Intervention de Bruno Le Maire

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 28 avril 2010 : 2ème réunion
Loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche — Débat d'orientation

Bruno Le Maire, ministre :

La contractualisation a pour objectif de réduire la volatilité des prix et de freiner la spéculation. Les Européens se convertissent à l'idée d'une contractualisation européenne dans toutes les filières, comme Dacian Ciolos l'a confirmé tout à l'heure. Cela implique la constitution d'indicateurs de tendances des prix dans les interprofessions.

En ce qui concerne la méthanisation, Mme Gourault a raison de dire que les incitations destinées aux exploitants ne suffisent pas : les opérateurs doivent suivre. J'ai demandé à Gérard Mestrallet, PDG de GDF-Suez, d'accélérer le programme de construction d'installations.

Monsieur Patient, le Gouvernement est extrêmement attentif à l'agriculture d'outre-mer. L'article 24 du projet de loi prévoit de l'autoriser à légiférer par ordonnances ; nous prendrons le temps de la consultation, mais je m'engage à respecter les délais. Le Président de la République et moi-même l'avons dit aux Etats généraux de l'outre-mer : il faut empêcher le rétrécissement des terres agricoles, sinon il n'y en aura bientôt plus aux Antilles. L'article prévoit explicitement l'établissement d'espaces agricoles et naturels à préserver. Le Président de la République a d'ores et déjà promis 40 millions d'euros par an pour l'agriculture ultramarine.

Monsieur Marsin, c'est la Commission européenne qui négocie l'accord Caraïbes, non les Etats mais je m'engage à lui transmettre le message dans les meilleurs délais.

M. Pointereau a soulevé le problème de la compatibilité entre les nouvelles dispositions et le droit de la concurrence européen. Nous avons cherché à aller aussi loin que possible tout en respectant les règles européennes, favorisant par exemple les circuits courts sans préciser le kilométrage. Le droit européen doit évoluer, je l'ai dit à Joaquin Almunia, commissaire européen à la concurrence. Dans le secteur du lait, il interdit les associations de plus de 400 producteurs pour négocier avec les industriels : ce plafond est dérisoire, il faudrait le porter à 4 000 ! J'ai bon espoir que les négociations aboutissent avant la fin de l'année et nous prendrons alors les décrets nécessaires. Dans le secteur des céréales, une intervention européenne est indispensable pour faire remonter les cours : j'ai abordé la question avec Dacian Ciolos, qui a déjà dégagé 11 millions d'euros pour la gestion du marché. Je souhaite qu'à l'avenir la Commission soit plus réactive : sans la France, qui a mis trois mois à la convaincre de venir en aide aux producteurs de lait, elle ne l'aurait toujours pas fait ! Si les prix ont remonté en janvier, ce n'est pas par miracle, mais grâce à l'injection de 300 millions d'euros pour le stockage.

Avec M. Muller, j'ai plus de points d'accords qu'il ne le croit. Mais qu'il ne travestisse pas ma position ! Ce n'est pas par rapport à l'Amérique du Sud, à l'Asie ou à l'Océanie que je veux renforcer notre compétitivité, car ces continents n'ont pas choisi le même modèle que nous, fondé sur la sécurité sanitaire, environnementale et alimentaire. Je ne cherche d'ailleurs pas à favoriser exclusivement la compétitivité-prix : je parle d'abaissement des coûts de production, d'élargissement des débouchés et de valorisation. Mais nous ne pouvons nous satisfaire d'être moins compétitifs que l'Allemagne, notre principal concurrent ! L'écart de compétitivité est de 15 % pour le lait, et il est sans doute supérieur pour les fruits et légumes ; nous perdons chaque jour du terrain dans la filière porcine. Il faut redresser la barre, sinon ces filières disparaîtront. Certes, il existe des écarts de normes sociales entre les pays européens : j'ai soulevé ce problème lorsque j'étais ministre chargé des affaires européennes.

Le Gouvernement se souvient des engagements du Grenelle : il compte par exemple modifier les règles d'attribution des marchés publics pour favoriser les produits locaux. Pour ce qui est de la préservation des terres agricoles, notamment en zone périurbaine, on m'a assez reproché d'être trop strict pour que vous ne m'accusiez pas de faire litière de cette préoccupation ! C'est moi qui ai voulu taxer la spéculation foncière. Il est particulièrement difficile de défendre l'agriculture en secteur périurbain, car c'est là que les terres se valorisent le plus : près du Havre, le prix d'un terrain est multiplié par 120 lorsqu'il devient constructible ! Le constat est le même sur le plateau de Saclay ou dans la banlieue lyonnaise.

Limiter les intrants, oui, si c'est techniquement possible. On ne peut demander aux agriculteurs de se débrouiller seuls : les pouvoirs publics et l'Inra doivent fournir aux agriculteurs les moyens techniques de remplir les objectifs fixés. C'est l'objet du plan Ecophyto 2018.

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