Ainsi, le traité de Maastricht a introduit, au sein du traité de Rome, une nouvelle partie relative à la « citoyenneté de l’Union ». Il a donc instauré, au niveau européen, une nouvelle citoyenneté supranationale conférant, dans l’État membre de résidence, des droits de vote et d’éligibilité pour les élections municipales.
On voit bien dès lors toute la spécificité des dispositions issues de l’article 88-3 de la Constitution. Cela me conduit à une conclusion parfaitement opposée à celle de Mme la rapporteure, Esther Benbassa, qui écrit dans son rapport que « la différence de traitement qui existe aujourd’hui entre les étrangers européens et les autres étrangers n’est plus compréhensible ».
Pourquoi ne serait-elle plus « compréhensible » ? À mon sens, au contraire, nos concitoyens comprennent parfaitement que l’Europe constitue une communauté de territoire, une histoire, un destin commun. Ils savent également que nous ne partageons avec les étrangers non communautaires ni le même passeport commun ni la même souveraineté.
Nous avons beaucoup plus de proximité avec les Européens qu’avec les habitants des autres continentsPermettez-moi de rappeler ici ce que déclarait très justement notre collègue Philippe Bas lors de nos passionnants débats au sein de la commission des lois : « L’Union européenne, ce n’est plus tout à fait l’étranger. »
En outre, si le système proposé par le texte se rapproche de celui proposé à l’article 88-3 de la Constitution, il s’en écarte sur un point fondamental : la réciprocité.
En effet, mes chers collègues, avec votre proposition de loi constitutionnelle, un étranger pourrait voter en France aux municipales, mais rien ne garantirait qu’un Français vivant dans le pays d’origine de cet étranger pourrait en faire autant. N’y a-t-il pas là une incohérence ? Voire une injustice ? C’est en tout cas ce que penseraient la plupart de nos concitoyens.
Avec tous les sénateurs de mon groupe, je réaffirme que ce débat a lieu aujourd’hui dans un climat parfaitement inadapté. On ne modifie pas une règle fondamentale de notre démocratie, de notre République, en quelques heures de débat, et à quelques mois seulement de l’élection présidentielle.