreprises. S'agissant de la rémunération des dirigeants d'entreprise, j'ai constaté avec surprise que les critères de part variable n'ont pas été fixés au préalable. Aucun dirigeant d'entreprise n'est venu me voir pour influencer mon jugement ! Concernant la valorisation de La Poste, un accord est en train d'être conclu dans le cadre de la commission de privatisation des transferts (CPT), qui se réunit pour la première fois aujourd'hui, et comprend l'Etat, La Poste et la CDC. Le Gouvernement n'était pas obligé de réunir cette commission. La part fixe de la valorisation de La Poste s'élève à 3 milliards d'euros. La part variable oscillera entre 1,3 et 2 milliards d'euros selon le nombre d'objectifs qui seront atteints et qui figurent dans le plan d'affaires pour la période 2010-2015. Au total, la valorisation de La Poste ne pourra donc excéder 5 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Pourtant, avant la survenance de la crise économique, cette valorisation atteignait 10 milliards d'euros !

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Le montant des capitaux propres comptables au 30 juin 2010 s'élève à 4,3 milliards d'euros, et les résultats de La Poste en 2010 s'annoncent très bons. La CDC devrait prendre possession de 26,32 % du capital de La Poste, le reste étant conservé par l'Etat. Les augmentations de capital de la part de l'Etat et de la CDC seront libérées progressivement. Une première augmentation de capital interviendra dans le cadre du projet de loi de finance pour 2011.

S'agissant de la filière nucléaire française à l'international, le conseil de politique nucléaire du 27 juillet dernier a désigné EDF comme chef de file. Le partenariat est en cours de négociation entre cette entreprise et AREVA, au travers de six groupes de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Je tiens d'ailleurs à vous informer que notre commission auditionnera prochainement Mme Anne Lauvergeon, présidente du directoire du groupe AREVA.

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

L'APE travaille continuellement sur les moyens d'augmenter le capital d'AREVA de 15 % pour faire face à ses besoins d'investissements. Par ailleurs, la réflexion sur la filière minière d'AREVA est désormais lancée. Va-t-on privilégier le cadre national ou international ? Pour l'instant, nul ne le sait.

Concernant les aéroports régionaux, nous avons également lancé une réflexion sur les moyens de faire passer la participation de l'Etat sous la barre des 60 %. La Société Générale éclairera d'ailleurs l'APE sur les choix à faire. Des négociations sont en cours avec les organes sociaux des aéroports de Lyon, Toulouse-Blagnac et Bordeaux, ainsi qu'avec les élus locaux. Pour l'heure, il est trop tôt pour se prononcer sur un désengagement partiel ou substantiel de l'Etat dans ces aéroports.

S'agissant d'EADS, je rappelle que l'Etat allemand s'est toujours opposé à la représentation de ses propres intérêts au conseil d'administration. Par conséquent, je vois mal pourquoi on appliquerait des règles différentes pour l'Etat français par rapport à l'Etat allemand. L'Etat conserve évidemment un droit de véto à travers la SOGEADE, lorsqu'il s'agit de grandes opérations de développement, supérieures à 500 millions d'euros. En outre, le président d'EADS, M. Louis Gallois, communique régulièrement avec l'Etat français sur ses programmes industriels et sur la stratégie du groupe. Il a d'ailleurs récemment indiqué que les emplois liés au programme de l'A350 seraient majoritairement localisés en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Certes, mais ce programme ne garantit pas un retour sur investissement rapide et il est de bien moindre envergure que celui de l'A320.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Ce qui compte, ce n'est pas le retour sur investissement mais l'emploi généré par ce programme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Le Grand

Il serait bon d'inviter M. Louis Gallois à s'exprimer devant notre commission. Le plan « Power 8 » a eu des conséquences très positives sur la compétitivité d'EADS, comme j'ai pu le remarquer la semaine dernière lors de ma rencontre aux Etats-Unis avec les dirigeants de Boeing.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

M. Louis Gallois est venu récemment devant notre commission. Mais il pourrait à nouveau être auditionné en avril-mai prochain. Réjouissons-nous : son groupe a un carnet de commandes bien rempli...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Est-il normal que l'activité « civile » finance l'activité « militaire » au sein d'Airbus ? Cette situation est à l'origine d'un écart de trésorerie de 2 milliards d'euros, d'autant plus regrettable avec un euro fort par rapport au dollar.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

On ne peut pas passer sous silence les nombreux emplois qui ont été détruits par le plan « Power 8 », notamment dans ma région.

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Il faut se féliciter de la compétitivité d'EADS. La question de la localisation de l'emploi industriel en France est au centre des préoccupations de l'APE. Le FSI vient d'ailleurs de recruter un responsable des questions sociales pour élaborer des critères sociaux qu'il appliquera lors de ses investissements. Je réponds à M. Martial Bourquin que les aides doivent être remboursées lorsqu'une entreprise décide de se délocaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Je réitère ma demande. Je souhaiterais avoir une note sur la stratégie globale de l'Etat dans ses grands ports maritimes, indiquant notamment les noms des personnes qui suivent ce dossier à l'APE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Je suis surpris de constater que les grands ports maritimes sont encore détenus à 100 % par l'Etat, alors qu'il me semblait que la loi portant réforme portuaire devait libéraliser les ports et les ouvrir à l'activité économique privée. D'ailleurs, vous avez peut-être appris comme moi que certaines entreprises de manutention portuaires opèrent sur des quais où l'activité est saturée, alors que d'autres terminaux sont déserts...

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Il faut absolument réfléchir transversalement lorsque l'on aborde la question des grands ports maritimes. Il y a un lien évident entre ce sujet et le débat sur l'avenir du fret ferroviaire que nous avons eu hier en commission. Pourquoi ne pas intéresser financièrement les entreprises qui opèrent dans les grands ports maritimes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Que la SNCF et la RATP, toutes deux détenues à 100% par l'Etat, se livrent à une certaine concurrence sur le territoire national, ne me choque pas. C'est légitime. En revanche, il est regrettable de constater qu'au niveau international, la SNCF et la RATP ne parviennent pas à unir leurs forces pour créer une filière d'ingénierie ferroviaire française performante. Ne pourrait-on pas s'inspirer, dans ce domaine, de l'expérience entre AREVA et EDF justement ?

Debut de section - Permalien
Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

Le sujet que vous évoquez, Monsieur le Président, est essentiel. Sur ce point, j'ai été frappé par le manque d'ambition du rapport de M. Jean-François Bénard relatif à l'avenir du groupe Systra. Nous devons créer un champion français de l'ingénierie française à l'international. Pour ce faire, nous devons discuter avec la RATP et la SNCF, afin de rapprocher leur point de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Je vous remercie pour votre intervention et pour les réponses écrites que vous ne manquerez pas de faire à nos différents Sénateurs sur les sujets que nous avons évoqués ensemble aujourd'hui.