Intervention de Philippe Bas

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 3 mai 2006 : 1ère réunion
Familles monoparentales et familles recomposées — Audition de M. Philippe Bas ministre délégué à la sécurité sociale aux personnes âgées aux personnes handicapées et à la famille

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille :

Après avoir relevé la pertinence du thème d'étude choisi par la délégation, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a présenté quelques observations générales.

Il a tout d'abord souligné le nombre croissant des familles monoparentales, passé de 1 175 000 à 1 475 000 entre 1990 et 1999, ce qui correspond à une progression de 13 à 17 % de leur proportion au sein de l'ensemble des familles, près de 17 % des enfants vivant désormais sous le toit d'une famille monoparentale.

Le ministre a ensuite indiqué qu'avant transferts sociaux, 42 % des familles monoparentales étaient en dessous du seuil de pauvreté, alors que seulement 18 % des couples avec enfants sont dans la même situation. Il a estimé cette situation préoccupante, avant d'y apporter un correctif immédiat, puisque les transferts sociaux ramènent à 14 % la proportion de familles monoparentales en dessous du seuil de pauvreté. Le ministre a ainsi relevé la manifestation d'un puissant effet redistributif en faveur des familles monoparentales, notamment grâce à des prestations spécifiques, l'allocation de parent isolé (API) et l'allocation de soutien familial (ASF).

Au-delà de ces prestations dédiées aux familles monoparentales, il a souligné qu'un certain nombre de prestations à vocation générale étaient majorées à leur profit. Ainsi, a-t-il précisé, les plafonds de ressources applicables à la prime à la naissance ou à l'adoption et l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), le complément familial sont majorés d'environ 40 % en cas d'isolement ; en outre, l'aide personnalisée au logement (APL) ne subit pas de minoration dès lors qu'il y a isolement du parent et présence d'enfant(s). Au total, il a constaté que le système redistributif prenait très largement en compte l'objectif de soutien des familles monoparentales.

Puis, évoquant le cas douloureux des mères élevant seules un enfant handicapé, il a indiqué que l'allocation d'éducation spéciale (AES) était fortement majorée pour les personnes isolées.

ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, s'est dit convaincu qu'il convenait de soutenir les revenus des familles monoparentales grâce à ces allocations destinées aux parents isolés, mais qu'il était au moins aussi fondamental de leur faciliter l'accès à l'emploi. Rappelant qu'en 1976, l'allocation de parent isolé (API) avait été conçue pour éloigner du marché du travail les familles monoparentales que l'on appelait alors les « filles mères », il a souligné qu'il apparaissait aujourd'hui, au contraire, vital de faciliter l'accès à l'emploi des parents isolés, pour l'autonomie financière des mères et le développement de l'enfant. Il a manifesté la volonté que soient généralisées, d'ici à la fin de l'année, les actions déjà développées par certaines caisses d'allocations familiales pour accompagner les bénéficiaires de minima sociaux dans une démarche d'insertion, et rappelé que, dans le cadre de la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et devoirs des bénéficiaires de minima sociaux, est prévu un accès prioritaire aux structures de garde des enfants, d'autant plus nécessaire que les mères les plus en difficulté ont à la fois des enfants en bas âge et une formation insuffisante pour trouver facilement un emploi. Il a souhaité que l'API permette désormais de déboucher sur un emploi et non plus sur le RMI.

Le ministre a ensuite indiqué qu'à la suite de la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), le nombre des bénéficiaires d'une aide à la garde des enfants avait déjà augmenté de 205 000 et devrait avoir crû au total de 250 000 d'ici à la fin de l'année. Il a précisé que, par exemple, pour un revenu égal à deux fois le SMIC, l'aide accordée à la famille, qui était au maximum de 164 euros par mois avant la PAJE, pouvait désormais atteindre 254 euros par mois, ce qui correspond à une hausse de plus de 54 %. Il a également indiqué que le coût moyen de l'accueil d'un enfant en halte-garderie avait fortement diminué pour les familles monoparentales disposant de faibles ressources, passant pour une heure d'accueil, de 2 euros à 30 centimes.

Il a, en outre, fait observer que le taux du crédit d'impôt accordé au titre des frais de garde des enfants, qui s'élevait à 25 % pour les revenus de 2005, avait été porté à 50 % pour les revenus de 2006, ce qui va bénéficier à un million de familles.

Il a ajouté que le système du chèque emploi service universel (CESU) contribuerait à abaisser le coût de la garde des enfants.

Afin de permettre aux parents d'élever leurs enfants sans qu'il en résulte une coupure trop prolongée de leur activité professionnelle, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a rappelé qu'en complément du congé parental de trois ans rémunéré à 515 euros par mois, avait été créé un congé parental d'un an, plus court, mais rémunéré à 750 euros par mois, afin de limiter l'éloignement du marché du travail des parents et, en particulier, des mères, en raccourcissant sa durée.

Le ministre a en outre signalé, à l'intention des parents d'enfant(s) malade(s), un assouplissement du dispositif d'allocation de présence parentale, qui prend désormais la forme d'un crédit de 310 jours qui n'oblige plus le parent à prendre des périodes de congés indivisibles de quatre mois.

En ce qui concerne le développement des places de crèches, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a indiqué qu'à la suite du « Plan crèche » annoncé en juin 2005, la convention d'objectifs et de gestion conclue entre l'État et la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) avait vu ses crédits augmentés de 2,4 milliards d'euros et qu'un effort supplémentaire de 2 milliards d'euros était prévu dans les quatre ans à venir.

Au titre des difficultés rencontrées, le ministre a signalé les efforts de rigueur de gestion qui devront être accomplis pour que ces financements soient bien concentrés sur l'objectif de création de 72 000 places de crèche entre 2002 et 2008, ce qui permettra de faire passer le nombre total de places de 240 000 à 312 000. Rappelant que le nombre d'ouvertures de places de crèche n'avait été que de 264 en 2001 et qu'il avait progressivement augmenté pour atteindre 8 500 en 2005 et 10 000 en 2006, il a souhaité qu'une ouverture de 10 000 places de crèche par an puisse devenir la norme dans les prochaines années.

Il a ensuite évoqué le soutien aux familles monoparentales apporté par la branche famille de la sécurité sociale, en précisant qu'au titre des interventions de travail social, 37 % des bénéficiaires étaient des familles monoparentales, alors que celles-ci ne représentent que 17 % des familles, et que, parmi les bénéficiaires d'une intervention d'aide à domicile, 28 % étaient des familles monoparentales.

Evoquant ensuite la difficulté d'assumer l'autorité parentale pour les parents isolés, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a présenté les grandes lignes du projet de loi réformant la protection de l'enfance et du plan de prévention de l'enfance en danger. Il a précisé, en particulier, que les sages-femmes pourraient être amenées à aider les femmes en difficulté en allant au-delà du simple suivi médical et qu'un bilan de santé complet serait réalisé à l'entrée en maternelle. Le ministre a insisté sur l'objectif de fortification de la cellule familiale, qui doit s'attacher au perfectionnement de « l'art d'être parent ». Il a illustré cette nécessité en évoquant le cas dramatique des décès de « bébés secoués » dans un contexte d'exaspération des parents. Il a enfin commenté le mécanisme du « contrat de responsabilité parentale » qui sera proposé aux familles, notamment en cas d'absentéisme scolaire de l'enfant, en précisant notamment que ce dispositif se fondait, avant tout, sur une approche pragmatique d'accompagnement des familles en difficulté.

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