Je vais revenir sur votre effet d’annonce d’il y a deux ou trois jours concernant la dotation en capital.
Lors de la réunion de la commission spéciale du jeudi 25 mars, M. le rapporteur avait souhaité, par un amendement rédactionnel sur l’article 9, souligner la prééminence initiale des dotations en capital apportées par l’État dans le financement de la Société du Grand Paris.
Quelques jours plus tard, nous avons été déçus lorsque le secrétaire d’État a annoncé qu’une partie de l’investissement serait financée par la cession par l’État des créances qu’il détient sur les constructeurs automobiles.
Cette cession, à hauteur de 4 milliards d’euros, n’est pas un engagement crédible de l’État pour le financement de la SGP. C’est encore une promesse !
Avec ce montage financier, monsieur le secrétaire d’État, vous tentez de revenir par la fenêtre alors que la porte du grand emprunt vous a été claquée au nez définitivement à la suite de l’adoption de la loi de finances rectificative pour 2010, dans laquelle le Gouvernement a refusé d’inscrire des dépenses d’infrastructures de transports au titre des dépenses d’avenir.
Ce ne sera pas la dette du grand emprunt qui financera la Société du Grand Paris mais celle issue de l’emprunt fait par l’État pour accorder des prêts aux constructeurs automobiles, comme prévu dans le pacte automobile annoncé par le Président de la République le 9 février 2009.
Afin d’atténuer la gravité de la dérive des comptes publics, le ministre du budget d’alors parlait d’un « déficit de crise » par opposition au « déficit structurel », ce que la Cour des comptes avait évidemment dénoncé.
Le remboursement des prêts accordés aux constructeurs automobiles devait être destiné à la résorption du déficit de crise et au désendettement de l’État. Vous renoncez ainsi à l’objectif visé par le Premier ministre, qui annonçait, hier encore, lors de la séance des questions d’actualité, en s’attaquant aux niches fiscales, vouloir revenir en 2013 à l’équilibre de nos comptes publics.
En outre – et tout le monde doit en être informé – il règne une opacité totale sur l’octroi de ces prêts à la filière de l’automobile. On ne connaît ni les destinataires, ni le montant alloué à chacun, ni le montant ou le rythme des remboursements, ni, enfin, leur capacité de remboursement. On sait seulement que la crise de l’automobile n’est pas conjoncturelle mais structurelle. Le Comité des constructeurs français d’automobiles, le CCFA, ignore lui-même les conditions de prêt et de remboursement.
C’est d’ailleurs en partie pour faire la lumière sur la mise en œuvre de ces prêts que le Sénat, sur l’initiative du groupe socialiste et de notre collègue Martial Bourquin, a demandé la création d’une commission d’enquête sur les aides et les prêts publics destinés à la filière automobile. Cette question sera traitée dans le cadre de la mission d’information dont notre groupe a obtenu la création.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, vous m’avez adressé, dans votre réponse aux interventions lors de la discussion générale, des propos peu aimables parce que j’avais émis des doutes sur le remboursement des créances par les entreprises concernées.
Je le répète, il s’agit d’une crise structurelle et vous connaissez, comme moi, les pertes importantes annoncées par Renault pour l’année 2009. Par ailleurs, ce groupe a échangé une participation avec Daimler. Or, tout échange de participation suppose une allocation d’actifs, qui, même minimale, pèse sur les comptes.
Je ne mets pas en doute la capacité de nos constructeurs de s’en sortir, au contraire, et personne n’y a intérêt – nous savons tous la place que prend l’automobile dans l’industrie française – mais je ne puis que réaffirmer, comme nous l’avons fait au début de ce débat, que le financement de la dotation en capital de la Société du Grand Paris par la cession des créances de l’État sur les constructeurs automobiles n’est pas crédible. Ce montage financier est à l’image de votre projet pour la région d’Île-de-France !