a d'abord excusé M. Pierre Hérisson, co-rapporteur pour avis, retenu par d'autres obligations, tout en précisant que l'ensemble des propositions contenues dans le rapport qui allait être présenté avaient été élaborées d'un commun accord entre les deux co-rapporteurs.
Convenant ensuite que l'évocation de la télévision du futur pouvait faire rêver, il a assuré à ses collègues qu'il tenterait de ne pas faire une présentation trop technique même si la réalité l'était inévitablement.
Il a ensuite présenté le projet de loi, précisant qu'il était composé de deux parties, l'une relative à la télévision numérique terrestre (TNT) fixant la date d'extinction de la diffusion analogique de la télévision au 30 novembre 2011, l'autre relative à la télévision du futur, à savoir la télévision haute définition et la télévision mobile personnelle.
Il a annoncé que le rapport pour avis abordait trois sujets :
- l'enjeu d'aménagement du territoire représenté par la bascule vers une diffusion exclusivement numérique de la télévision ;
- la question de la gestion des fréquences libérées par cette bascule, fréquences communément désignées comme formant le « dividende numérique » ;
- la mobilité comme dimension nouvelle de la télévision.
Concernant le premier point, il a jugé que l'objectif d'une bascule de l'analogique au numérique d'ici cinq ans était un objectif intenable si le taux de couverture de la population en TNT était insuffisant et si le taux d'équipement des ménages en récepteurs numériques l'était aussi. Après avoir montré, cartes à l'appui, que le déploiement programmé de la TNT laisserait de côté, fin 2007, 20 voire 22 % de la population, au lieu des 15 % annoncés, il a fait observer que les pays voisins avaient des objectifs de couverture bien supérieurs (90 % pour l'Allemagne, 98 % pour le Royaume-Uni ou l'Espagne) et que se reposer sur le satellite pour couvrir la part de population non couverte par voie hertzienne terrestre n'était pas souhaitable.
Affichant une ambition de couverture à 100 % du territoire, il a considéré que la répartition entre l'hertzien terrestre et l'hertzien satellitaire, pour arriver à une couverture complète, nécessitait un travail de comparaison :
- techniquement, il a souligné la rapidité de mise en place d'une diffusion par satellite, la réception étant en revanche plus compliquée et nécessitant l'installation de 2,5 millions d'antennes paraboliques ; à l'inverse, l'hertzien terrestre nécessite un réseau de diffusion plus long à déployer, mais sa réception est plus aisée avec un simple adaptateur TNT ;
- économiquement, il a mis en avant que le recours au satellite coûtait moins cher aux éditeurs de services de télévision -les chaînes-, alors que, pour les foyers, la dépense moyenne pour l'acquisition d'un décodeur et d'une parabole atteignait 139 euros.
Il a conclu en proposant d'imposer une couverture par voie hertzienne terrestre de 95 % de la population aux six chaînes gratuites aujourd'hui diffusées en analogique. Il a par ailleurs fait part de son intention de proposer quelques aménagements au fonds d'accompagnement que prévoit le projet de loi pour favoriser l'équipement des ménages, d'une part afin qu'il respecte le principe de neutralité technologique en aidant pareillement la réception par voie hertzienne terrestre ou satellitaire, d'autre part afin que le public éligible au fonds ne le soit pas en fonction de son statut d'allocataire mais du fait d'un plafond de ressources, de manière à éviter les iniquités mises au jour par sa collègue, Mme Valérie Létard, dans le rapport publié à ce sujet par la commission des affaires sociales.
Abordant ensuite les enjeux du dividende numérique, il a expliqué qu'en diffusion analogique, chaque chaîne était attributaire d'une fréquence alors qu'en numérique, six chaînes pourraient se partager une fréquence. Cette meilleure efficacité spectrale permet ainsi la libération de ressources en fréquences qui représentent un bien public. Afin de mieux cerner la taille de ce dividende numérique, il a cité les conclusions de la conférence régionale des radiocommunications tenue à Genève en juin 2006, qui a identifié, pour la France, sept couches homogènes de fréquences assurant une couverture à 100 % du territoire et une couche à 80 % du territoire, six de ces couches devant servir à la diffusion de services de télévision fixe et deux à la diffusion de télévision en mobilité. Pourtant, l'opérateur de diffusion TDF et le conseil supérieur de l'audiovisuel évoquent la disponibilité de 15 à 20 multiplex, ce qui relativise la rareté des fréquences. Il a conclu que la rareté n'était pas la même selon les villes de France : plus grande dans le Nord-Est, en raison des règles de partage équitable du spectre entre pays frontaliers, elle est faible à Poitiers, où la France est seule souveraine sur les fréquences.
