Intervention de Alain Vasselle

Commission des affaires sociales — Réunion du 27 octobre 2010 : 1ère réunion
Programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 — Examen du rapport pour avis - débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution - communication

Photo de Alain VasselleAlain Vasselle, rapporteur général :

Conformément au nouvel objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques, inscrit à l'article 34 de la Constitution, il propose une stratégie de redressement dans la perspective d'une réduction du déficit à 2 % du Pib en 2014. Celle-ci, outre qu'elle s'appuie sur la définition de règles de comportement, repose sur une maîtrise ambitieuse des dépenses et une sécurisation des recettes. Le chapitre Ier du texte, qui fixe les objectifs généraux des finances publiques, contient la programmation du redressement des comptes sur la période 2011-2014 avec l'évolution du solde par catégorie d'administrations et une évolution de la dette publique, année après année. Le II porte sur l'évolution des dépenses de l'ensemble des administrations publiques, de l'Etat et de la sécurité sociale. Après le chapitre III relatif aux recettes de l'Etat et de la sécurité sociale, le IV vise à limiter le recours à l'endettement pour certains organismes publics. Enfin, le chapitre V tend à renforcer l'information du Parlement en organisant le suivi de la mise en oeuvre de la programmation, avec la réalisation d'un bilan annuel de la loi.

En outre, le projet de loi s'accompagne d'un rapport qu'il est proposé d'approuver à l'article 2. Ce rapport, assez détaillé, précise le contexte macro-économique et les hypothèses retenues, les objectifs poursuivis pour les finances de l'Etat, celles de la sécurité sociale et celles des collectivités locales, ainsi que les conditions de réalisation de la loi de programmation. S'agissant des finances sociales, les principales hypothèses macro-économiques, identiques à celles figurant à l'annexe B du projet de loi de financement pour 2011 que nous examinerons mercredi prochain en commission, sont : un redressement progressif de la croissance en 2010 et 2011 avec des taux respectifs de 1,5 % en 2010, 2 % en 2011, puis plus dynamique, avec un taux moyen de 2,5 % par an, à partir de 2012 ; une augmentation de la masse salariale estimée à 2 % en 2010, à 2,9 % en 20l1 et à 4,5 % par an les trois années suivantes ; une inflation hors tabac de 1,5 % en 2010 et 2011, puis de 1,75 % les années suivantes. Je rappelle que nous devons nous fixer des objectifs ambitieux, sans quoi nous nous ferons taper sur les doigts par l'Europe !

Dans ce cadre, l'objectif de réduction du déficit public à 2 % du Pib en 2014 et, pour les seules administrations de sécurité sociale à 0,5 % du Pib en 2014, repose sur un premier élément : la maîtrise de la dépense. Un objectif chiffré de dépenses est fixé pour l'ensemble des régimes obligatoires. Il correspond à une croissance annuelle moyenne des dépenses de 3,3 %, inférieure en volume d'environ un point à celle du Pib. La réforme des retraites permettra d'améliorer le solde de la branche vieillesse d'environ 10 milliards à l'horizon 2014. Pour la branche maladie, le taux d'évolution annuel de l'Ondam a été fixé, de manière ambitieuse, à 3 % en 2010, 2,9 % en 2011 puis 2,8 % en 2012 et les années suivantes. Cet objectif est exigeant mais pas inatteignable, comme le montrent les résultats de 2010. Nous devrions terminer cette année avec une progression de l'Ondam à 3 %, soit le plus bas niveau atteint depuis des années. De surcroît, ce sera le premier Ondam réellement respecté depuis 1997. Pour contenir la progression des dépenses de santé, dont l'évolution tendancielle est supérieure à 4 % par an, il faudra trouver chaque année au moins 2,3 milliards d'économies. Le rapport annexé au projet de loi fait état de la nécessité d'engager des réformes structurelles pluriannuelles : l'amélioration des synergies entre les différents types de prise en charge - ambulatoire, hospitalier, médico-social -, la modernisation des modes d'exercice des professionnels - nouveaux modes de rémunération, promotion du contrat d'amélioration des pratiques individuelles -, ou encore le renforcement de l'efficacité de l'hôpital. Si des économies peuvent être réalisées, prenons garde : la mise en oeuvre des décisions est souvent beaucoup trop lente. Pour les autres branches, le rapport comporte peu d'indications, sinon la nécessité d'assainir les finances de la branche AT-MP, et « l'impératif d'adapter la politique familiale aux évolutions économiques et sociales », ce qui reste assez flou, vous en conviendrez.

