Lors d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de M. Christian Masset, directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats au ministère des affaires étrangères et européennes, sur le projet de loi de finances pour 2010 (programme « solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission Aide publique au développement et programme « rayonnement culturel et scientifique » de la mission Action extérieure de l'Etat).
Accueillant M. Christian Masset, M. Josselin de Rohan, président, a souhaité revenir sur la création de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, la réforme de l'action culturelle extérieure, qui fait l'objet du projet de loi relatif à l'action extérieure de l'Etat, avant d'évoquer les principales évolutions des crédits des deux programmes dont cette direction générale a la responsabilité.
a rappelé en préambule que la création de cette direction générale s'inscrivait dans le cadre de la réforme de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères et européennes, qui s'était traduite par la mise en place de trois directions générales : la direction générale des affaires politiques et de sécurité, la direction générale de l'administration et de la modernisation et la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, qui est chargée des enjeux globaux.
La mise en place de cette direction générale repose sur l'idée que l'action culturelle, comme la politique d'attractivité, les questions économiques ou de développement, font partie du coeur de métier des diplomates du MAEE.
Cette direction générale comporte quatre directions, la première chargée de l'économie globale et des stratégies du développement, la deuxième des biens publics mondiaux, la troisième de la politique culturelle et du français et la quatrième des politiques de mobilité et d'attractivité. Elle regroupe aussi un service transversal chargé des programmes et du réseau. Enfin, elle intègre également la délégation pour l'action extérieure des collectivités locales, la mission des relations avec la société civile et la mission de pilotage de l'aide publique au développement et de tutelle de l'Agence française de développement.
Conformément aux recommandations du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France et aux conclusions de la révision générale des politiques publiques, cette nouvelle direction générale est chargée de l'élaboration de la stratégie et du pilotage des opérateurs, ce qui traduit un changement d'approche par rapport à la situation précédente.
La deuxième étape de la réforme concerne les opérateurs. Elle doit se traduire par la création de deux nouvelles agences, l'une chargée de l'action culturelle extérieure, l'autre de la mobilité et de l'expertise internationale, comme le prévoit le projet de loi relatif à l'action extérieure de l'Etat.
a ensuite présenté les grandes lignes du projet de loi de finances pour 2010 concernant les deux programmes dont il a la charge.
Il a noté que les deux programmes 185 et 209 étaient articulés autour d'une logique géographique qui était en partie dépassée et qu'il serait souhaitable de revoir cette maquette budgétaire afin de gagner en lisibilité budgétaire. Il a indiqué que l'objectif à viser était la création de deux programmes distincts, l'un consacré à la diplomatie culturelle et d'influence, l'autre à l'aide publique au développement. Un accord en vue d'une modification de la maquette budgétaire en 2010 n'a pu être trouvé cette année, en raison de la loi de programmation triennale, mais il a estimé qu'une telle modification pourrait intervenir en 2011, concomitamment à l'adoption de la future loi de programmation.
Il a ensuite présenté les principales données budgétaires des deux programmes.
En ce qui concerne le programme « rayonnement culturel et scientifique », les crédits de fonctionnement et d'intervention, hors dépenses de personnels, augmentent de 0,7 % en 2010, pour s'établir à environ 508 millions d'euros.
Sur ce montant, 420 millions d'euros sont destinés à l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).
Ce programme compte 1 236 emplois, soit le même nombre qu'en 2009, même s'il faut tenir compte du passage de l'Arabie Saoudite du programme 209 au programme 185, qui entraîne le transfert de 13 postes.
S'agissant du programme « Solidarité à l'égard des pays en développement », la dotation pour 2010 est de 2,123 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 2,063 milliards d'euros en crédits de paiement, soit respectivement une augmentation de 13 et 11 % par rapport à 2009.
Cette évolution s'explique toutefois en partie par des modifications de périmètre, puisque, conformément à un amendement adopté par le Sénat, le projet de loi de finances pour 2010 intègre pour la première fois le dividende de l'agence française de développement (AFD) et que le ministère des affaires étrangères et européennes prend désormais en charge la rémunération de l'AFD sur les dons projets.
