Intervention de Marcel-Pierre Cléach

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 29 mars 2011 : 1ère réunion
Répartition des contentieux et allègement des procédures juridictionnelles — Examen du rapport pour avis

Photo de Marcel-Pierre CléachMarcel-Pierre Cléach, rapporteur pour avis :

Enfin, le volume d'activité du Tribunal aux armées de Paris est faible : en moyenne, il reçoit 1 600 à 1 700 procédures et prononce entre 180 et 190 jugements par an. La formation spécialisée du TGI de Marseille traite davantage de dossiers relatifs à des militaires ! En outre, les infractions spécifiquement militaires, comme les désertions, ne représentent que 10 % du volume. Les affaires les plus graves, comme l'affaire Mahé ou l'embuscade d'Ouzbine, ne représentent que 2,5 % des affaires. La suppression de cette juridiction serait donc source de rationalisation.

Le ministère de la justice et les magistrats de la Cour d'appel et du TGI de Paris sont favorables à cette réforme. Ils font valoir que les affaires relatives aux militaires à l'étranger seraient traitées par des magistrats expérimentés, affectés au pôle spécialisé, qui traitent déjà d'affaires complexes et sensibles concernant des militaires.

Le ministère de la défense et l'état-major des armées y sont également très favorables. Les militaires tiennent avant tout à ce que la spécificité militaire soit prise en compte, ce qui suppose que l'on conserve des règles procédurales particulières : avis préalable du ministre de la défense avant l'engagement de poursuites, impossibilité pour la victime d'une infraction de faire citer directement un militaire devant une juridiction de jugement. En outre, le rattachement du Tribunal aux armées de Paris au ministère de la défense a paradoxalement entraîné des relations assez tendues avec les militaires : le tribunal aurait tendance à vouloir affirmer son indépendance, de manière parfois conflictuelle... Les rapports entre les militaires et les tribunaux de droit commun sont plus apaisés.

Enfin, cette réforme est également très bien accueillie par les avocats, les syndicats de magistrats et les représentants des associations de défense des droits de l'homme.

Je vous proposerai des amendements, notamment pour prévoir l'avis du ministre de la défense lorsqu'un militaire est susceptible d'être poursuivi à la suite d'une plainte contre X, d'une plainte avec constitution de partie civile ou à l'occasion d'un réquisitoire supplétif. Il faut également clarifier les règles de compétence concernant les infractions commises à bord des navires et des aéronefs militaires, et simplifier et harmoniser les dispositions du code de justice militaire relatives à la désertion.

Il serait utile que le ministère de la justice réfléchisse au regroupement des juridictions de droit commun spécialisées en deux ou trois pôles, ce qui renforcerait la centralisation des affaires militaires et la spécialisation des magistrats. En 2010, sur les 33 formations spécialisées, seules trois ont eu plus de cent affaires à traiter ; dix-sept ont traité moins de dix affaires. Compte tenu des inconvénients en termes de proximité du justiciable et de délais de jugement, un tel regroupement semble toutefois prématuré à ce stade.

Compte tenu de la professionnalisation des armées, mais aussi de la féminisation de la magistrature, il me paraît indispensable de renforcer la formation des magistrats aux questions militaires.

Il faudrait également se pencher sur l'avenir du corps des greffiers militaires, aujourd'hui en voie d'extinction. Souvent anciens militaires, ils apportent une expertise précieuse aux juges, notamment au sein des juridictions de droit commun spécialisées.

Enfin, la suppression du Tribunal aux armées de Paris et le transfert de ses attributions à la formation spécialisée du TGI de Paris devrait s'accompagner d'un transfert de personnels et de moyens de la part du ministère de la défense au ministère de la justice. Je n'ai pas encore eu la réponse du ministre de la défense sur ce point...

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