Deuxième élément : la sécurisation des recettes, qui passe par une dynamique suffisante des ressources du régime général et la poursuite de la stratégie de réduction des niches sociales. Le projet de loi de programmation prévoit une progression annuelle de 4,1 % des produits du régime général. Cet objectif exigeant, un peu supérieur à ce qui a été enregistré dans les années précédant la crise, est directement lié à l'évolution de la masse salariale. Or un point en moins pour celle-ci représente environ 2 milliards de ressources en moins pour la sécurité sociale. Autre méthode : contenir la progression des niches sociales. Bien des années avant le Gouvernement et l'Assemblée nationale, notre commission défendait l'idée d'une taxation des stock-options et de l'instauration d'une flat tax, dénommée aujourd'hui forfait social. L'an dernier, nous avions également proposé une annualisation du calcul de ces allégements pour dégager plus de 2 milliards par an, demande à laquelle le Gouvernement a opposé une fin de non-recevoir avant de la reprendre pour financer la réforme des retraites ! Je ferai de nouvelles propositions lors de l'examen du projet de loi de financement la semaine prochaine. En effet, la recherche de nouvelles recettes est indispensable pour assurer l'équilibre des finances sociales face au défi du vieillissement de la population et de l'amélioration des prises en charge. Je pense particulièrement au déficit structurel de la branche maladie que la seule maîtrise des dépenses, fût-elle extrêmement rigoureuse, ne suffira pas à combler.

Troisième élément, les règles de bonne gouvernance et d'encadrement des dépenses fiscales et des niches sociales. Les nouveaux principes de fixation d'un montant minimum de hausse des prélèvements obligatoires chaque année et de stabilisation en valeur du coût des niches fiscales et sociales durant la programmation, prévus à l'article 9, seront plus efficaces, je l'espère, que la règle de gage adoptée il y a deux ans. Je suis également favorable à la définition d'une durée de quatre ans pour toute niche nouvelle ou extension de dispositif dérogatoire, à l'article 9 bis, ainsi qu'au principe de l'affectation au désendettement de tout surplus de recettes à l'article 10, qui reprend, en somme, l'idée d'une clause de retour à meilleure fortune que je vous ai proposée lors du projet de loi organique sur la gestion de la dette sociale. Les derniers articles prévoient un meilleur suivi des niches sociales et fiscales : présentation du coût annuel des niches chaque année avant le 15 octobre ainsi que d'un bilan des dispositifs créés, modifiés ou supprimés au cours de l'année passée ; présentation d'un rapport d'évaluation d'une mesure dans les trois années suivant son entrée en vigueur ; enfin, chaque année avant la fin juin, un bilan de la mise en oeuvre de la loi. Ces articles répondent aux souhaits régulièrement exprimés par notre commission. Tout, en effet, n'est pas parfait : les prévisions sur le budget de l'Etat sont, hélas !, toujours plus précises que celles portant sur les finances de la sécurité sociale.

Pour conclure, le Gouvernement promettait un retour à l'équilibre de la sécurité sociale en 2012 il y a deux ans, puis un déficit difficilement stabilisé à 30 milliards jusqu'en 2013 l'an passé, pour envisager cette année un déficit de 15 milliards en 2014. Si l'exercice de la programmation comporte de réelles limites, il nous oblige toutefois à inscrire nos débats financiers dans une perspective pluriannuelle et, partant, à mieux mesurer le chemin à parcourir pour réduire nos déficits. Cela est hautement souhaitable. De fait, c'est grâce à la prise de conscience de l'ampleur du déficit de l'assurance vieillesse que l'opinion publique a compris la nécessité de la réforme des retraites. Je vous propose donc de donner un avis favorable à l'adoption de ce projet de loi tout en présentant plusieurs demandes au Gouvernement. Celui-ci doit s'engager à respecter les trajectoires et à corriger le tir au fil de l'année, comme le préconise le rapport Briet sur l'Ondam ; à rendre compte fidèlement au Parlement de l'évolution des recettes et des dépenses, notamment, en matière sociale, celle des dépenses hospitalières ; à poursuivre la tâche ardue de la maîtrise des dépenses et de la révision des niches, tant fiscales que sociales. A la commission de veiller à ce que le Gouvernement soit au rendez-vous de ses attentes en assumant pleinement ses missions de contrôle et d'évaluation. La tâche sera compliquée par la perspective des élections en 2012, mais nous devons donner au Gouvernement le sentiment que nous sommes vigilants.

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