Intervention de Yves Détraigne

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 17 novembre 2010 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2011 — Audition de M. Michel Mercier garde des sceaux ministre de la justice et des libertés

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « justice et accès au droit » :

Je vous félicite pour votre nomination. C'est une chance que le ministère de la justice n'ait pas été passé à la toise... Les crédits de paiement des services judiciaires progressent de 4,3 %. Ce qui ne veut pas dire pour autant que tout va bien. Je m'interroge en particulier sur l'évolution des effectifs de la justice judiciaire. Notre commission des lois avait soulevé la question lors de la discussion du projet de loi organique relatif à la limite d'âge des magistrats. A la suite de la réforme des retraites, elle avait constaté que le nombre de départs risquait d'augmenter. Or, la pyramide des âges, tant pour les magistrats que pour les greffiers, fait déjà apparaître de nombreux départs à intervenir dans les prochaines années - 300 par an à partir de 2016-2017 - alors que les recrutements stagnent : le nombre de places mises aux trois concours de l'École nationale de la magistrature reste à 105 depuis trois ans. Même avec les voies parallèles, le compte n'y est pas. L'effet de ciseau qui menace risque de faire perdre le bénéfice des efforts menés ces dernières années, même si le ratio greffiers-magistrats s'améliore. Ne serait-il pas pertinent de développer une gestion prévisionnelle, sachant qu'il faut trois ans pour former un magistrat et deux pour former un greffier ?

Mon autre souci est lié au développement de l'outil informatique. La chancellerie nous dit depuis plusieurs années que celui-ci doit aider à rationaliser les effectifs, pour une économie de temps de travail estimée à 430 ETP. Mais au vu de ce que j'ai pu constater lors de mes déplacements dans les juridictions, en particulier de la surcharge de travail que suscite la mise en oeuvre d'applications informatiques, au premier rang desquels Cassiopée, ne serait-ce que les premiers mois, je doute un peu... Les personnels de greffe sont fortement mis à contribution. Je crains, à ce compte, que les recrutements n'aient l'effet que d'un feu de paille, et que l'on se retrouve gros Jean comme devant.

L'enveloppe de l'aide juridictionnelle, qui a baissé ces dernières années, est en progression sensible mais l'augmentation des crédits correspond pour l'essentiel au passage de la TVA de 5,5 % à 19,6 %, taux auquel seront assujettis les avocats à partir de cette année. Et la réforme de la garde à vue va accroître le nombre de vacations d'avocats. Que prévoyez-vous pour financer ces dépenses supplémentaires ?

La prise en charge par l'État du droit de plaidoirie dont tout justiciable doit s'acquitter n'est plus prise en charge par l'aide juridictionnelle, pour limiter les recours abusifs. Il est vrai que la somme est modeste : huit euros quatre-vingt quatre centimes. Mais outre que ces recours portent surtout sur le civil, je crains que cette disposition ne décourage en rien la chicane tandis qu'elle risque de poser problème au pénal, y compris pour les victimes. Ne serait-il pas plus pertinent de rendre obligatoire la consultation préalable d'un avocat ?

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