Intervention de Esther Benbassa

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 29 novembre 2011 : 1ère réunion
Droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales des étrangers résidant en france — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa, rapporteure :

Le présent texte, adopté par les députés en mai 2000, s'inscrit dans la continuité du droit de vote des étrangers communautaires.

Selon une étude de législation comparée menée par les services du Sénat, et qui sera annexée à mon rapport, sur douze pays de l'Union européenne et la Suisse, trois seulement dénient tout droit de vote aux élections locales aux résidents étrangers.

Une convention du Conseil de l'Europe de 1992 invite les États membres à « accorder le droit de vote et d'éligibilité aux élections locales à tout résident étranger, pourvu que celui-ci remplisse les mêmes conditions que celles qui s'appliquent aux citoyens et, en outre, ait résidé légalement et habituellement dans l'État en question pendant les cinq ans précédant les élections ». Nous ne pouvons que regretter que la France n'ait ni signé ni ratifié cette convention.

Le présent texte ne modifie pas l'article 3 de la Constitution, mais crée un nouvel article dans le titre XII, consacré aux collectivités territoriales. Il s'agit de montrer que les droits conférés aux étrangers ne mettent pas en cause la souveraineté nationale. L'article 2 de la proposition de loi supprime en outre le terme « seuls » à l'article 88-3 de la Constitution, terme qui exclut de facto les citoyens d'un État non membre de l'Union.

Les arguments en faveur du droit de vote et d'éligibilité des étrangers s'articulent autour de quatre thématiques. Tout d'abord, la reconnaissance d'une citoyenneté plurielle : l'établissement pérenne de certains étrangers sur le sol français se traduit par leur implication dans la vie collective locale. Parallèlement à la nationalité existent des citoyennetés multiples, multiples comme le sont nos identités. La citoyenneté de résidence devrait s'accompagner d'une citoyenneté civique, parallèlement à la nationalité des natifs ou des naturalisés. Ensuite, l'équité, qui impose de ne pas traiter différemment deux catégories d'étrangers ressortissants de l'Union européenne et ressortissants des pays tiers. Troisièmement, la volonté de renforcer la portée de la démocratie. Enfin, la garantie de la dignité des personnes concernées.

Ce droit, qui répond aux aspirations profondes des étrangers, est approuvé par nombre d'élus locaux, qui ont organisé des votations citoyennes -75 en 2011, selon le MRAP- et souscrit à l'appel de Strasbourg en faveur du vote des étrangers aux élections municipales. La proposition de loi recueille également le soutien de l'opinion. Selon un récent sondage Harris Interactive, 59 % des Français seraient favorables à la participation des étrangers non-Européens aux élections locales, contre un tiers seulement en 1994. Selon un sondage BVA-Le Parisien, ils seraient 61 %...

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