A périmètre constant, la dotation pour 2010 augmente néanmoins, principalement du fait de l'accroissement du multilatéral.
Le nombre d'emplois s'élève à 2 789, soit une diminution de 122 postes, qui porte principalement sur un transfert de personnels vers l'AFD.
En outre, là encore à la suite d'un amendement du Sénat, le projet de loi de finances pour 2010 intègre pour la première fois un plafond d'emplois pour les établissements culturels à l'étranger, qui est fixé à 1 044 pour le programme 185 et à 2 356 pour le programme 209, qui ne concerne que les recrutés locaux ayant conclu un contrat de travail à durée indéterminée.
Par ailleurs, M. Christian Masset a présenté ses priorités concernant la diplomatie d'influence, la réforme de l'action culturelle et l'aide publique au développement.
En ce qui concerne la diplomatie d'influence et l'action culturelle, il a fait référence à plusieurs projets.
Il s'est félicité tout d'abord de la « rallonge budgétaire » de 40 millions d'euros, obtenue par le ministre des affaires étrangères et européennes, M. Bernard Kouchner, pour l'action culturelle, qui marquait une inversion de tendance et mettait un terme à la forte diminution des crédits de coopération culturelle observée ces dernières années.
Il a indiqué que cette enveloppe de 40 millions d'euros serait répartie pour moitié sur l'exercice 2009 et pour l'autre moitié sur 2010, et qu'elle serait consacrée principalement à la mise en place de la nouvelle agence chargée de la coopération culturelle, à la modernisation du réseau, notamment en matière numérique (avec la dotation d'équipement par exemple), au soutien aux industries culturelles, ainsi qu'à la formation des personnels, qui constitue un élément central, comme l'a souligné le rapport d'information conjoint de la commission des affaires culturelles et des affaires étrangères du Sénat.
La création de la nouvelle agence chargée de la coopération culturelle constitue un chantier majeur auquel le ministre attache la plus grande importance.
L'objectif visé est de mettre en place un dispositif lisible, cohérent et efficace, permettant de donner un nouvel élan à la diplomatie culturelle.
La réforme se traduira par l'institution d'un label unique afin de renforcer la visibilité de l'action culturelle, tant en France, qu'à l'étranger.
Il sera créé à partir de CulturesFrance qui a actuellement un statut d'association, un établissement public à caractère industriel et commercial disposant de moyens renforcés et d'un périmètre élargi couvrant les idées, la culture, la langue et les savoirs. S'agissant du réseau à l'étranger, la réforme se traduira par la poursuite de la fusion des services d'action culturelle et de coopération des ambassades avec les centres et instituts culturels, établissements à autonomie financière, afin de développer les synergies, de mutualiser les moyens et de favoriser l'autofinancement et l'effet de levier des crédits d'intervention.
Le 27 octobre 2009, le ministre a adressé aux agents du ministère des affaires étrangères et européennes une lettre décrivant le projet de réforme de l'action culturelle extérieure.
S'agissant des liens entre l'agence et le réseau, le ministre propose qu'un rendez-vous soit pris dans un délai de trois ans, pour évaluer le fonctionnement du nouveau dispositif et envisager le rattachement administratif du réseau à l'agence.
La priorité maintenant est de réussir la mise en place de l'agence, d'en assurer le meilleur fonctionnement et de donner un nouvel élan au réseau. Dans le même temps, le MAEE mettra tout en oeuvre pour que le lien entre l'agence et le réseau soit très fort. La formation des personnels constituera à cet égard un aspect majeur.
a indiqué qu'il attachait une grande importance à la réussite de la réforme de l'action culturelle extérieure, priorité de la nouvelle direction générale de la mondialisation.
Il a également souligné les bonnes relations avec le ministère de la culture et de la communication à ce sujet. Celui-ci serait notamment associé à la formation des personnels.
a également présenté le projet de création d'un second opérateur, l'agence chargée de l'expertise et de la mobilité internationales, qui représente également un enjeu essentiel.
Cette agence, issue de la fusion entre CampusFrance, Egide et le GIP France coopération internationale, serait aussi créée sous la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial.
