Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 27 mars 2008 à 15h00
Communication du médiateur de la république

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, président de la commission des lois :

C'est un autre sujet...

Cette préoccupation, monsieur le Médiateur, je sais que vous la partagez tout autant que notre commission des lois. À cet égard, je tiens à souligner le travail de coopération remarquable que vous avez engagé l'an passé avec le Parlement, à l'occasion de la proposition de loi de simplification du droit.

Ce travail, que vous avez réalisé au Sénat avec notre collègue Bernard Saugey, rapporteur de la proposition de loi, a abouti à des réformes importantes, inscrites dans la loi du 20 décembre 2007, au premier rang desquelles figure la simplification des règles de représentation devant la juridiction de proximité et le tribunal d'instance où le ministère d'avocat n'est pas obligatoire. Ainsi que vous l'avez rappelé, le législateur a ajouté à la liste des personnes habilitées à représenter une partie les concubins et les partenaires d'un pacte civil de solidarité, alors que, jusqu'à présent, seuls les conjoints mariés pouvaient le faire.

Au premier rang de ces réformes importantes figure également le renforcement des droits des automobilistes. Dans votre dernier rapport d'activité, vous aviez, monsieur le Médiateur de la République, émis certaines réserves quant à la procédure suivie dans le domaine des infractions au code de la route. Ces réserves ont été entendues puisque le Sénat a introduit dans le texte deux dispositions visant à réduire l'opacité des procédures en matière de traitement des contraventions.

Ces échanges entre la Médiature et le Parlement, je tiens à le rappeler, ne seraient en rien menacés par la suppression du filtre parlementaire obligatoire, que la commission des lois et le Sénat tout entier appellent de leurs voeux depuis de nombreuses années.

Rappelons à cet égard que si, en 1973, le législateur avait souhaité mettre en place ce filtre, dans le souci d'éviter l'engorgement d'une institution naissante, sa pertinence s'est estompée au fil des ans. La loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations l'a ainsi expressément supprimé s'agissant du pouvoir de proposer des réformes reconnu au Médiateur de la République. Celui-ci peut désormais être saisi par tout citoyen d'une demande de réforme et même s'autosaisir.

Par ailleurs, depuis la mise en place des délégués du Médiateur, les citoyens ont pris pour habitude de saisir directement cet échelon de proximité, ce qui oblige les délégués à faire valider cette démarche rétroactivement par un parlementaire, ce qui, vous l'avouerez, n'est pas d'une efficacité redoutable.

De même, l'amélioration de la transparence et de l'interactivité dans les relations entre l'administration et les usagers a naturellement conduit ces derniers à s'adresser directement aux services centraux de la Médiature, en particulier par voie électronique.

Vous soulignez d'ailleurs dans votre rapport que 47 % des demandes ont ainsi été adressées spontanément aux services centraux, sans respecter la règle du « filtre », ce qui oblige, là encore, à de fastidieuses démarches de formalisation a posteriori par des parlementaires. Certains de nos collègues devraient tout de même s'en rendre compte après plusieurs années.

Enfin, l'ouverture de la saisine directe du Médiateur obéirait à une logique de double harmonisation : d'une part, avec les pratiques européennes - le Médiateur européen et vingt-trois médiateurs nationaux peuvent être directement saisis - et, d'autre part, avec celles de nombreuses autorités administratives indépendantes créées depuis et chargées de la protection des droits, telles que la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, le Défenseur des enfants, autorités auxquelles tout citoyen peut s'adresser directement.

Je note d'ailleurs que vous semblez partager cette analyse lorsque, plus généralement, vous mettez en exergue, dans votre rapport, la nécessité de faire évoluer votre institution en « Ombudsman à la Française », afin, dites-vous, d'élargir le champ de compétence de l'institution du Médiateur de la République et « de franchir une étape importante dans le sens d'une amélioration de la protection des droits des citoyens ».

Il s'agit là, en effet, d'un débat essentiel pour notre pays, débat qui pourrait bien s'engager devant notre assemblée prochainement à l'occasion de l'examen du projet de loi de réforme des institutions. En effet, il ressort, pour l'instant, de la communication du conseil des ministres du 19 mars dernier que le texte devrait prévoir la création d'un « défenseur des droits du citoyen » susceptible d'être saisi par toute personne s'estimant lésée par le fonctionnement d'un service public.

En tout état de cause, vous soulignez que l'institution d'un ombudsman à la française, en assurant une convergence institutionnelle avec certains de nos voisins européens, permettrait de « créer et d'entretenir une dynamique indispensable dans une société devenue transnationale et transculturelle ».

Naturellement, votre réflexion ne se limite pas, tant s'en faut, à l'évolution de votre statut. Cette année encore, votre rapport montre que l'institution que vous servez agit comme une force de proposition essentielle. En effet, les dizaines de milliers de réclamations, comme les demandes d'information et d'orientation, reçues chaque année vous placent à un poste d'observateur de la société privilégié, propre à faire évoluer notre droit vers plus d'équité et plus de simplicité.

Parmi les réformes qui ont abouti en 2007, outre les mesures de simplification du droit déjà évoquées, il faut mentionner la loi sur l'assurance vie.

La situation des contrats d'assurance vie non réclamés était inacceptable et le Parlement s'est saisi de cette question et a adopté le 17 décembre dernier une loi permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d'assurance vie non réclamés et garantissant les droits des assurés.

Pour 2008, vous appelez de vos voeux la mise en oeuvre d'autres réformes.

L'une des questions que vous soulevez est celle de l'état civil des enfants nés sans vie. Cette question a reçu une acuité particulière - l'acuité était bien sûr déjà ressentie par les familles - avec les arrêts récents de la première chambre civile de la Cour de cassation, soulignant qu'une circulaire ne pouvait subordonner la délivrance d'un acte d'enfant sans vie à des conditions que la loi n'avait pas prévues.

Nos collègues Jean-René Lecerf et Jean-Pierre Sueur, que vous avez d'ailleurs cités, se sont saisis de cette question, qui est extrêmement sensible et complexe. Nous allons y travailler afin de trouver une solution, mais celle-ci ne peut pas intervenir immédiatement dans le cadre de la législation funéraire. C'est d'abord un problème d'état civil

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