Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 9 avril 2010 à 14h30
Grand paris — Article 9 bis nouveau

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Soucieuse de crédibiliser, sur le plan financier, le projet de transport du Grand Paris, la commission spéciale, soutenue par le Gouvernement, a introduit cet article 9 bis et instauré une taxe forfaitaire sur le produit de la valorisation foncière issue de la réalisation du métro automatique de grande capacité.

Or cette solution de financement est précisément celle qu’avait écartée la mission Carrez, en invoquant deux raisons.

La première, et nous pouvons tous nous rejoindre sur ce point, est qu’aucune évaluation sérieuse du produit de cette taxe n’a jamais pu être établie. M. Carrez lui-même, lors de son audition par la commission spéciale, a jugé son montant très variable, entre un milliard et 2 milliards d’euros sur l'ensemble de la période, c'est-à-dire entre 100 millions et 200 millions d’euros les bonnes années. Par conséquent, le chiffrage de la mesure est très difficile.

La seconde raison mérite toute notre attention eu égard, notamment, à la liberté laissée aux collectivités territoriales. Voici ce que M. Carrez a déclaré devant la commission : « Il faut laisser aux collectivités la liberté d’affecter cette ressource aux projets de leur choix, équipements publics ou logements sociaux en particulier ; l’État ne devrait pas décider unilatéralement d’une forme de préemption de la valorisation foncière en faveur du réseau de transport. » C’est aussi une question de principe.

Je veux revenir sur la nécessaire fluctuation de cette taxe, à laquelle vous avez à l’instant fait référence, monsieur le rapporteur, lorsque vous avez indiqué qu’elle avait été instaurée pour le reste de la France dans le projet de loi Grenelle II. Notre collègue Roland Ries, s’exprimant au nom du groupe socialiste, avait déjà fait part de ses doutes quant au rendement financier à en attendre.

Le produit de la taxe sera effectivement très variable dans la mesure où il dépendra des fluctuations du marché de l’immobilier, par nature cyclique. Sur un cycle de quinze ans, durée pendant laquelle la taxe est censée être instituée, comment pouvons-nous faire le pari qu’il n’y aura pas de retournement du marché ? Ce dernier a tout de même subi une chute de 10 % en 2009.

Je rappelle du reste que la prolongation du métro des Docklands, à Londres, devait, au départ, être intégralement financée par ce type de recette. Mais la conjoncture en a décidé autrement : les travaux ayant été engagés alors que le marché de l’immobilier s’effondrait, aucune transaction ne s’est concrétisée et les pouvoirs publics ont dû prendre le relais en assurant un financement budgétaire classique.

En outre, il est prévu de rendre cette taxe exigible dans un rayon de 1 500 mètres autour d’une gare, ou de 800 mètres si l’on prend en compte l’amendement du Gouvernement que nous allons bientôt examiner. Or, dans sa note de mars 2009 sur ce sujet, le Centre d’analyse stratégique se montre pour le moins sceptique, car la construction d’une nouvelle gare peut aussi entraîner des nuisances et faire subir des moins-values au patrimoine foncier situé à proximité. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ne raisonnons pas uniquement en termes de plus-values !

Se pose également la question, plus technique, mais tout aussi importante, dont nous avons débattu en commission, du taux de cette taxe, fixé à 15 %. Si la plus-value est réellement liée à la réalisation de l’infrastructure de transport et aux aménagements effectués dans leur périmètre, c'est-à-dire à l’ampleur des investissements publics, alors un taux plus élevé sera parfaitement justifié,

M. Braye a lui-même plaidé en commission en faveur d’une refonte de la taxe, au motif que son produit est vraiment trop aléatoire. Il faut en effet bien comprendre que le taux réellement applicable ne sera pas forcément de 15 %, puisque le produit de l'impôt payé est plafonné à 5 % du prix de cession.

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