Intervention de Charles Guené

Réunion du 2 avril 2008 à 22h00
Marchés d'instruments financiers — Adoption d'un projet de loi

Photo de Charles GuenéCharles Guené, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant toute chose, nous devons nous demander s'il s'agit d'une simple formalité.

Le présent projet de loi ratifiant l'ordonnance relative aux marchés d'instruments financiers d'outre-mer peut, de prime abord, apparaître comme une simple formalité, dès lors qu'il s'agit simplement d'étendre pleinement à l'outre-mer une législation européenne déjà transposée pour la métropole.

L'exercice apparaît d'autant plus théorique que - on a tout lieu de le croire - peu d'opérations interviendront dans ces territoires et que la réglementation trouvera peu de cas d'application, si ce n'est dans la nouvelle segmentation et le traitement de la clientèle.

Et pourtant, ce texte doit nous amener à réfléchir sur l'organisation des marchés financiers au regard de la crise actuelle.

En effet, ce n'est pas un moindre paradoxe de voir que l'on est ainsi conduit à parachever la transposition en droit français de la directive sur les marchés d'instruments financiers, dite directive MIF, au moment où, du fait de la crise des subprimes, on s'interroge sur la stabilité du système financier mondial et sur l'adéquation de notre mode de régulation.

J'en viens au contexte et aux enjeux. Je commencerai par un peu d'histoire.

C'est la loi du 20 juillet 2005 qui avait habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour transposer la directive MIF.

Cette directive remplace la directive concernant les services d'investissement, ou DSI, adoptée en 1993. Elle tend à faciliter la concurrence dans les services d'investissement en participant à la construction d'un marché de capitaux plus intégré et plus efficace.

Le délai d'habilitation, initialement fixé à dix-huit mois, aurait dû expirer le 20 janvier 2007.

En fait, profitant de la loi du 20 février 2007 portant diverses dispositions intéressant la Banque de France, la commission des finances était intervenue pour prolonger ce délai.

Par la même occasion, elle avait assoupli le dispositif initialement adopté en vue d'encadrer plus précisément le champ de l'habilitation pour se contenter de prévoir que la transposition comporte « les mesures tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés financiers. »

Dans les faits, le nouveau régime s'applique pleinement depuis le 1er novembre 2007. Le présent projet de loi vient donc simplement en étendre l'application à certaines collectivités d'outre-mer.

Cela correspond en fait à la fin du monopole des marchés réglementés.

Il faut rappeler que la philosophie de la directive MIF, qui introduit un principe général de concurrence, marque une rupture avec une certaine tradition française des marchés financiers, alors que, jusqu'à présent, la France se caractérisait par le principe de la concentration des ordres sur un marché réglementé.

La contrepartie de cette libéralisation est la mise en place d'une série de garde-fous reposant notamment sur l'obligation faite aux opérateurs de se conformer à des codes de conduite et à de meilleures pratiques.

Qu'est-ce que cela change pratiquement ?

Concrètement, les ordres de bourse peuvent désormais être négociés sur des lieux d'exécution différents : sur un marché réglementé traditionnel, sur un MTF - Multilateral Trading Facilities ou systèmes multilatéraux de négociation - ou encore par internalisation de l'ordre sur le compte propre de l'intermédiaire, ce dernier se portant alors contrepartie.

On ne sait pas, à l'heure actuelle, si les systèmes multilatéraux de négociation pourront concurrencer les plateformes généralistes traditionnelles ou s'ils se contenteront de marchés de niches. Relevons simplement que le projet Turquoise lancé par sept banques d'investissement et rejoint par BNP Paribas et Société Générale n'a toujours pas démarré.

En outre, la directive harmonise les conditions d'exercice des prestataires de services d'investissement au travers de l'Union européenne en modernisant le « passeport européen ».

Enfin, la directive instaure une obligation de classification et d'information des clients.

J'en viens aux mesures de transposition spécifiques à certaines collectivités territoriales d'outre mer.

L'ordonnance du 18 octobre 2007, dont le présent projet de loi prévoit la ratification, comporte quinze articles que l'on peut scinder en deux parties distinctes selon leur objet : la première partie tend à compléter l'ordonnance du 12 avril 2007 ; la seconde partie adapte les dispositions de la même ordonnance aux collectivités d'outre-mer, où elle n'était pas applicable du fait du principe de spécialité législative.

Le cas de Mayotte, soumis au principe d'identité législative depuis le 1er janvier 2008, appelle toutefois un traitement particulier et justifie deux amendements de la commission.

Permettez-moi de conclure en faisant de la prospective. Ainsi, vous sentirez le souffle de l'inspiration du rapporteur général !

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