J'aborde sans illusion ce texte - comme, semble-t-il, une grande partie de la majorité - même si je ne mets pas en doute pas le professionnalisme et la sincérité du ministre. L'Agriculture est d'ordinaire un ministère de crises, successives et ponctuelles, mais ce qui fait la gravité de la crise actuelle, c'est sa généralisation, cette fois-ci, à toutes les filières.
Le texte ne rappelle pas suffisamment le triple rôle de notre agriculture : économique, environnemental et social. Sur ces deux derniers rôles, le gouvernement français peut agir, mais les données économiques du secteur lui échappent largement et j'avoue ne pas avoir été rassuré par les propos du commissaire européen. Les responsables agricoles que j'ai reçus en Bourgogne ne trouvent pas dans ce texte les réponses qu'ils espéraient, notamment sur la volatilité des cours, qui leur interdisent toute visibilité.
Ce texte témoigne d'une sorte de schizophrénie du gouvernement qui, d'une part, impose des normes environnementales ultra-contraignantes, pour, d'autre part, regretter ensuite les distorsions de concurrence. J'avais déjà dénoncé ce travers lors des discussions sur le Grenelle. J'étais en Allemagne il y a quelques jours : les gens y étaient stupéfaits d'apprendre qu'ici on avait imposé des bandes enherbées au bord des rivières ! Nous multiplions les contraintes pour répondre à des urgences médiatiques. Les plates-formes pour traiter les appareils coûtent de 400 à 500 000 euros aux viticulteurs ...
Les céréaliers sont opposés au principe d'une assurance récolte obligatoire parce qu'ils n'en toucheront jamais l'indemnisation correspondante, car ils n'auront jamais 30% de perte des récoltes.
Et ce sont les contraintes imposées à la moutarde d'origine contrôlée qui ont contraint l'usine Amora de Dijon à fermer. Il faut en finir avec cette schizophrénie !
Je ne crois pas que les outils proposés répondent à la crise. Où est le filet de sécurité qu'attendent les agriculteurs ? On n'apporte de réponse ni à l'urgence sociale, ni à l'urgence environnementale. Le contrat territorial d'exploitation (CTE) que nous avions mis en place, répondait au rôle social et environnemental de l'agriculture. Vous l'avez supprimé en 2000 ! Et votre contrat d'agriculture durable (CAD), lui, n'a jamais vu le jour... Voilà pourtant qui redonnerait espoir à nos agriculteurs.