Intervention de Henri Proglio

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 23 juin 2010 : 1ère réunion
Nouvelle organisation du marché de l'électricité — Audition de M. Henri Proglio président d'edf

Henri Proglio, président d'EDF :

Les modalités de définition du prix sont cruciales pour la survie de l'entreprise. Qui accepterait de perdre des parts de marché ? Comment imposer à ses collaborateurs des pertes de parts de marché décidées par la loi ou par un règlement ? Nous mettrons, sous la contrainte, une partie de notre production à disposition de nos concurrents, à un prix que vous déterminerez. Mais je me battrai pour qu'EDF ne perde pas de parts de marché dans un marché ouvert.

Mais tout de même... Imaginons que quelqu'un achète une vieille voiture, pour prendre une licence de taxi. Le coût de revient comptable de sa production, le coût marginal de la course, est très faible... jusqu'au jour où le véhicule est bon pour la casse. S'il vend sa course à ce coût comptable, alors ce chauffeur n'aura pas les moyens d'acheter une nouvelle voiture et disparaîtra. Il en va de même ici. L'outil industriel est aux trois-quarts amorti. Prendre en compte un coût de revient comptable est un non-sens total. Le coût de revient effectif est différent du coût de revient comptable. Il reste en moyenne une quinzaine d'années d'exploitation sur les centrales nucléaires. Vais-je m'efforcer d'obtenir un prolongement de leur durée de vie et dans le même temps m'engager à vendre pendant quinze ans la production à tel prix ? Prolonger la durée d'exploitation des centrales pourrait coûter 600 millions d'euros par tranche, soit un total de 35 milliards d'euros pour 58 tranches.

A l'issue d'une période transitoire de 15 ans, les centrales auront 15 ans de plus et l'outil de production et d'indépendance énergétique du pays sera compromis. Il faudra renouveler le parc, pour un coût, alors, de 4 milliards d'euros par tranche. Le coût de revient complet doit donc inclure le coût d'exploitation courante, la maintenance courante, le démantèlement, l'élimination des déchets, l'extension de la durée de vie. Il se situe entre 42 et 45 euros ; le niveau de 42 euros garantit la continuité avec le TaRTAM, mais n'enrichira pas EDF, et ne contribuera pas au financement des investissements liés au renouvellement des centrales. Je le dis solennellement. J'ajoute qu'un pillage par le biais d'un prix inférieur au coût de revient porterait un lourd préjudice à tous les acteurs économiques. De 42 euros, le prix doit être progressivement porté à 45 euros, point d'équilibre, incluant le coût de l'extension de durée de vie - mais non le coût du renouvellement.

J'en viens aux échanges d'information, ce n'est qu'a posteriori que nous saurons quels clients ont conclu un contrat avec nos concurrents. Quant aux contrats de gré à gré, ils ont surtout l'avantage d'être pluriannuels et de donner à chacun une meilleure visibilité à moyen terme.

La capacité de base est la plus importante et la pointe peut être couverte par des moyens différents. Je suis favorable aux conclusions du rapport Sido-Poignant.

Le taux de disponibilité n'est pas identique à la capacité de production, c'est un taux moyen sur une période, qui tient compte des arrêts programmés et subis. Plus le taux est élevé, meilleures sont la capacité théorique de production et l'efficacité économique de l'outil. Il faut apprécier la pertinence du taux en fonction de la saison. Par exemple, j'ai accepté que le taux soit réduit cet été afin que les centrales soient en fonction l'hiver prochain. J'ampute le taux à court terme mais j'améliore la situation économique du groupe. Un taux de disponibilité s'apprécie aussi au regard de l'utilisation qui est faite du nucléaire. Dans les pays où la part du nucléaire ne dépasse pas 20 ou 25 %, il est plus facile d'utiliser les centrales, en base seulement, à 90 %. Il n'y a pas de comparaison possible avec la France. Le meilleur taux jamais atteint par EDF est 83,5 % ; en 2009, nous étions à 78 %. Et je me suis engagé à porter ce taux à 85 % en cinq ans. Objectif ambitieux !

En 2009, le taux effectif faible a été dû aux mouvements sociaux. Je compte récupérer en 2010 les journées d'exploitation perdues en 2009. La maintenance a été renforcée, la gestion de proximité est plus efficace. L'effacement est un sujet important, il s'agit d'optimisation.

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