Intervention de Philippe Leroy

Réunion du 14 février 2012 à 14h30
Aménagement numérique du territoire — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe LeroyPhilippe Leroy :

On cite souvent les Hauts-de-Seine comme un mauvais exemple. On prétend en effet que les initiatives du conseil général des Hauts-de-Seine sont dramatiques parce qu’elles ont pour conséquence une surabondance de réseaux. Il est vrai que ce département compte trois ou quatre réseaux à très haut débit, tandis que certains départements ne disposent pas encore des 6 mégabits indispensables.

Face à de telles disparités, et sachant que les élus ont une compréhension très variable de ces problèmes, ces schémas locaux étaient nécessaires. Ils sont à mettre au crédit de la « loi Pintat », de même que la création d’un fonds d’aménagement numérique des territoires.

Nous le savons tous, mes chers collègues, si nous voulons gagner cette bataille, nous devrons compléter les initiatives privées, que nous souhaitons les plus nombreuses possibles, par des crédits publics émanant des collectivités, de l’État ou de l’Europe.

Nul ne peut juger raisonnable de confier aux seules initiatives privées le soin d’équiper toute la France, y compris les zones insuffisamment peuplées pour être rentables. Il est donc nécessaire d’introduire des idées de péréquation et de mutualisation, et c’est pourquoi ce fonds d’aménagement numérique des territoires me semble bienvenu.

Mais, au-delà, il faudra aussi réfléchir au modèle économique général. En effet, on ne parle jamais du chiffre d’affaires des télécommunications, ni des profits tirés de l’exploitation des réseaux de télécommunication. À y regarder de plus près, on constaterait pourtant que les masses d’argent qui sont en jeu sur ces marchés dépassent, et de loin, les 20 milliards à 25 milliards d’euros nécessaires pour moderniser le réseau de télécommunications, sommes que l’on considère parfois comme exagérées.

Nous devons aujourd’hui nous rendre à l’évidence : si nous voulons éviter une fracture numérique sur la fibre optique à l’abonné et, partant, une division de la France, il nous faut inventer un nouveau « PPP fibre optique », un nouveau partage, une nouvelle mutualisation des moyens entre le public et le privé. Nous devons avancer prudemment et bâtir un partenariat public-privé de qualité, qui permettra de servir convenablement tous les Français et de donner tort à tous ceux qui ne voient dans les PPP que des PPPP : « profits privés, pertes publiques ». §

Il s’agit, monsieur le secrétaire d’État, d’éviter que les bonnes intentions de l’État et des collectivités locales ne soient trahies, car tous les Français souhaitent le déploiement du très haut débit.

Nous devons éviter les coups de frein multiples de ceux qui veulent préserver leurs rentes sur le fil cuivre et de ceux qui veulent réserver les investissements aux zones privilégiées, des aides aux investissements étant octroyées aux zones pauvres.

Nous devons au contraire accélérer le processus d’installation de la fibre optique sur toute la France. Aujourd’hui, nous constatons que les initiatives privées annoncées sont loin de correspondre aux attentes de M. le ministre de l’industrie, ce qui prouve au demeurant que le fil cuivre est encore très intéressant et que les paris sur la rentabilité de la fibre optique ne sont pas encore tous gagnés.

Voilà un an, M. le ministre affirmait vouloir faire le bilan des propositions des opérateurs privés en matière de déploiement de la fibre optique au 1er février 2012. Or, aujourd’hui, les intentions réelles d’investissement sont peu nombreuses. Certes, cela ne nous empêche pas de dresser un état des lieux, mais, si nous comptons seulement sur les initiatives privées, et au regard des sommes annoncées, il nous faudra cinquante ou cent ans pour aboutir !

Je n’accuse personne, mais, avec d’autres, je dis que nous devons agir pour éviter une réelle fracture numérique en matière de fibre optique, ce qui constituerait une profonde déception pour tous les territoires laissés à l’abandon, notamment les zones rurales, les zones peu peuplées et les zones pavillonnaires autour des villes.

Ainsi, dans mon département, et alors même que les agglomérations de Metz et de Thionville ont reçu des promesses d’investissements de la part des grands opérateurs, je sais que toutes les communes de ces deux agglomérations ne seront pas servies, à tel point que certaines intercommunalités envisagent de financer elles-mêmes des réseaux de fibre optique, constatant la carence des opérateurs privés, en l’occurrence Numéricable, France Télécom et SFR.

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