En préambule, M. Pierre André, rapporteur pour avis, a indiqué que la politique de la ville, qui revêt une importance capitale pour les habitants des quartiers en difficulté, ferait l'objet, en 2009, de nombreuses réformes ou de nouvelles mesures avec la réforme envisagée de la dotation de solidarité urbaine (DSU), la modification programmée des zones franches urbaines (ZFU), ou encore les mesures liées au plan « Espoir-banlieues » qui traduisent les engagements du Président de la République en faveur de ces quartiers. L'examen des crédits de la mission pour 2009 offre l'occasion d'analyser l'efficacité de cette politique et la pertinence des nouveaux dispositifs proposés par le Gouvernement.
Pour 2009, une nouvelle architecture de la mission est proposée avec la création d'un programme unique intitulé « Politique de la ville », issu de la fusion des anciens programmes 147 « Equité sociale et territoriale et soutien » et 202 « Rénovation urbaine ». Ce changement correspond à la mise en oeuvre d'une des préconisations du conseil de modernisation des politiques publiques réuni le 12 décembre 2007.
Conformément à ces préconisations, la mission et le périmètre de la délégation interministérielle à la ville (DIV) ont été réformés pour que celle-ci se recentre sur ses fonctions de secrétariat du comité interministériel des villes. Le rôle de l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) en tant qu'opérateur de la politique des quartiers défavorisés est donc réaffirmé, M. Pierre André soulignant qu'il s'agissait d'ailleurs d'une des recommandations qu'il avait formulées l'année dernière.
En 2009, l'ACSé exercera donc l'essentiel des missions assurées par la DIV laissant toutefois à un nouvel opérateur, l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrants (ANAEM), le soin de remplir ses missions en matière d'accueil des primo-arrivants, en particulier l'apprentissage de la langue.
Se félicitant de la volonté du Gouvernement d'améliorer la gouvernance de la politique de la ville, M. Pierre André a toutefois relevé que la création envisagée des délégués du préfet dans les quartiers ne répondait pas aux difficultés de gouvernance constatées au niveau local. Il a préconisé, pour sa part, un renforcement du rôle des préfets et des sous-préfets en matière de politique de la ville et de mise en place de partenariats avec les maires.
S'agissant ensuite de la rénovation urbaine, le programme national de rénovation urbaine (PNRU) prévoit la rénovation complète du cadre de vie des zones urbaines sensibles (ZUS) et des quartiers ayant des caractéristiques sociales et économiques équivalentes, et à partir de 2009 l'agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) participera au programme national de rénovation des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). Toutefois, le rapporteur pour avis a fait part de son inquiétude s'agissant du financement de cette agence. Si l'Etat lui verse une subvention de fonctionnement de 5 millions d'euros en 2009, l'essentiel des moyens de paiement de l'ANRU proviendra désormais d'un prélèvement sur les ressources de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), gérées paritairement par les instances du 1 % Logement.
Au moment où les élus locaux et les citoyens des quartiers fondent de grands espoirs en matière de rénovation urbaine, cette réforme peut être interprétée comme un signe de désengagement de l'Etat. Il a insisté sur la nécessité pour celui-ci d'apporter une réponse claire aux porteurs de projets envers lesquels l'agence s'est engagée, car il est certain qu'à moyen terme les besoins de financement de l'ANRU vont croître et que celle-ci risque de ne plus pouvoir honorer ses engagements à partir de 2012, selon les projections établies par l'agence.
S'agissant du développement social et économique des quartiers, il a indiqué qu'une mobilisation massive des politiques de droit commun avait été annoncée par le Gouvernement réuni en comité interministériel des villes le 20 juin dernier. Le document de politique transversale permet de constater l'ampleur des moyens mobilisés par l'ensemble des ministères, de l'ordre de 4,3 milliards d'euros en 2009.
Les moyens spécifiques de la politique de la ville doivent servir de levier à la mobilisation des crédits de droit commun et près de 200 millions d'euros seront consacrés au financement des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS). Ce dispositif pluriannuel est indispensable car il constitue un instrument efficace de partenariat entre l'Etat, la ville et les associations. Les CUCS permettent ainsi d'assurer une parfaite adéquation entre les projets financés et les besoins spécifiques des habitants des quartiers et il est essentiel qu'ils soient reconduits et pérennisés.
