Intervention de Claude Domeizel

Réunion du 30 novembre 2006 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Claude DomeizelClaude Domeizel :

Tout le monde vous a alerté : la Cour des comptes, à travers tous ses rapports, a dénoncé la situation désastreuse et préoccupante de notre système de protection sociale ; les syndicats, vos partenaires, l'ont également dénoncée, et même les parlementaires de votre propre majorité, ici au Sénat.

Êtes-vous à ce point inconscient que vous n'avez rien vu venir ? Êtes-vous à ce point inconscient que vous avez pu prédire le retour à l'équilibre en 2007 sans rien prévoir, en toute logique, pour financer les nouveaux déficits auxquels la CADES, la caisse d'amortissement de la dette sociale, devra faire face en 2007 ?

Votre incapacité à anticiper et le bilan de votre gestion sont affligeants et inquiétants. Pour beaucoup moins, monsieur le ministre, des gestionnaires se font mettre à la porte - je pense d'ailleurs que les Français vont bientôt vous faire connaître ce sort ! Votre responsabilité quant à la faillite du système est pleine et entière.

Venons-en à ce projet de loi, qui, ainsi que vous le soulignez, monsieur le ministre, « préserve les principes républicains de notre protection sociale tout en la modernisant pour l'avenir ».

Où est l'avenir de notre système lorsque la dette s'élèvera à plus de 60 milliards d'euros en 2007 ? Où est l'avenir lorsque la CADES ne sera plus en mesure de prendre en charge le déficit ? Où est l'avenir lorsque le Fonds de réserve des retraites n'est plus alimenté et que le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA, n'arrive pas à sortir du tunnel ?

La perspicacité qui vous pousse à continuer d'affirmer l'embellie est tellement provocatrice que je ne peux m'empêcher de vous répondre.

Venons-en à ce texte, à l'arbre qui cache la forêt...

Le Sénat a eu la primeur - après l'Assemblée nationale, certes - de plusieurs dispositions qui nous laissent pour le moins dubitatifs ; il en est ainsi de celle qui nous impose le secteur optionnel, au détour d'un amendement que l'Assemblée nationale n'a même pas discuté.

Comme le relève le président de l'UNCAM, il s'agit là d'une immixtion du Gouvernement dans la discussion entre les partenaires sociaux, ce qui, soit dit en passant, va à l'encontre de vos déclarations sur la nécessité d'un dialogue social permanent, monsieur le ministre.

La mise en place d'un secteur optionnel, d'abord limité à la chirurgie, porte un coup au dispositif conventionnel. La convention de 1980, qui a créé le secteur 2, avait le mérite de permettre au patient d'y voir plus clair ; aujourd'hui, avec le secteur optionnel, vous prenez en otage les patients, l'assurance maladie et les organismes complémentaires. Ces derniers, je le rappelle, ne seront pas tenus de rembourser les dépassements d'honoraires.

En alignant sans contrepartie le tarif de remboursement des actes techniques des chirurgiens de secteur 2 sur ceux des chirurgiens du secteur 1, vous continuez d'introduire une médecine à deux vitesses et mettez les organismes complémentaires dans une situation difficile. Pour la première fois, le décrochage se généralise à des actes essentiels pour la santé des Français. L'inégalité devant les soins ne cesse d'augmenter : est-ce là ce qui vous permet de persister dans votre affirmation que les principes républicains de notre protection sociale sont respectés ?

Alors que le malaise dans le secteur de la chirurgie est réel, vous nous empêchez, par un amendement introduit à la va-vite au Sénat, de discuter du fond du problème. Vous nous imposez une mesure qui augmente la valeur des actes sans même que soit évoquée la question de leur qualité ni de leur opportunité. Vous procédez à l'envers : il aurait été plus logique et plus opérationnel de poser le problème de la prise en charge de ce secteur que de coller des rustines comme vous le faites ou, plus exactement, comme vous continuez de le faire. Le malaise n'est pas nouveau, on le connaît !

Alors, pourquoi avoir atermoyé pour finalement déposer une disposition de dernière minute qui ne résoudra pas le problème au fond et conduira l'assurance maladie à continuer de financer des pratiques en crise ? C'est ainsi que l'on finit par arriver à des déficits qui avoisinent les 60 milliards d'euros !

Et que dire de l'amendement de notre collègue Alain Vasselle concernant le champ conventionnel ? Déposé avec l'aval du Gouvernement, il balaye l'opposition des syndicats médicaux hostiles à la convention, qui sont majoritaires depuis les dernières élections. Seuls compteront désormais les syndicats représentatifs aux yeux du Gouvernement, au mépris du suffrage universel !

Vous avez justifié cette mesure en arguant du fait qu'elle corrigeait une malfaçon du texte de 2004. Mais alors, pourquoi avoir attendu le dernier moment ? Pourquoi avoir attendu la fin des élections ? Pourquoi ne pas l'avoir fait avant ?

Il me semble pourtant que le Conseil économique et social vient de proposer, après la demande qui lui en a été faite par M. de Villepin, que la représentativité des syndicats s'apprécie essentiellement au vu des résultats obtenus aux élections ! Le Conseil constitutionnel jugera si l'on peut continuer à se jouer de telle façon de la démocratie !

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