Face à un marché international de l'expertise très concurrentiel, où des opérateurs étrangers viennent puiser dans le « vivier » des experts français et remportent de très nombreux appels d'offres internationaux, il était impératif de veiller à ce que ces experts français puissent travailler au service d'opérateurs nationaux.
De la même manière, il existe un véritable marché de l'enseignement supérieur au niveau international, illustré par le classement des universités réalisé par l'Université de Fudan à Shanghai et il convient de renforcer l'attractivité de nos établissements d'enseignement supérieur français vis-à-vis des étudiants étrangers.
La formation des élites étrangères représente, en effet, un élément important de la diplomatie d'influence.
A propos de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger, M. Christian Masset a souligné que le réseau des établissements d'enseignement français à l'étranger constituait le fleuron de notre politique d'attractivité.
Ce réseau, chargé d'offrir à la fois un service public d'enseignement de qualité à nos compatriotes établis à l'étranger et un lieu d'échanges et de coopération avec le pays d'accueil, suppose un équilibre entre élèves français et élèves étrangers.
Ce réseau se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins, compte tenu de l'évolution des attentes des familles et face au développement d'écoles concurrentes, notamment anglo-américaines, dans un contexte budgétaire marqué par la prise en charge des frais de scolarité des élèves français et le financement de la part des cotisations patronales des pensions civiles des personnels détachés par l'agence.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger verra sa dotation s'établir à 420 millions d'euros au titre du programme 185, soit une augmentation de 10 millions d'euros par rapport à ce que prévoyait la loi de programmation triennale.
Le ministère des affaires étrangères et européennes travaille actuellement à l'élaboration du Plan d'orientation stratégique du futur contrat d'objectifs et de moyens avec l'AEFE.
Sur l'aide publique au développement, M. Christian Masset a rappelé le contexte de la crise économique et financière, qui affecte directement les économies des pays en voie de développement, et pouvait faire craindre une augmentation de la pauvreté et un creusement des inégalités. Il a également rappelé que l'année 2010 serait marquée par un Sommet sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), cinq ans avant la clause de rendez-vous de 2015.
La France n'a pas à rougir des efforts qu'elle fournit dans ce domaine.
Avec 0,44 % du revenu national brut (RNB) consacré à l'aide publique au développement en 2009, contre 0,39 % en 2008, la France se situe au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE, qui s'établit à 0,3 % et à la quatrième place au niveau mondial.
Pour 2010, ce pourcentage pourrait se situer entre 0,44 et 0,48 % du RNB, et le Président de la République a confirmé la volonté de la France d'atteindre 0,7 % en 2015.
Le conseil interministériel de coopération internationale et du développement réuni en juin 2009 s'est traduit par des décisions structurantes, telles que la décision d'élaborer un document cadre sur la stratégie nationale d'aide au développement, un document de stratégie concernant la politique européenne de développement, ainsi que la définition de priorités géographiques et sectorielles.
63 % du programme 2009 sont constitués par les contributions multilatérales, notamment le Fonds européen de développement, à hauteur de 872 millions d'euros, et le Fonds Mondial de lutte contre le SIDA, à hauteur de 300 millions d'euros.
Cette évolution soulève des interrogations sur le bon équilibre entre l'action multilatérale et l'intervention bilatérale. Dans des secteurs tels que la lutte contre le SIDA, l'aide multilatérale permet d'atteindre des objectifs plus efficacement que l'aide bilatérale, laquelle est garante de plus de visibilité, notamment vis-à-vis de l'opinion publique. Il convient surtout de trouver une bonne articulation entre les deux.
A cet égard, la modification de la clé de répartition de la contribution française à compter du Xe Fonds européen de développement, qui passera à 19 % et qui s'appliquera aux crédits de paiement à partir de 2011, devrait permettre alors de dégager certaines marges de manoeuvre sur le plan budgétaire.
En conclusion, M. Christian Masset a rappelé que la crise constituait un accélérateur : le jeu s'ouvrait, le monde devenait plus multipolaire et les équilibres anciens étaient bouleversés. Cette situation présentait des risques mais aussi des opportunités pour l'influence de la France, de sa culture et de sa langue, dans le monde et, dans ce contexte, que notre pays avait d'importants atouts à faire valoir.