L'évaluation de la première génération de CUCS sera lancée en 2009 et devra servir de base à la négociation des CUCS couvrant la période 2010-2013. A cet égard, le rapporteur pour avis a indiqué qu'il veillerait à ce que la réorientation envisagée par le Gouvernement ne se traduise pas par l'envoi de signaux contraires à l'esprit qui a présidé leur création.
Puis M. Pierre André a fait valoir qu'une dotation de 22 millions d'euros doit permettre de rendre opérationnelles les mesures décidées dans le cadre du plan « Espoir-banlieues», les engagements du Président de la République faisant ainsi l'objet d'une traduction budgétaire et comptable, même s'il faut regretter la modicité des financements prévus eu égard à l'ampleur des besoins. Dans le cadre de ce plan, des mesures expérimentales sont préparées dans le domaine de la réussite éducative, de la gestion urbaine de proximité ou de la qualité du service dans les transports en commun, et une attention particulière a été réservée au volet « éducation et égalité des chances » de ce plan, à travers différents dispositifs comme les internats d'excellence, les écoles de la deuxième chance ou encore l'accompagnement dans les classes préparatoires aux grandes écoles.
La mise en oeuvre de ces mesures doit s'inscrire dans le prolongement des dispositifs existants, en complémentarité avec les stratégies locales en cours afin d'éviter toute incohérence sur le terrain.
A cet égard, l'ACSé doit être en mesure de jouer pleinement son rôle de premier opérateur de la politique de la ville, les 433 millions d'euros qui lui sont alloués dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009 étant ainsi dédiés, principalement, à des actions territorialisées inscrites dans les CUCS. Celles-ci revêtent un caractère fondamental pour de nombreuses associations et s'inscrivent dans des domaines très variés : éducation et accès aux savoirs de base, santé et accès aux soins, culture et promotion de la diversité, lien social, citoyenneté et participation à la vie publique, prévention des discriminations et accès aux droits, prévention de la délinquance juvénile ou encore gestion urbaine de proximité. La rationalisation de la gestion des crédits de la politique de la ville passe donc par un renforcement du rôle de cette agence.
S'agissant du développement économique et social des quartiers, M. Pierre André a abordé la question de la politique en faveur des zones franches urbaines (ZFU), dont une réforme est proposée par le Gouvernement à travers l'article 82 du projet de loi de finances. Le dispositif serait recentré sur les bas salaires afin de favoriser l'emploi des publics qui en sont les plus éloignés, à savoir les moins diplômés et les moins qualifiés. Selon le Gouvernement, cette réforme doit inciter les entreprises installées en ZFU à recruter ces publics en priorité. L'article 82 propose également de mettre un terme aux mécanismes de sortie progressive du dispositif qui existent depuis 1997.
Prenant bonne note de la volonté du Gouvernement de réaliser, par cette réforme, une économie budgétaire de 100 millions d'euros, il a toutefois reconnu qu'il ne pouvait accueillir positivement celle-ci, pour deux raisons :
- d'une part, la réforme proposée peut avoir des répercussions en termes de répartition des emplois créés dans ces quartiers entre travail qualifié et non qualifié, le risque étant de voir les entreprises opérer une véritable segmentation de leurs activités en réservant aux quartiers difficiles les emplois à faible valeur ajoutée. Une telle évolution serait en total contradiction avec les objectifs d'excellence pour ces quartiers annoncés par le Gouvernement ;
- d'autre part, cette réforme risque de toucher très lourdement les entreprises installées dans les ZFU, et donc d'avoir des répercussions majeures sur la situation de l'emploi dans les quartiers.
Il a ajouté que la crédibilité de l'engagement de l'Etat était en jeu et a recommandé que soit pris en compte le retour sur investissement des emplois créés, notamment pour les familles qui en bénéficient.
C'est pourquoi il a proposé à la commission l'adoption d'un amendement tendant à la suppression de l'article 82 du projet de loi de finances pour 2009 considérant que les élus étaient les mieux à même de mesurer l'impact des mesures fiscales dans les villes.
Sous le bénéfice des ces observations, il a proposé aux commissaires d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits dans la mission « Ville et logement ».