Intervention de Odette Terrade

Commission des affaires économiques — Réunion du 26 novembre 2008 : 1ère réunion
Pjlf pour 2009 — Mission economie - examen du rapport pour avis

Photo de Odette TerradeOdette Terrade, rapporteur pour avis :

a ensuite présenté un programme spécifique de la mission Economie, le 223 consacré au tourisme. Elle a indiqué avoir souhaité aborder cette année l'actualité du tourisme pour quatre raisons : d'abord, parce qu'il s'agit d'un secteur majeur de l'économie française ; ensuite, parce que la mise en oeuvre de la RGPP modifie cette année l'organisation de l'administration du tourisme et, partant, de la maquette budgétaire ; en outre, parce qu'un projet de loi va prochainement être examiné par le Conseil des ministres pour réformer plusieurs pans importants du secteur ; enfin, en raison de la crise économique et financière, dont on peut craindre qu'elle affecte rapidement et profondément le secteur touristique, en particulier les professionnels du voyage, auxquels un développement particulier est consacré dans le rapport écrit.

Présentant les chiffres-clef du tourisme, elle a indiqué que ce secteur représentait 6,2 % du PIB, dont 2,1 % grâce aux visiteurs étrangers. En 2007, il concernait 230 000 entreprises et 840 000 salariés, pour un chiffre d'affaires de quelque 118 milliards d'euros, en progression de 4,2 %. Avec 82 millions de visiteurs étrangers, la France demeure la première destination touristique du monde, même si sa part relative diminue tendanciellement en raison de l'arrivée à maturité de destinations exotiques, notamment asiatiques. Les recettes du tourisme international ont augmenté de 7,2 % en 2007, à environ 40 milliards d'euros, et le poste « Voyages » est donc demeuré le premier poste excédentaire de la balance des paiements, avec près de 13 milliards d'euros, devant l'agroalimentaire et l'automobile.

a jugé que ces résultats, très satisfaisants pour 2007, qui devraient cependant être moins bons en 2008 du fait d'un quatrième trimestre très inquiétant, ne devaient cependant pas cacher le « talon d'Achille » de ce secteur : un ratio de dépenses individuelles trop faible, notamment pour les visiteurs étrangers. Si la France est en effet la première destination, elle ne se classe qu'au troisième rang mondial en termes de recettes, loin derrière les Etats-Unis et derrière l'Espagne. Si le ratio français était identique au ratio espagnol ou italien, les recettes du tourisme international seraient supérieures de 50 % et avoisineraient les 60 milliards d'euros. Ceci s'explique certes par le positionnement géographique de la France : en raison de sa situation centrale, notre pays est un point d'entrée en Europe pour les touristes non européens, dont beaucoup n'y séjournent donc que deux ou trois jours avant de rejoindre leur destination de villégiature. Quant aux touristes des pays européens voisins, qui sont les principaux clients du tourisme français, les Anglais, les Allemands, les ressortissants du Benelux, ils peuvent choisir des séjours courts, par exemple en fin de semaine.

Pour autant, au-delà de cette raison, elle a estimé possible de renforcer le contenu en valeur des prestations proposées aux touristes. Tel est l'enjeu principal que doivent affronter les professionnels, et qui fonde du reste une partie importante du soutien public au secteur, au travers notamment du budget. Ceci est d'autant plus crucial qu'à court terme, la crise économique va nécessairement affaiblir les flux touristiques pour quelques mois, voire quelques années, et qu'à long terme, l'évolution du tourisme mondial va structurellement bouleverser les hiérarchies traditionnelles au bénéfice des pays orientaux, la Chine en particulier.

Abordant ensuite l'aspect budgétaire, Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis, a relevé que les crédits visant à financer les trois axes principaux de la politique du tourisme étaient globalement reconduits. Il s'agit d'abord d'assurer la promotion à l'étranger de l'image touristique de la France et de ses savoir-faire : à cet égard, une dotation de 7 millions d'euros servira à préparer la participation de la France à l'Exposition universelle de Shanghai, en 2010. Ensuite, une action vise à renforcer l'offre touristique en soutenant l'économie du tourisme et le développement de l'activité touristique, au travers notamment du Plan Qualité Tourisme engagé l'an dernier. Enfin, une dernière action concerne l'accès aux vacances du plus grand nombre, en particulier les publics fragiles. Dans ce domaine, les besoins sont immenses et ils augmentent à mesure que s'aggrave la crise, notamment s'agissant des jeunes, lesquels sont encore trop nombreux, environ 40 %, à ne pas bénéficier de vacances. Dès lors, elle a jugé que ces crédits de soutien devraient être davantage augmentés qu'ils ne le sont dans ce budget.

