Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 14 novembre 2009 à 15h15
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 29 bis

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre :

La seule possibilité juridique immédiate consiste à agir sur le terrain du droit des marques. En effet, la directive 2008/95/CE rapprochant les législations des États membres sur les marques autorise la dérogation recherchée. Ainsi, nous nous trouverions en parfaite conformité avec le droit européen, sous certaines conditions bien entendu. Il faudrait notamment que l’usage de la marque ne donne pas l’impression qu’il existe de lien commercial entre le tiers et le titulaire de la marque, soit entre le laboratoire commercialisant le médicament générique et l’exploitant du médicament princeps. Cette condition me paraît tout à fait essentielle.

L’INPI relève également l’inadaptation de l’expression « caractères organoleptiques ». Je l’ai déjà indiqué, ce terme est beaucoup trop général. Je crois aussi que tout le monde s’accorde à dire que cette dénomination englobe des caractères impossibles à protéger juridiquement, comme l’odeur ou le goût. L’INPI recommande donc de mentionner uniquement l’« aspect tridimensionnel » et la « couleur » de la forme pharmaceutique. Cette solution me semble, là aussi, de simple bon sens !

L’INPI note enfin que le code de la propriété intellectuelle constitue le seul vecteur juridique adapté. Il propose d’y inclure un nouvel article L. 713-6-1 tendant à permettre que ne soit pas opposée aux médicaments génériques substituables la protection dont peut bénéficier, au titre du droit des marques, le médicament princeps quant à son aspect tridimensionnel et sa couleur.

Je voulais apporter d’emblée ces précisions, car mon argumentation sur les sous-amendements de M. Gilbert Barbier et de M. Nicolas About ainsi que sur l’amendement présenté par M. Alain Houpert en découlera.

Monsieur Barbier, votre sous-amendement tend à instaurer une exception à cette levée des droits lorsque le caractère réel et utile de la nouvelle présentation a pu être établi. Vous craignez en effet une atteinte aux droits de la propriété intellectuelle qui affecterait notamment les petites entreprises pharmaceutiques – il en reste tout de même quelques-unes sur le territoire national !

C’est précisément l’objet du sous-amendement que j’ai présenté. J’ai essayé de trouver une voie moyenne qui tienne compte de la proposition de l’Assemblée nationale relayée par M. Alain Vasselle. Or, monsieur Barbier, vous souhaitez aller plus loin en faisant obstacle à toute levée des droits si le caractère réel et utile de la nouvelle présentation est reconnu. Cependant, d’une part, la formulation retenue pose un certain nombre de difficultés sur le plan juridique et, d’autre part, cette solution amoindrirait trop sérieusement la portée de la mesure, au détriment de la progression des médicaments génériques. Par conséquent, je ne peux l’approuver. J’émets donc un avis défavorable sur le sous-amendement n° 518

Je précise toutefois que le sous-amendement du Gouvernement ne fait pas obstacle au dépôt d’un brevet pour une innovation galénique reconnue.

Messieurs Milon et Houpert, tout en reconnaissant l’intérêt de la mesure, vous proposez que la levée des droits intervienne seulement si, douze mois après la commercialisation du médicament générique, aucun produit reproduisant les caractères organoleptiques de référence n’est proposé au prix de ce médicament générique.

Il ne me paraît pas souhaitable de différer cette levée des droits et de la limiter, le cas échéant, à un seul médicament générique. De nouveau, la démarche voulue par le rapporteur général est tout à fait utile, et il ne convient pas de la retarder. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 482.

J’opposerai une argumentation identique à M. Nicolas About, dont l’objectif est également de retarder la mise en œuvre de la solution souhaitée par l’Assemblée nationale, par le rapporteur général et par nombre d’entre vous dans cet hémicycle pour favoriser la diffusion des médicaments génériques. J’émets donc un avis également défavorable sur le sous-amendement n° 502 rectifié bis.

J’y insiste, mesdames, messieurs les sénateurs : l’argumentation technique que je viens de vous présenter, loin de remettre en cause la démarche voulue par le rapporteur général, bien au contraire la protège.

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