Intervention de Christian Favier

Réunion du 20 février 2012 à 15h00
Refonte de la carte intercommunale — Adoption définitive en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Christian FavierChristian Favier :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la lecture des propositions émises par l’Assemblée nationale pour assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, on serait tenté de dire : « Tout ça pour ça », tant ce texte a minima est décevant au regard des interrogations soulevées par le volet concerné de la réforme des collectivités.

Monsieur le ministre, après la cuisante défaite de votre camp aux élections sénatoriales, d’ailleurs due en grande partie à la colère des élus locaux contre votre réforme bâclée et autoritaire, après l’excellent travail de notre collègue Jean-Pierre Sueur et de la majorité du Sénat, vous avez envoyé en catastrophe le pompier Pélissard pour tenter d’éteindre l’incendie à la veille d’un nouveau scrutin périlleux.

Les quelques assouplissements proposés à la loi du 16 décembre 2010 ne font évidemment pas le compte et ne répondent que très partiellement au désaveu infligé par les commissions départementales de coopération intercommunale à votre procédure.

Dans le tiers des départements, les préfets, malgré les moyens de pression dont ils disposent sur les maires des petites communes, n’ont pas réussi à imposer leurs vues au sein des commissions départementales. Ils ont échoué dans la mise en œuvre de cette réforme phare du Président de la République.

Dans ces conditions, le Gouvernement hésite aujourd’hui à passer en force en mettant en œuvre les procédures prévues.

En effet, les articles 60 et 61 de la loi du 16 décembre 2010 prévoient déjà le cas de figure où la CDCI n’adopterait pas le schéma départemental de coopération intercommunale.

Le préfet peut alors malgré tout prendre les arrêtés de création, de modification de périmètres ou de fusion d’intercommunalités et de suppression ou de modification de périmètres de syndicats intercommunaux. Si ces arrêtés correspondent au projet qu’il a soumis à la CDCI, il n’a pas l’obligation de saisir à nouveau la commission, mais rien ne lui interdit de le faire. Et si ses arrêtés diffèrent de son projet initial, il a l’obligation de saisir la CDCI.

Or, si les schémas n’ont pas été adoptés dans certains départements, c’est bien en raison du désaccord de la CDCI sur les périmètres d’intercommunalités et sur les modifications des syndicats proposés par les préfets.

Dans ces conditions, si le préfet prend en compte ces divergences et propose des arrêtés qui répondent aux attentes de la commission, ces documents ne correspondront plus à son projet initial. Ce faisant, la consultation des CDCI devient obligatoire.

Finalement, nous venons de le voir, cette proposition de loi se limite à un aménagement à la marge des procédures d’élaboration des schémas départementaux. Grâce à elle, les préfets disposeront d’une année supplémentaire pour obtenir l’accord des commissions départementales sur leur projet.

Toutefois, au final, en cas de désaccord persistant, il n’y a pas de changement. Ils pourront toujours imposer leur vision, entre le 1er janvier et le 1er juin 2013. C’est donc toujours le poids du préfet qui reste déterminant, au détriment du rôle des élus et des CDCI.

Pour notre part, nous ne pouvons pas accepter cette frilosité persistante à l’égard des élus – le sujet, je le rappelle, les concerne tout de même au premier chef – et cette mainmise autoritaire des préfets.

Ainsi, cette proposition de loi ne remet nullement en cause les objectifs et les modalités de réalisation de la refonte de la carte intercommunale, visant au regroupement à marche forcée des structures intercommunales au nom d’une rationalisation autoritaire et technocratique, ce qui est loin d’être une priorité pour nos concitoyens.

Or c’est justement cette politique qui est aujourd’hui rejetée dans un grand nombre de départements ; certains n’ont pas adopté leur schéma départemental et beaucoup d’autres ont remis en cause les projets de regroupement qui leur étaient proposés.

Ainsi, après les très légères modifications des articles 60 et 61, que nous venons de voir, cette proposition de loi précise que les schémas départementaux seront revus dès 2015. Sont-ils si mauvais que leur révision doive être si rapide ?

Une autre modification apportée concerne le maintien, en certaines circonstances, des élus communautaires jusqu’à la fin de leur mandat, en 2014. Il s’agit là d’une mesure d’attente, respectueuse des élus communautaires qui sont actuellement en activité. C’est une bonne chose. Nous avions nous aussi demandé cette mesure.

Les autres modifications apportées par ce texte visent les pouvoirs de police, qui sont transférés automatiquement aux présidents des intercommunalités, dans le cadre d’un transfert de compétences d’une commune vers un EPCI.

Nous sommes opposés à ce principe d’automaticité du transfert qui figure actuellement dans la loi. À notre avis, les maires doivent décider de la transmission de leur pouvoir de police de manière volontaire.

Aussi, nous n’allons pas autoriser aujourd’hui un président d’intercommunalité à refuser d’assumer les pouvoirs de police qui lui sont transférés du fait qu’un certain nombre de maires reprendraient leurs pouvoirs.

Au fond, cette mesure ne fait que conforter le rôle primordial des présidents d’intercommunalité. Elle leur permettrait même de faire pression sur les maires « récalcitrants ».

Enfin, la dernière mesure proposée vise à permettre, par dérogation, la mise en place de syndicats intercommunaux dans certains domaines, par-delà le périmètre des EPCI.

Le Gouvernement s’est enfin rendu compte qu’il y avait un risque de blocage, en particulier dans le cadre scolaire.

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