Intervention de Michel Billout

Réunion du 9 avril 2010 à 22h00
Grand paris — Article 17

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

L’article 17 traite de la gestion des infrastructures du Grand huit une fois leur réception actée par la Société du Grand Paris, maître d’ouvrage de ces projets, en lieu et place du STIF.

Cette modalité proposée par cet article relatif à la gestion de ce patrimoine confirme le choix opéré dans la loi du 8 décembre 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports : les infrastructures sont confiées à la RATP et le matériel roulant au STIF. Cette répartition est en effet issue de l’adoption d’un amendement présenté en catimini à l’Assemblée nationale, qui a conduit à une spoliation du STIF par la cession d’un patrimoine qui est estimé entre 1, 5 milliard et 8 milliards d’euros.

Nous l’avons combattue en novembre dernier, nous continuons donc à nous opposer à cette orientation qui constitue un véritable déni de démocratie, a fortiori lorsque l’avenir public de la RATP est si incertain.

Sur le fond, nous estimons que cette solution pose problème. Le financement de la gestion du Grand huit va prendre une part importante des ressources du STIF, alors même que celles-ci sont aujourd’hui en souffrance.

Depuis de nombreuses années, par exemple, nous demandons l’augmentation du taux du versement transport. Aujourd’hui, la commission Carrez a abouti à la même conclusion. Quand allez-vous enfin consentir à l’adoption d’une telle mesure ?

Les estimations qui sont aujourd’hui réalisées indiquent que la région et les collectivités territoriales devraient doubler leur versement au STIF pour permettre de financer ce Grand huit.

Nous considérons qu’il existe aujourd’hui d’autres priorités de financement, notamment le plan de mobilisation des transports en Île-de-France de 18 milliards d’euros, dont la mise en œuvre demeure plus qu’incertaine.

Nous craignons donc que ce Grand huit, dont la pertinence n’est pas prouvée, n’absorbe l’ensemble des ressources du STIF, au détriment du reste. Or, aujourd’hui, il existe un besoin immense en termes de régénération et d’entretien. Les réseaux sont saturés et vétustes – cela a été rappelé à de nombreuses reprises –, et le matériel est souvent défectueux malgré les efforts réels de la région. De quelle marge de manœuvre disposera le STIF pour faire ces nécessaires investissements ?

Rien ne sert d’inaugurer à grand renfort médiatique la naissance d’un nouveau projet, alors même que les conditions actuelles sont si mauvaises en raison du désengagement massif de l’État. Les Franciliens n’ont pas besoin de savoir qu’il existera dans quinze ans de nouvelles lignes, ils ont besoin que leurs problèmes quotidiens de transports soient rapidement résolus.

Qu’a fait l’État pendant tout ce temps, si ce n’est se désinvestir, organiser les conditions de la mise en concurrence des transporteurs et des modes de transports entre eux ? Vous voyez aujourd’hui les conséquences particulièrement négatives de cette conception libérale de la gestion des services publics de transports urbains. Or vous souhaitez aller encore plus loin.

À l’inverse des remises en cause actuelles de la séparation entre RFF et la SNCF, qui n’a pas, loin s’en faut, fait la démonstration qu’elle constituait un progrès, vous prônez dans cet article le même schéma pour la RATP, en séparant les activités d’opérateur de celles de gestionnaire d’infrastructures.

En outre, nous savons très bien que cette séparation, même comptable, est toujours le prélude à l’ouverture à la concurrence. Or, dans la loi relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires, cette ouverture à la concurrence pour le métro n’est prévue qu’en 2039.

Pourquoi un tel zèle, surtout qu’en aucune manière le règlement OSP n’imposait cette mise en concurrence ? Pourquoi ne pas avoir contraint la RATP à limiter ses activités à la région parisienne ? Est-il si important de lui permettre de se développer à l’international pour se comporter comme n’importe quel opérateur privé ? Comment ne pas voir qu’une telle conception va nécessairement aboutir à une guerre fratricide entre la SNCF et la RATP ?

Je vous demande, mes chers collègues, un peu de pragmatisme et de sérieux sur ces questions. Ne prenons pas de décisions avant que toutes les hypothèses soient instruites et gardons-nous de démanteler encore un peu plus le service public des transports urbains.

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