Pour vous, le vote est la marque de la nationalité. Ainsi ne seraient citoyens que les Français, ce qui implique que les étrangers souhaitant participer à l’exercice démocratique soient progressivement assimilés pour finir par être français.
À l’inverse, nous estimons que l’on doit demander aux étrangers de s’intégrer dans notre système, ce qui implique de partager valeurs et principes, de connaître usages et langue, mais n’impose pas une acculturation complète ni une assimilation parfaite. Nous croyons que la diversité de notre pays fait sa richesse et participe de son dynamisme à l’échelle mondiale. Dans un contexte de « globalisation », c’est bien par le partage, le métissage, que nous serons plus forts, plus à même d’être réceptifs et efficaces face aux mutations économiques et sociales.
L’inclusion des étrangers permet donc l’existence d’une société unie et solidaire, mais encourage également le maintien d’une diversité gage de vitalité pour cette société.
Ce sont l’uniformité et l’homogénéité qui brisent la créativité. La proposition de loi constitutionnelle présentée aujourd’hui assure ainsi un respect de l’étranger dans sa singularité et son inclusion dans la société, par le processus de participation à nos grands moments de démocratie locale.
Nous souhaitons une démocratie plus vivante, facteur d’inclusion.
Mes chers collègues, la liberté, c’est donner aussi à ceux qui vivent sur notre sol ce droit élémentaire de participer à la vie de la Cité. L’égalité, c’est lutter contre tout ce qui l’entrave et qui reste toujours un combat. La fraternité, c’est ce mot du cœur qui se passe de définition.
Au nom de ce triptyque républicain, ce droit de vote marquera d’une manière certaine l’enracinement par l’exercice démocratique comme l’aboutissement d’un enracinement symbolique.
On a beaucoup parlé de communautarisme. Il est vrai que plus on donnera à ces personnes l’impression qu’elles ne sont pas les bienvenues dans notre pays, plus on dira, par exemple, que l’islam est une idéologie à combattre et non une spiritualité, en d’autres termes, plus on continuera la politique actuelle, et plus on donnera de l’eau au moulin de ceux qui souhaitent une plus grande radicalité, qu’ils soient islamophobes ou extrémistes, car les uns se nourrissent des autres.
En la circonstance, le problème réside bien dans notre attitude, et non dans celle des étrangers.
Au lieu de brandir le chiffon rouge du communautarisme, et plutôt que d’attiser les peurs – celles de l’Autre, de l’immigré, que Milan Kundera qualifiait de « grand souffrant », des crises de toute sorte – n’allons pas renoncer, sous prétexte que le pays est en crise, à des avancées démocratiques.
Préférons promouvoir nos valeurs, et notamment faire œuvre de pédagogie pour l’une d’entre elles, à mes yeux cardinale : la laïcité, matrice de nos identités plurielles, et espace de concorde qui nous permet de vivre ensemble au-delà de nos différences.
La citoyenneté de résidence donnera des droits, et nous pourrons alors être plus exigeants quant au respect de ce qui fonde notre pacte républicain.
Mes chers collègues, il ne s’agit pas « de reconnaître des égaux, mais d’en faire ».
Si « la politique, c’est de porter sur soi le destin d’autrui », alors, en votant ce texte, nous porterons sur nous le destin de ceux qui vivent sur notre sol et qui partagent bien souvent une histoire commune, pour construire ensemble un avenir commun.
C’est la raison pour laquelle, comme notre collègue Jacques Mézard, j’en appelle au courage et souhaite que notre Haute Assemblée franchisse une nouvelle étape, assurant aux étrangers cette citoyenneté de résidence qui est gage d’une plus grande inclusion dans notre société, gage de sa vitalité et de son ouverture au monde.