Il en a déduit qu'il était nécessaire d'adopter un démarche très prudente et de ne pas préempter le dividende numérique : celui-ci peut servir à de multiples usages alors même que le trafic sur le réseau d'Orange augmente de 20 % par an. Les télévisions locales doivent aussi pouvoir y trouver leur place en diffusion numérique. La couverture du territoire, par exemple en réseau UMTS, peut aussi se faire grâce à des fréquences libérées.
Insistant sur la nécessité de ne pas brader le domaine public hertzien, il a jugé utile d'améliorer doublement le schéma proposé par le projet de loi, confiant au seul Premier Ministre, effectivement légitime pour remplir cette mission d'intérêt général, le soin d'arrêter la réaffectation des fréquences libérées : d'une part, assigner à cette réaffectation de grands objectifs -améliorer la couverture du territoire, favoriser la diversification de l'offre de services, optimiser la gestion du domaine public hertzien- ; d'autre part, remettre le Parlement « dans la boucle », de même manière que la privatisation d'une entreprise exige de passer par la procédure législative.
Concernant la télévision du futur, M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis, a présenté d'abord la télévision en haute définition, qui offre une résolution d'image cinq fois supérieure à la définition standard et un son en relief -effet « surround »-, puis la télévision mobile personnelle (TMP), qui serait diffusée largement en « broadcast » sur un nouveau réseau en norme DVB-H permettant un nombre illimité d'utilisateurs, contrairement au réseau UMTS qui n'autorise l'accès à la télévision qu'à un nombre restreint d'utilisateurs simultanés.
Il a fait part des conclusions des expérimentations de télévision mobile personnelle : 70 % des usages de télévision mobile se font à l'intérieur, ce qui exige un réseau très dense, et 50 % des usages utilisent l'interactivité, ce que seul permet le réseau des opérateurs mobiles, laissant présager le rôle-clef de ces opérateurs dans le succès de la TMP, d'autant plus que le nombre de terminaux de téléphonie mobile est largement supérieur à celui des récepteurs de télévision de poche. Enfin, il apparaît que les chaînes de référence sont très regardées.
Sans remettre en cause la décision du Gouvernement de prolonger pour les services de télévision mobile personnelle le schéma actuel d'autorisation de fréquence par éditeur, il a relevé que le modèle économique de la télévision mobile personnelle ne serait pas un décalque du modèle économique de la TNT. Le financement des chaînes gratuites par la publicité ne sera pas possible en TMP, un spectateur en mobilité s'accommodant mal de tunnels de publicité. Cette baisse prévisible des recettes doit être considérée parallèlement à l'accroissement des charges de diffusion nécessité par la densité du réseau DVB-H, dont le déploiement devrait coûter 110 millions d'euros pour couvrir 35 % de la population et 360 millions d'euros pour en couvrir 70 %. Il a également fait observer que les chaînes analogiques en clair n'avaient aujourd'hui aucune relation avec le client final et a souligné, à cet égard, le besoin d'une large collaboration entre les éditeurs de chaînes et les opérateurs mobiles, qui, en outre, subventionnent les terminaux de téléphonie mobile et exploitent le réseau UMTS, lequel présente l'avantage de permettre une interactivité impossible en « broadcast », de donner accès à un très grand nombre de chaînes -contre seulement 15 à 20 sur le réseau DVB-H- et de mieux couvrir le territoire. Ceci doit se traduire par une parfaite interopérabilité entre les réseaux UMTS et DVB-H.
C'est pourquoi il a proposé que les opérateurs mobiles participent au choix de l'opérateur du multiplex, chargé de gérer la fréquence que la diffusion numérique permet de partager entre plusieurs chaînes. Il a insisté sur la légitimité de cette participation des opérateurs, lesquels ne pouvaient être tenus à l'écart des options techniques et des choix de commercialisation qui relèvent de l'opérateur du multiplex.
C'est aussi la raison pour laquelle il a plaidé pour la réciprocité des relations entre éditeurs et distributeurs, afin qu'un distributeur ne puisse refuser de reprendre une chaîne dans son offre commerciale et qu'un éditeur de service de télévision ne puisse refuser à un distributeur de reprendre ce service dans son offre commerciale. Il a expliqué qu'un tel modèle basé sur le principe de non exclusivité et sur des accords conclus dans des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires permettrait de satisfaire les consommateurs, qui rechercheront sur la TMP les chaînes de référence, de diffuser plus largement les contenus audiovisuels et de prévenir les risques d'une concentration possible entre éditeurs et distributeurs.
Enfin, il a conclu en indiquant que la coupe du monde de rugby en septembre 2007 pourrait être l'occasion d'un premier succès commercial pour la TMP.