Mais, a-t-elle fait observer, la caractéristique essentielle du programme « Tourisme » pour 2009 résulte de la mise en oeuvre de la RGPP, qui conduit à réformer, conformément aux explications précédemment données par son collègue Gérard Cornu, les structures administratives ministérielles et concerne tant, au niveau central, la direction du tourisme, qu'au niveau territorial, les directions régionales du tourisme (DRT). En conséquence, le programme 223 a été amputé de ses crédits de personnel, soit plus de 22 millions d'euros, et d'un certain nombre de frais de fonctionnement, de location immobilière et de communication, à hauteur de 6 millions, qui relèvent désormais d'autres programmes de la mission « Economie » et de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables ». De plus, l'action 4 du programme, encore dotée d'un million d'euros l'an prochain pour financer le fonctionnement des DRT, sera vraisemblablement supprimée à compter de 2010.

Par ailleurs, cette réorganisation relevant de la RGPP devrait se poursuivre. En effet, le GIE Maison de la France et le GIP ODIT-France pourraient fusionner au sein d'une Agence de développement touristique de la France, comme devrait le proposer le projet de loi en faveur du tourisme qui sera soumis au conseil des ministres d'ici à la fin de l'année. Ce texte devrait également réformer la taxe de séjour, le statut des voitures de grande remise, la diffusion des chèques vacances dans les entreprises de moins de cinquante salariés, le classement des établissements hôteliers et, enfin, le régime de licence des agents de voyage, afin en particulier de le mettre en conformité avec la directive « Services ».

Enfin, Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis, s'est attachée à analyser la situation des agences de voyage. Ce secteur est en effet confronté, depuis le début de ce siècle, à deux changements structurels majeurs : du côté de la demande, la modification du comportement des consommateurs et, s'agissant de l'offre, le développement du commerce en ligne, le e-commerce. Ce double mouvement contraint les agents de voyage à adapter leur modèle économique, mais la crise qui s'approfondit les inquiète et leurs représentants souhaitent un soutien des pouvoirs publics pour aider à sauvegarder l'activité du secteur.

La demande touristique connaît quatre transformations majeures :

- les touristes réduisent la durée de leurs séjours tout en multipliant ceux-ci, ce qui pénalise les destinations de long-courrier ;

- ils attendent plus souvent le dernier moment pour réserver un séjour ;

- ils ont tendance à privilégier les « vols secs » sur les voyages à forfait ;

- enfin, s'agissant de ce type de prestation, ils préfèrent les activités très personnalisées aux produits standardisés.

Le caractère tardif des réservations comme la préférence pour les « vols secs » posent un grave problème aux voyagistes en ce qu'elle réduit leur trésorerie : cette trésorerie, en effet, est essentiellement constituée des acomptes des clients. Or, elle sert à financer les divers types de garanties que les professionnels sont obligés de mobiliser auprès tant des banques que des transporteurs aériens et de la SNCF. S'ils ne peuvent honorer ces garanties, alors les agréments professionnels qui leur sont accordés sont retirés et ils sont dès lors conduits au dépôt de bilan.

La seconde transformation concerne l'offre : l'an dernier, internet est devenu le premier mode d'achat des voyages en France, avec, dans l'ordre, l'achat de billets de train, la billetterie aérienne et la réservation de séjours ou d'hébergements. Ainsi, la première agence de voyages en ligne et le premier site marchand du e-tourisme est celui de la SNCF. Cette évolution soumet les agences traditionnelles à une forte pression concurrentielle qui les contraint à s'adapter, le cas échéant en nouant des partenariats avec les prestataires en ligne pour élargir la gamme de l'offre.

Il reste que ce double mouvement de la demande et de l'offre s'est traduit ces deux dernières années par d'importantes concentrations capitalistiques qui témoignent des tensions sur ce secteur. Or, ces tensions vont augmenter si la crise économique s'aggrave et, surtout, se poursuit dans la durée. Car si l'activité des trois premiers trimestres de l'année a été stable, la situation des voyagistes s'est brutalement dégradée depuis la rentrée : les réservations de tourisme ont enregistré une baisse de 30 % et la billetterie d'affaires s'est elle-même rétractée de 10 %. Les perspectives pour Noël sont inquiétantes et les anticipations pour l'année 2009 délicates : en effet, en période de crise économique, ce sont les dépenses de confort et de loisir qui sont prioritairement réduites, comme l'atteste l'exemple du secteur de la restauration.

Or, bien des agences de voyages n'ont guère de marges de manoeuvre pour passer le cap d'une situation délicate et pourraient faire faillite si elles perdaient leurs agréments aériens et ferroviaires. C'est pourquoi Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis, a déclaré soutenir la demande des représentants professionnels d'obtenir une aide des pouvoirs publics par l'intermédiaire d'OSEO. Si la crise perdure, sans doute faudra-t-il aussi envisager un plan de soutien plus large, à l'instar - bien que dans des proportions considérablement moindres en termes de masse - de celui en faveur de l'agriculture adopté le 12 novembre dernier par le Gouvernement.

Pour conclure, elle n'a pas proposé, contrairement à ses deux collègues, d'adopter les crédits de la mission « Economie ».

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