Ce texte repose sur le constat, grave et lucide, de la dégradation de nos comptes publics après 35 années de déficit. Si notre pays continuait sur son erre, la dette, qui représente actuellement 82,3% du PIB, pourrait atteindre 150% en 2050. Pas moins de 15% du budget de l'État sert à financer la charge de la dette ; autant d'argent public en moins pour les investissements et mesures d'intérêt général.
Pour surmonter notre incapacité à juguler l'emballement de la dette, faut-il chercher le secours du droit ? Cela semble d'autant plus nécessaire que notre pays vient de traverser une grave crise économique. Encore qu'il faille surtout encadrer le pouvoir budgétaire du Gouvernement, plutôt que celui du Parlement et des collectivités territoriales. De fait, sa responsabilité est à la mesure de l'étendue de ses prérogatives... (M. Bernard Frimat acquiesce.)
Inspiré du rapport Camdessus, ce texte, après son adoption par l'Assemblée nationale, instaure un cadre constitutionnel précis et contraignant en matière d'équilibre budgétaire. Il remplace, à l'article premier, les actuelles lois de programmation des finances publiques par les nouvelles lois-cadres d'équilibre des finances publiques.
Leur contenu et modalités d'application sont renvoyés à une loi organique. Néanmoins, le texte apporte des précisions afin de renforcer leur caractère impératif. Tout d'abord, leur durée minimale d'application est fixée à trois ans. Par parenthèse, cette durée est-elle « glissante » ? Tel est le voeu de la commission des finances, mais ce n'est pas l'interprétation du Gouvernement. Ensuite, ces nouvelles lois s'imposeront aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale et leur absence bloquera l'adoption de ces lois financières. Enfin, elles seront examinées selon la même procédure que ces dernières : priorité de dépôt à l'Assemblée nationale et discussion en séance sur le texte du Gouvernement ou voté par l'autre assemblée. Notons que les députés ont avancé le dépôt du projet de loi de finances au 15 septembre et celui du projet de loi de financement de la sécurité sociale au 1er octobre.
Ces lois-cadres -catégorie intermédiaire entre les lois ordinaires et les lois organiques-, sont soumises, par l'article 9, à un contrôle systématique du Conseil constitutionnel avant leur promulgation. L'Assemblée nationale a prévu un second contrôle portant sur la conformité des lois financières à la loi-cadre. Est-ce nécessaire ?
Deuxième question : quid de la règle du monopole des lois financières en matière de prélèvements obligatoires ? Posée à l'article premier, cette règle, défendue devant M. Camdessus par le président et le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, a pour but d'en finir avec la dispersion des sources d'initiative en matière de prélèvements obligatoires, qui « met à mal en permanence les articles d'équilibre initialement adoptés ». Concrètement, elle interdirait l'adoption, hors des lois financières, de toute disposition fiscale, qu'il s'agisse d'une augmentation de recettes, de niches fiscales ou d'exonérations sociales, quand bien même elles seraient dûment compensées !