Intervention de Jean Arthuis

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 18 juin 2008 : 1ère réunion
Constitution — Article 40 - recevabilité financière - communication

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président :

a rappelé qu'une nouvelle procédure d'application de l'article 40 de la Constitution, en vigueur à compter du 1er juillet 2007, avait été décidée par la Conférence des présidents en juin 2007. Il a indiqué en avoir présenté, ainsi qu'il s'y était engagé l'an passé, un premier bilan devant la Conférence des présidents, le 4 juin 2008.

Il a évoqué les trois « engagements tenus » par la commission. Tout d'abord, l'auteur d'un amendement estimé irrecevable est immédiatement prévenu par téléphone. Un message électronique exposant les raisons de l'irrecevabilité lui est en outre adressé. Ensuite, dès le lendemain, voire le jour même, le président de la commission lui adresse personnellement une lettre, reprenant cet exposé des motifs. Enfin, un premier recueil de jurisprudence a été établi, portant sur les 4.000 premiers amendements parlementaires qui ont fait l'objet de la nouvelle procédure ; il a été présenté le 4 juin dernier à la Conférence des présidents avant d'être soumis aujourd'hui même à la commission.

Cette nouvelle procédure vise à tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-544 DC du 14 décembre 2006, relative à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. M. Jean Arthuis, président, en a fait valoir les avantages, consistant en la « sécurisation » juridique des amendements venant en discussion en séance publique. En effet, ces amendements bénéficient désormais d'une présomption de conformité à l'article 40 de la Constitution, et la probabilité que cette disposition soit invoquée en séance est devenue très faible.

Précisant que toutes les décisions d'irrecevabilité sont prises par le président de la commission et, en cas de doute, par le bureau de la commission, il a souligné que celle-ci n'a pas pour vocation à censurer les initiatives des sénateurs, mais à assurer une sécurité juridique aux amendements venant en discussion en séance publique.

Il a alors présenté ce rôle de « conseil » exercé par la commission auprès des sénateurs : elle propose, en effet, un « soutien technique » aux auteurs d'amendement, destiné à leur permettre d'éviter l'écueil de l'irrecevabilité financière.

Il a indiqué que, sous l'empire de la procédure antérieure, pendant la session ordinaire 2006-2007, 62 amendements sur 4.712 amendements parlementaires déposés avaient été déclarés irrecevables, soit moins d'1,5 %. Du 1er juillet 2007 au 13 mai 2008, 156 amendements sur 4.053 amendements parlementaires déposés ont été déclarés irrecevables, soit 3,8 %. De la sorte, le taux d'irrecevabilité financière au Sénat reste très faible, y compris par comparaison avec celui constaté à l'Assemblée nationale (8,2 % au cours de la session 2005-2006).

Il a expliqué la modicité de ce taux d'irrecevabilité par trois facteurs :

- d'abord, les sénateurs apparaissent globalement acquis, dans leurs amendements, au principe de « sagesse budgétaire » ;

- ensuite, la « jurisprudence » de la commission, en la matière, se veut à la fois rigoureuse sur le plan constitutionnel et « bienveillante » à l'égard de l'initiative parlementaire ;

- enfin, à chaque fois que cela est apparu possible, une recherche de modification des amendements contraires aux dispositions de l'article 40 de la Constitution a été menée, avec leurs auteurs, afin de trouver des solutions respectant les conditions de recevabilité financière.

Il a ainsi estimé que, d'une manière générale, le fonctionnement de la nouvelle procédure d'application de l'article 40 de la Constitution s'avérait satisfaisant.

Toutefois, à titre personnel, il a constaté, que cette disposition, bien que destinée à limiter la dépense publique, n'avait empêché ni l'accumulation des déficits budgétaires ni l'augmentation continue de la dette de l'Etat depuis une trentaine d'années, et il s'est interrogé sur l'opportunité de la maintenir en vigueur. Au demeurant, il a souligné que l'article 40 de la Constitution ne faisait pas obstacle à la diminution des recettes publiques, eu égard notamment à l'appréciation dont fait l'objet la recevabilité des « gages » en ce domaine.

Aussi, il a rappelé qu'à titre strictement personnel, il avait déposé un amendement au projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République, tendant à abroger l'article 40 de la Constitution. A ses yeux, cette mesure serait conforme à l'esprit de « responsabilisation » du Parlement qui a inspiré ledit projet de loi. Il a fait observer que le gouvernement conserverait des moyens d'encadrer les débats. Au surplus, il a considéré que le projet de révision constitutionnelle introduisait un élément de difficulté pratique, pour l'application de l'article 40 de la Constitution, en prévoyant que la discussion en séance porte, en principe, sur le texte adopté par la commission saisie au fond.

Un débat s'est alors engagé.

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