Intervention de Nicole Bonnefoy

Réunion du 20 décembre 2011 à 16h20
Droits protection et information des consommateurs — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Nicole BonnefoyNicole Bonnefoy, rapporteur pour avis :

Nous avons réellement pu travailler de concert, mon rôle étant, bien sûr, de faire état des préoccupations propres à la commission des lois.

L'une des principales innovations du texte est la création de sanctions administratives prononcées par la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Ces sanctions interviendraient principalement à l'encontre de pratiques ne faisant l'objet d'aucune sanction pénale ou entraînant seulement des contraventions.

Je tiens à souligner que, contrairement aux chiffres fournis par l'étude d'impact du projet de loi, les manquements des professionnels au droit de la consommation sont poursuivis. En 2009, plus de 3 000 condamnations pour des infractions aux règles de la protection économique des consommateurs et 1 500 en matière de sécurité et de conformité des biens et services ont ainsi été prononcées.

La seule justification recevable des sanctions administratives est celle de la réactivité et de l'efficacité de la mesure. Permettre à la DGCCRF, qui mène l'enquête et dresse le procès-verbal de l'infraction, de prononcer une amende administrative donne plus de poids à son contrôle et lui permet de mieux jouer son rôle d'autorité régulatrice des pratiques commerciales et de la protection des consommateurs.

Malgré, je l'admets, une réticence initiale, motivée par la perte de la force symbolique attachée à la sanction pénale prononcée par le juge, j'estime que la création de sanctions administratives est, dans son principe, justifiée. La question qui continue, en revanche, à se poser est celle des modalités retenues.

En effet, les sanctions administratives n'obéissent pas au même régime que les sanctions pénales. En particulier, les garanties apportées au justiciable sont moindres dans le cadre d'une procédure administrative que dans celui d'une procédure pénale. Or il ne faudrait pas que, demain, la répression administrative des manquements au droit de la consommation soit plus sévère que la répression pénale actuelle de ces mêmes manquements alors que les garanties sont moindres. Il faut trouver un équilibre entre l'exigence d'une sanction efficace des infractions au droit de la consommation et celle du respect des droits des professionnels condamnés.

Ainsi, sur l'initiative de la commission des lois, le texte étend désormais aux amendes administratives les règles de cumul applicables aux amendes pénales. En dessous de 3 000 euros, les peines d'amendes pourraient se cumuler sans limite. En revanche, au-delà de 3 000 euros, les peines d'amendes ne pourraient se cumuler que dans la limite du montant maximum de l'amende encourue, conformément à ce que prévoit l'article 132-4 du code pénal. De même, nous avons veillé à respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le cumul, pour une même faute, d'une sanction pénale avec une sanction administrative : la somme des deux amendes doit être inférieure à l'amende maximale encourue.

Pour garder une forme de publicité de la sanction, la commission des lois a proposé que les sanctions administratives fassent l'objet d'une publication. En effet, il convient d'alerter les consommateurs sur le manquement d'un professionnel. La condamnation pénale est publique ; rien ne justifie que la sanction administrative soit cachée.

En principe, les sanctions administratives peuvent être contestées devant le juge administratif. L'Assemblée nationale a toutefois prévu que, par exception, les sanctions relatives aux clauses abusives et aux manquements à l'obligation d'information du consommateur fassent l'objet d'un recours devant le juge judiciaire. Il s'agissait de conserver à ce dernier, juge naturel du droit de la consommation, sa compétence pour ces contentieux particuliers. Cette exception est pertinente. Toutefois, elle pose des problèmes d'articulation des contentieux, sources d'inextricables difficultés. Nous avons donc proposé un mécanisme pour remédier à cette faiblesse.

J'ai aussi constaté que, s'il renforce les pouvoirs d'enquête de la DGCCRF et lui ouvre de nouvelles actions, telle que la possibilité de saisir le juge judiciaire pour qu'il ordonne le blocage d'un site internet, le texte aurait pour effet de permettre à cette direction de saisir le juge de manquements qu'elle n'a pas le droit de constater par procès-verbal. Nous avons donc veillé à mettre en conformité le champ d'application de ces nouvelles dispositions et celui des missions de la DGCCRF.

Monsieur le secrétaire d'État, l'attribution de ces nouvelles prérogatives suppose que la DGCCRF soit en mesure de les exercer. Or le moins que l'on puisse dire est que les crédits de fonctionnement et les effectifs de cette direction, tant en administration centrale que dans les services déconcentrés, ont beaucoup diminué ces dernières années. Il existe sans doute des limites à la capacité de faire plus avec moins.

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