Intervention de Serge Lagauche

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 24 novembre 2010 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2011 — Mission culture - examen du rapport pour avis

Photo de Serge LagaucheSerge Lagauche, rapporteur pour avis :

Le programme « Création » ne comporte plus que deux actions : le spectacle vivant, qui concentre 90,5 % des crédits, et les arts plastiques. Les crédits s'établissent, avant transferts, à 753,1 millions en autorisations d'engagement, en hausse de 4,2 %, et à 736,8 millions en crédits de paiement, en hausse de 1,8 %. Les crédits déconcentrés restent stables pour le spectacle vivant et baissent pour les arts plastiques.

Je m'inquiète de la tendance à construire ou aménager de nouveaux équipements, pour lesquels les crédits de fonctionnement risquent d'être limités. S'agissant du spectacle vivant, ceux-ci s'établissent à 681 millions en autorisations d'engagement, en hausse de 2,9 %, et à 663 millions en crédits de paiement, en baisse de 0,4 %. Les crédits d'investissement augmentent de 23,5 % en autorisations d'engagement et de 10,4 % en crédits de paiement, afin notamment de poursuivre les travaux dans de grands établissements. Les crédits d'investissement déconcentrés progressent de 4,5 %, notamment en faveur des scènes de musiques actuelles (SMAC) ou de la modernisation de scènes nationales.

En revanche, les subventions de fonctionnement, qui absorbent 43 % des crédits, ne suivent pas l'inflation. Les opérateurs devront donc arbitrer entre masse salariale et marge artistique. Les crédits de fonctionnement déconcentrés sont également strictement reconduits. Le non-remplacement d'un départ sur deux et la réduction des dépenses de fonctionnement de 5 % s'applique. La diminution des crédits alloués au programme « Création » par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2013 est également préoccupante. Les collectivités territoriales, qui financent aux deux tiers le spectacle vivant, ne pourront suppléer à ce retrait de l'État.

Aux opérateurs de développer des synergies et mieux diffuser leurs créations. Cette spécificité hexagonale est coûteuse. Je me réjouis de la signature à Avignon, le 16 juillet 2010, d'une déclaration dans laquelle les différents niveaux de collectivités s'engagent à approfondir la décentralisation et à instaurer une concertation suivie avec les acteurs de la culture et les publics.

A la suite tant du rapport de la Cour des comptes que des Entretiens de Valois, les missions de chacun vont être clarifiées. La Cour invite notamment le ministère à redéfinir son rôle, à redéployer les ressources qu'il consacre au spectacle vivant et à mettre en place un dispositif d'observation et d'évaluation du spectacle vivant. Elle invite aussi à mieux formaliser les liens entre l'État et les collectivités pour mieux articuler leurs actions.

La circulaire du 31 août 2010 définit les dix labels et réseaux nationaux qui structurent le secteur, et explicite leur tronc commun de missions. Une plateforme opérationnelle d'observation a été mise en place voilà plus d'un an, et des groupes de travail sont à l'oeuvre. Néanmoins, certaines organisations freinent ces travaux ou souhaitent en exclure les auteurs et artistes. Je demanderai des précisions au ministre, et insiste sur l'urgence de mettre en place des procédures fiables d'observation.

L'action « Arts plastiques » voit ses crédits progresser de 19,3 % en autorisations d'engagement, à 71,7 millions, et de 28,7 % en crédits de paiement, à 73,5 millions. Les crédits de fonctionnement des opérateurs augmentent de 7,2 %, notamment pour les expositions du Grand Palais. La hausse des crédits d'investissement financera deux grands projets nationaux, le Palais de Tokyo et les manifestations d'art contemporain au Grand Palais. Les crédits d'intervention permettront de soutenir la création de l'Institut des métiers d'art ; les crédits déconcentrés, de financer la montée en charge du programme des fonds régionaux d'art contemporain (FRAC).

Si la fréquentation des salles de cinéma a atteint un niveau record en 2009, la part des films français n'est plus que de 36,8 %. La production reste élevée, malgré une baisse de 4,2 %. L'offre légale de films en vidéo à la demande a progressé de 18,2 % en un an. C'est le meilleur moyen de lutter contre le piratage. Mais selon un rapport de juin 2010, les industries techniques pâtissent de la numérisation des films et des salles. J'interrogerai le ministre sur les mesures envisagées pour accompagner ces industries dans leur mutation.

Mon rapport écrit présente les différentes sources de financement. Le CNC verra ses recettes augmenter en 2011, car il doit faire face à la numérisation des oeuvres et des petites salles ; en outre, un certain nombre d'actions sont débudgétisées. Ceci justifie que l'on préserve ses recettes, comme nous l'avons défendu hier à l'occasion de l'amendement présenté par la commission des finances tendant à transférer 130 millions du CNC au budget de l'État. Plus raisonnable, le Sénat a limité ce prélèvement à 20 millions.

Le rapport présente les projets en cours et évoque les problèmes structurels des petits cinémas, ainsi que les suites données par le CNC aux propositions du Club des 13 en faveur des producteurs, et à celles du rapport Bonnell. Une mission a été confiée au Médiateur du cinéma en octobre 2010 ; je demanderai au ministre de préciser les mesures envisagées.

Nous souhaitons que la Commission européenne envisage un taux réduit de TVA pour les services de commerce électronique fournissant des biens et services culturels.

Je vous proposerai par ailleurs un amendement au projet de loi de finances rectificative visant à aligner le plafond du crédit d'impôt pour les producteurs français sur celui des productions étrangères tournées en France, en le portant de 1 à 4 millions tout en l'encadrant, afin d'éviter la délocalisation de quelques très grosses productions.

Enfin, mon rapport détaille la montée en puissance de l'Hadopi. Selon un sondage, 53 % des adeptes du piratage auraient déjà réduit ou arrêté cette pratique.

En conclusion, votre rapporteur pour avis recommande l'adoption des crédits du programme « Création ». Ce rapport retrace bien la situation, mais, à titre personnel, je ne peux approuver ce budget, particulièrement contraint. Si la déclaration d'Avignon va dans le bon sens, les collectivités restent soumises à l'État, et il n'y en a que pour Paris ! Le financement du Centre Pompidou mobile, l'investissement à Marseille sont autant de sources d'inquiétude. Mon groupe ne votera pas ce budget. Les élections approchent... (Sourires).

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