Intervention de Charles Revet

Réunion du 27 mars 2008 à 9h30
Nationalité des équipages de navires — Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Charles RevetCharles Revet, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture le projet de loi relatif à la nationalité des équipages de navires, adopté par l'Assemblée nationale le 30 janvier dernier.

Je ne reviendrai pas sur le contexte ni sur le contenu de ce projet de loi, que M. le ministre a déjà présentés.

Il est clair que le contexte a évolué depuis l'examen de ce texte au Sénat en première lecture, en septembre dernier, puisque, M. le secrétaire d'État vient de le rappeler, la France a été condamnée le 11 mars dernier par la Cour de justice des Communautés européennes. Celle-ci a en effet jugé que le fait de réserver aux Français les postes de capitaine et de son suppléant à bord des navires battant pavillon français était contraire à l'article 39 du traité d'Amsterdam, qui fixe le principe de libre circulation des personnes au sein de la Communauté européenne. Dans ces conditions, il apparaît désormais urgent d'adopter ce projet de loi, ne serait-ce que pour éviter à la France d'être condamnée à payer une astreinte.

S'agissant du contenu, l'Assemblée nationale a validé pour une grande partie le texte tel qu'il avait été modifié par le Sénat.

Ainsi, afin d'assurer le respect des conditions de sécurité, nous avions estimé indispensable d'exiger des futurs capitaines, outre une maîtrise minimale de la langue française, des connaissances juridiques solides, puisque les capitaines disposent de pouvoirs importants en matière civile et pénale. Ce point a été conservé par les députés, et je m'en félicite.

Nous avions également souhaité pérenniser les obligations des armateurs en matière d'embarquement d'élèves-officiers afin de soutenir une filière nationale de formation maritime. Cette disposition a, elle aussi, été maintenue.

La principale modification, adoptée sur l'initiative du Gouvernement, concerne les modalités de vérification du niveau de maîtrise de la langue et du droit français par les candidats au poste de capitaine.

Estimant qu'il existait un risque de censure au niveau communautaire, le Gouvernement a remplacé la notion de « diplôme », adoptée au Sénat, par celle de « vérification ». D'après le projet de décret qui m'a été communiqué, cette vérification devrait être confiée à une commission composée de professionnels chargée d'évaluer le niveau des candidats.

Je regrette que, pour des raisons de droit communautaire, la notion de diplôme n'ait pu être conservée, et je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'État, comme vous venez de l'évoquer, que vous puissiez vous engager sur deux points du décret qui me paraissent très importants.

D'une part, je souhaite que la commission qui jugera du niveau des capitaines européens leur délivre une attestation de capacité. D'autre part, cette commission doit impérativement être composée de capitaines en exercice, qui connaissent les réalités du métier, et de représentants des professeurs ou des directeurs d'écoles de la marine marchande. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous donner confirmation sur ces deux points ?

La commission des affaires économiques avait insisté en première lecture sur la nécessité d'accompagner l'adoption de ce projet de loi de mesures fortes pour relancer la filière maritime française. Force est en effet de constater que la France, grande puissance maritime historique, n'occupe pas aujourd'hui le rang qui devrait être le sien. Placé dans les années soixante au quatrième rang mondial, le pavillon français n'occupe plus que la vingt-neuvième place.

L'emploi maritime est marqué par une crise de vocations et la France connaît une grave pénurie de capitaines, puisqu'on l'évalue à environ 600 officiers. Or, l'existence d'un nombre suffisant d'officiers navigants est une condition impérative du maintien de la sécurité maritime à bord de nos côtes et au-delà. En effet, après une carrière maritime, les personnels navigants deviennent fréquemment experts maritimes, pilotes maritimes et hauturiers et inspecteurs des affaires maritimes. C'est pourquoi le maintien de cette filière est indissociable de l'existence d'un savoir-faire français, gage d'une exigence particulière en matière de sécurité maritime.

Monsieur le secrétaire d'État, vous vous étiez engagé en première lecture à organiser rapidement sur cette question une rencontre de tous les acteurs concernés. Celle-ci a eu lieu le 31 janvier dernier et a réuni environ 250 représentants et personnalités du monde maritime. Les discussions se sont déroulées autour des thèmes suivants : le contenu de la formation maritime et l'organisation des études, l'amélioration de l'attractivité des métiers maritimes et le statut des écoles de la marine marchande.

À l'issue de cette table ronde, il apparaît impératif de prendre rapidement des mesures fortes pour améliorer l'attractivité du métier et des formations. Vous nous avez d'ailleurs donné à l'instant des informations sur les premières mesures que vous avez décidées, ce dont je vous remercie.

Il faut en effet augmenter substantiellement les moyens des écoles de la marine marchande et les réorganiser. L'État doit conserver, selon moi, la maîtrise de l'enseignement maritime supérieur et il faut réfléchir à une simplification des implantations des écoles, qui sont actuellement au nombre de quatre. Il faut également renforcer les partenariats avec les armements et envisager que les élèves puissent passer un contrat avec l'école, par lequel ils s'engagent à rester dans la marine pendant un certain nombre d'années.

Enfin, il faut améliorer les débouchés offerts aux élèves à la sortie des écoles, en leur permettant, par exemple, d'avoir une équivalence de diplôme d'ingénieur. Vous venez également de l'évoquer voilà quelques instants.

Sur tous ces points, monsieur le secrétaire d'État, j'espère que nous pourrons avancer rapidement dans les semaines à venir.

Enfin, vous aviez annoncé, lors du débat en première lecture, le lancement d'une mission de médiation sur la question du registre international français, dont l'intersyndicale nationale des marins et officiers de la marine marchande a obtenu le classement en pavillon de complaisance. Pouvez-vous nous indiquer où en est cette mission, qui a été confiée au président du Conseil supérieur de la marine marchande ? Il est, effet, particulièrement important que nous progressions sur ce point si nous voulons relancer la flotte de commerce française.

Sous réserve de ces observations, la commission vous propose, mes chers collègues, d'adopter le présent projet de loi.

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