Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dette publique française représente près de 1 700 milliards d’euros, soit 85, 5% de notre PIB. Ainsi, il faudrait près de sept années consécutives de recettes fiscales pour rembourser notre dette : sept années sans financer aucune mission, sans financer le moindre service public… Finalement, c’est peut-être la raison pour laquelle la majorité du Sénat rejette les crédits de presque toutes les missions !
Qui plus est, ce chiffre ne prend pas en compte nos engagements hors bilan, à savoir les 1 200 milliards d’euros destinés à assurer, d’ici à quarante ans, le financement des pensions, les 313 milliards d’euros de garantie de l’épargne et les garanties bancaires accordées dans le cadre du démantèlement du groupe Dexia.
Concernant les banques, je souhaite apporter un témoignage personnel. Au plus fort de la crise, à l’automne 2008, j’étais vice-président de l’Institut mondial des caisses d’épargne, qui réunit 110 établissements financiers dans 92 pays. De nombreux opposants critiquaient avec une ironie certaine et des allégations mensongères le gouvernement français, qui osait apporter sa garantie aux banques, pour leur permettre d’emprunter sur les marchés, en prenant parallèlement des participations dans le capital de plusieurs établissements bancaires, afin de renforcer les fonds propres de ces derniers.
Comme le souligne le rapport spécial, le groupe Banques populaires-caisses d’épargne, BPCE, a procédé le 23 mars dernier au dernier remboursement de cet apport. L’État a ainsi réalisé un « bénéfice » de 2, 4 milliards d’euros par la perception d’intérêts progressifs en 2009 et 2010.
Il convient de souligner la pertinence du plan français, qui a permis de stopper le vent de panique qui commençait à souffler, d’autant que ce plan s’avère aujourd’hui profitable alors que, dans la plupart des pays voisins, c’est par dizaines de milliards d’euros que les contribuables ont été sollicités.
Après cette digression, j’en reviens à la gestion de ce stock faramineux de dette publique qui nous impose davantage d’efforts dans un contexte économique contraint.
En 2012, la charge de la dette, avec 48 milliards d’euros, soit plus que les recettes de l’impôt sur les sociétés, représentera une nouvelle fois le deuxième poste de dépenses de l’État. Il faudrait parvenir à une croissance de 2, 5 % pour résorber les intérêts de la dette. Or les prévisions de croissance ne sont pas favorables. Le remboursement des emprunts ne peut plus se concevoir comme un pari sur l’avenir. Il est déraisonnable d’emprunter pour rembourser les intérêts de la dette. Une telle fuite en avant ne pourra être arrêtée que par la conduite d’une politique courageuse de réduction des dépenses.
Comme l’a rappelé Valérie Pécresse, « notre pudeur dût-elle en souffrir, nous sommes scrutés » : nos créanciers nous surveillent et exigent de nous de la crédibilité dans nos prises de décision. Nos taux de financement de long terme comme de court terme tendent à augmenter, illustrant la défiance ambiante. Les marchés sont fébriles, notre croissance économique patine et nous nous apprêtons à émettre près de 182 milliards d’euros de bons du Trésor sur les marchés.
Je persiste à croire que nos fondamentaux sont encore fiables et solides et qu’ils nous permettront de ne pas perdre la qualité supérieure que chacun reconnaît à notre signature.
En 2008, le Conseil d’analyse économique a présenté un rapport faisant état des crises de dettes souveraines dans les pays en voie de développement. Nous pensions être à l’abri d’une crise argentine ou d’une crise russe, a fortiori en tant que membre de la zone euro. Nous savons aujourd’hui que ce risque existe et qu’il faut nous résoudre à prendre les mesures nécessaires pour aller, au-delà de la seule gestion de la dette, vers un désendettement durable.
La crise qui est devant nous est d’ordre politique ; elle nous imposera d’adopter des dispositions courageuses pour enrayer la spirale dans laquelle nous sommes entraînés. Le Gouvernement a pris des engagements importants en matière de réduction des déficits publics, de façon à ce que nos créanciers nous conservent leur confiance ; à nous maintenant d’accorder la nôtre !
Telles sont les raisons pour lesquelles les sénateurs du groupe de l’Union centriste et républicaine voteront les crédits de cette mission.