a souligné que, depuis plusieurs années, l'aide juridictionnelle (AJ) constituait un sujet majeur de réflexion et d'action dans le cadre des travaux de la commission. Face aux inquiétudes de la profession d'avocat, et devant l'accroissement considérable du nombre des missions d'AJ depuis 1991 (+ 159 %), il a rappelé qu'il avait décidé, en 2007, de conduire une mission de contrôle sur le dispositif et les crédits de l'AJ.
Il a observé que ce contrôle avait, notamment, permis de mieux cerner le rôle essentiel des caisses autonomes de règlements pécuniaires des avocats (CARPA) dans la chaîne de la gestion des crédits de l'aide.
Il a estimé que la mission d'enquête demandée à la Cour des comptes, au titre de l'article 58-2 de la LOLF, avait vocation à dissiper certaines zones d'ombre pouvant encore subsister. La Cour des comptes avait sélectionné un échantillon de 13 CARPA, sur un total de 152 et un choix judicieux avait été opéré entre les différentes grandes catégories de caisses.
a souligné que l'enquête ne mettait en lumière aucune irrégularité grave et manifeste, ni aucune dérive inquiétante dans la gestion des CARPA.
Il s'est félicité, du point de vue du justiciable, de ce que le service public de l'AJ ne soit nullement entravé par le fonctionnement des CARPA qui jouaient au contraire, dans le système de l'aide, un rôle moteur. Aucun justiciable n'est privé de l'AJ du fait d'un éventuel dysfonctionnement dans l'organisation des CARPA.
Du point de vue de l'avocat, le système des CARPA, très autorégulé par la profession, semble également donner satisfaction, notamment s'agissant des délais de paiement.
Le tableau d'ensemble mérite d'être nuancé : la gestion de l'AJ par les CARPA peut encore largement être améliorée et si la profession d'avocat se trouve en première ligne sur ce terrain, la Chancellerie représente aussi un acteur à part entière du système, qui doit assumer toutes ses responsabilités.
Un premier élément d'amélioration du dispositif réside dans l'architecture informatique du système : l'Union nationale des CARPA (UNCA) a développé un logiciel d'aide à la gestion de l'AJ, mais ce logiciel ne couvre pas toutes les CARPA, puisqu'il ne concerne ni celle de Papeete, ni celle de Nouméa et, surtout, pas celle de Paris. Outre les surcoûts induits, cette absence d'unité sur l'ensemble du territoire laisse planer d'épineux problèmes de compatibilité entre les logiciels.
Par ailleurs, alors que le logiciel de l'UNCA aurait dû être homologué par les services de la Chancellerie au plus tard le 1er janvier 1998, cette homologation n'est toujours pas intervenue.
La Chancellerie a donc fait défaut à au moins trois titres. Elle a, tout d'abord, laissé l'UNCA développer son logiciel sans lui imposer de cahier des charges. Elle n'a pas, ensuite, fait respecter le calendrier d'homologation très précis qu'elle avait pourtant elle-même fixé à l'UNCA. Elle a, enfin, accepté l'implantation dans les CARPA de ce logiciel non homologué, en prenant le risque de les laisser utiliser un outil informatique non fiable.
a relevé qu'une autre amélioration renvoyait à la relation entre ces caisses et leurs interlocuteurs au sein des tribunaux de grande instance (TGI) : le bureau d'aide juridictionnelle (BAJ) et le greffe.
La plupart des BAJ ont établi une liaison électronique avec les CARPA. Toutefois, une soixantaine de juridictions n'y ont toujours pas recours et se bornent à une notification des décisions d'AJ aux CARPA sous format papier, bien que l'existence d'une telle liaison électronique constitue un facteur de sécurisation supplémentaire des données et un gain de temps.
Il a donc insisté sur la nécessaire modernisation de cette liaison entre les BAJ et les CARPA qui doit passer par internet, dans un cadre qui garantirait la sécurité des données, le confort des utilisateurs et de considérables gains de temps.
Il s'est inquiété de l'absence systématique de relations organisées entre le greffe et la CARPA, et de ce qu'après avoir délivré l'autorisation de fin de mission (AFM), le greffe ne soit plus informé de la suite de la procédure, sauf si la CARPA demande une modification de l'AFM en cas d'erreur ou d'oubli.
