En fait, je crois que le Premier ministre n'aime pas le Parlement. Depuis sa nomination, il a multiplié les occasions de le museler : recours aux ordonnances, introduction régulière de cavaliers législatifs, procédure d'urgence, etc.
Si la lettre de la Constitution est globalement respectée, son esprit, le parlementarisme rationalisé, est bafoué. Le Parlement est uniquement considéré comme chambre d'enregistrement de la volonté gouvernementale. Or ce n'est pas avec sa mise sous tutelle, surtout lorsque l'on a la majorité absolue dans les deux chambres, que le Parlement retrouvera tout son rôle !
Je ne doute pas que le Conseil constitutionnel saura être attentif à l'énumération des mauvais procédés, au vu notamment de sa jurisprudence régulière et répétée quant à la procédure d'élaboration et d'adoption de la loi, qu'il s'agisse des règles régissant l'exercice du droit d'amendement ou encore, entre autres, de la consultation du Conseil d'État. Nous pouvons d'ailleurs noter que le Gouvernement a initialement assimilé le contrat première embauche, le CPE, au contrat nouvelles embauches, le CNE, afin de ne pas consulter le Conseil d'État, précipitation oblige, puis, face à l'opinion, qu'il a affirmé que le CPE et le CNE étaient totalement différents ; je pense que le Conseil constitutionnel appréciera...
Nous considérons également que ce texte est inacceptable sur le plan politique.
La politique économique et sociale menée depuis 2002 est l'inverse d'une politique juste et équitable. Elle est dogmatique et terriblement destructrice du lien de solidarité qui doit exister entre les citoyens d'une même nation.
Il s'agit d'abord d'une politique de ségrégation sociale. En effet, depuis 2002, les gouvernements auxquels vous appartenez, monsieur le ministre, n'ont eu de cesse de creuser le fossé des inégalités.
À ce jeu pervers, la politique fiscale est une arme redoutable : les réductions d'impôt ne continuent de bénéficier qu'aux plus aisés de nos concitoyens ; les plus fragiles, eux, subissent l'accroissement de la fiscalité locale due aux transferts de charges et aux désengagements massifs de l'État.
La politique de la ville a été sacrifiée, ses crédits ont été drastiquement rognés. On peut parler de dogmatisme quand vous remettez en cause le soutien social et éducatif de l'État, quand vous démantelez les crédits attribués aux associations, notamment à celles qui oeuvrent en faveur des adolescents en difficulté sociale.