Intervention de Patricia Schillinger

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 18 janvier 2011 : 1ère réunion
Prospective du pacte social dans l'entreprise — Examen en délégation

Photo de Patricia SchillingerPatricia Schillinger, rapporteure :

Les voies d'une orientation plus sociale et humaine du management et de l'organisation du travail sont a priori plus ouvertes. Il s'agirait d'éviter que ne s'approfondisse une certaine forme de mal-être au travail avec ses effets finalement contreproductifs.

Plusieurs voies concomitantes se présentent. D'abord, une implication systématique des salariés et non un simulacre de consultation - dans toute « conduite du changement ». Ensuite, des formations au management insistant sur la considération, le respect et le soutien des collaborateurs. Enfin, un intéressement du « top management » à la « performance sociale » et non plus seulement financière.

Cette dernière démarche serait cohérente avec une responsabilisation financière des entreprises pour leurs externalités sociales négatives, notamment pour le chômage ou la maladie. Un procédé de labellisation pourrait alors informer les clients de la conformité des conditions de production à certains standards sociaux, par exemple dans le cadre de la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE).

Ces évolutions marqueraient un reflux de la « tyrannie » plus ou moins consciente des clients sur l'organisation du travail, ces derniers pondérant le rapport qualité-prix des biens et services par la réputation sociale y compris locale des entreprises. L'émergence de labels de type « Max Havelaar » ou signalant la proscription du travail des enfants constituent ici les « signaux faibles » d'une sensibilité émergente.

La sécurisation des salariés constitue l'autre volet d'une restauration de la qualité de l'emploi et du travail. Dans un scénario volontariste, les salariés seraient placés en situation d'assumer financièrement et professionnellement les mobilités requises dans une économie ouverte, adaptable et compétitive.

A coté de l'assurance chômage et d'un accès au logement facilité, l'employabilité des personnes deviendrait l'axe majeur d'une « flexisécurité » de pointe, d'ores et déjà qualifiée, au Danemark, de « mobication », soit un condensé de mobilité et d'éducation.

Dans ce cadre, les pouvoirs publics parviendraient à rendre « pilotable » le système de formation français, en vue d'optimiser continuellement l'employabilité présente et à venir des salariés, des étudiants et des chômeurs.

Le système donnerait alors toute sa mesure pour les personnes à faible « capital humain » (sur le marché du travail !), réduisant les mobilités subies par des « outsiders » à l'employabilité souvent déclinante.

En synergie, les entreprises seraient conduites à une gestion plus responsable des emplois et des formations de leurs salariés en pratiquant une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. La consécration d'une obligation juridique de préserver l'employabilité des salariés pourrait contribuer à ce mouvement.

A noter que dans ce scénario de l' « employabilité », le volontarisme politique devrait s'étendre à l'Europe car seule une politique de croissance coordonnée, basée sur la consommation et l'investissement, parviendrait à résorber un fort chômage « keynésien ». Sans quoi certains seront toujours moins « employables » que d'autres...

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