Au sein même des juridictions, le circuit d'information est fréquemment défaillant.
S'agissant de la gestion des crédits de l'AJ, les taux de report, d'une année sur l'autre, sont très instructifs : de 2007 sur 2008, ils représentent 54 millions d'euros, soit 21,5 % de la dotation globale versée aux CARPA en 2007, ce qui démontre que des progrès restent à réaliser en matière de calibrage des dotations.
De même, le taux de couverture des charges des CARPA, liées aux frais de gestion des dossiers à l'AJ, par les produits financiers des placements des CARPA au titre de la dotation déléguée en début d'année par la Chancellerie, apporte un éclairage intéressant, car ce taux de couverture est de 26,5 % en 2005.
Cela tient notamment à l'impact du niveau des taux d'intérêt au cours de la période, mais traduit aussi une diversité des placements, dans la mesure où un nombre élevé de CARPA ne dispose pas d'une surface financière suffisante pour mettre en oeuvre de véritables stratégies de placement à court et moyen termes : plus d'un tiers des barreaux touche moins de 750.000 euros de dotation par an.
a observé que les stratégies de placement des dotations attribuées aux CARPA par l'Etat présentent une grande hétérogénéité, ce qui obère les rendements financiers. De plus, le choix de produits financiers sophistiqués suppose une expertise qui n'est pas toujours à la portée des CARPA.
Concernant la chaîne de dépenses de l'AJ, la Cour des comptes met en lumière plusieurs lacunes du contrôle. Ainsi les rapports des commissaires aux comptes sont « extrêmement laconiques », et les certifications avec réserve sont « très rares », tandis que les observations des commissaires aux comptes « n'étaient manifestement pas toujours prises en considération par les CARPA concernées ».
s'est, également, alarmé que le contrôle externe réalisé par la Chancellerie soit tardif et peu efficace. Ainsi le bureau de l'AJ de la Chancellerie semble se consacrer essentiellement aux questions juridiques, et tenir les opérations de contrôle pour subsidiaires. Il a donc estimé que la question du regroupement des CARPA est centrale.
Il a souligné que les bénéfices attendus d'un regroupement paraissent évidents : cela permet de faire jouer des économies d'échelle dans le fonctionnement au quotidien des CARPA, et d'atteindre une masse financière critique, propice à une optimisation des produits financiers résultant des placements effectués par les CARPA.
Si une évolution vers d'autres fusions de CARPA apparaît souhaitable, elle ne doit, toutefois, pas remettre en cause le fonctionnement général d'un système qui donne globalement satisfaction.
a estimé que la profession d'avocat avait eu raison de jouer le jeu de la transparence dans le cadre de la présente enquête puisque les résultats sont probants. En dépit de certains dysfonctionnements devant pouvoir être surmontés, les pistes de réflexion sont riches et nombreuses.
Elles doivent donc être exploitées en tirant autant que possible bénéfice des nouvelles technologies au service de la justice, et en tenant compte, au plus près, des réorganisations liées à la réforme de la carte judiciaire.
M. Alain Pichon, président de la 4e chambre de la Cour des comptes, s'est félicité de la transparence dont avait fait preuve la profession d'avocat. Il a souligné le caractère original du système de l'AJ qui s'appuie sur des associations de droit privé (les CARPA) pour gérer des fonds publics.
Il a estimé que la crise des marchés financiers impose d'insister sur le critère de prudence et l'importance de la liquidité des fonds placés par les CARPA. Si le système existant donne effectivement satisfaction aux avocats, à la Chancellerie et aux justiciables, il convient de bien prendre la mesure du transfert de charges opéré au sein du système : le placement des fonds privés des CARPA couvre les charges induites par la gestion des fonds de l'AJ.
En matière de regroupement des CARPA, il a fait valoir le point de vue exprimé par le Premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin, dans sa lettre de transmission du rapport d'enquête à la commission, consistant à encourager la création d'un opérateur unique regroupant les 152 CARPA existantes.
Il a enfin déclaré qu'aucun grave dysfonctionnement n'a été décelé dans la gestion des crédits de l'AJ par les CARPA et que le système « fonctionnait bien ».