Derrière ces exigences folles se bâtissent des fortunes pour les actionnaires et se nouent des drames pour des milliers de salariés. Quelle est cette logique financière qui considère les salariés comme de simples variables d’ajustement, des salariés jetables, des salariés kleenex ? Et que dire du partage de la valeur ajoutée ?
Dès 2006, la Banque des règlements internationaux affirmait : « La part des profits est inhabituellement élevée à présent et la part des salaires inhabituellement basse ». Plus récemment, la Commission européenne estimait que, depuis quinze ans, la part dévolue au salaire avait chuté de 8, 6 % en Europe et de 9, 3 % en France.
Face à cette logique injuste et à terme mortifère, le texte prévoit, à l’alinéa 2 du même article 1er, que le salarié auquel un licenciement pour motif économique a été notifié puisse saisir l’inspection du travail, charge à elle de vérifier si le licenciement peut être prononcé.
Cette démarche administrative ne constitue en rien une réintroduction de l’autorisation administrative de licenciement supprimée en 1986. En la matière, il y a saisine optionnelle du salarié et non pas automaticité. Si tel était le cas, les quelque 2 200 inspecteurs et contrôleurs du travail ne pourraient y faire face.
Enfin, l’article 2 insère un nouvel article au code du travail. Ce dernier prévoit un engagement a priori de l’entreprise qui reçoit une aide publique à ne pas effectuer de licenciement boursier. À défaut, elle serait contrainte de rembourser les subventions publiques perçues.
Cette proposition, nous l’avons souvent faite, et vous l’avez régulièrement rejetée. Combien de collectivités ont-elles été bafouées ? Néanmoins, compte tenu des modifications susceptibles d’affecter l’entreprise, il serait sage de préciser réglementairement une modulation de cet engagement en fonction du niveau de l’aide.
« La question de la justice est cardinale dans les décisions de politique économique », déclarait Nicolas Sarkozy le 4 décembre 2008 à Douai. Certes, il a raison, mais son bilan prouve qu’il n’a jamais mis son assertion en pratique.
Pour notre part, nous ne nous berçons pas de belles paroles ou de vaines promesses. Cette proposition de loi est un passage à l’acte. Elle rend justice aux salariés et aux collectivités qui, n’en déplaise au Gouvernement, soutiennent l’emploi et représentent près de 70 % de l’investissement public.
Au final – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre –, deux conceptions de l’action politique se confrontent : d’un côté, celle d’une majorité sénatoriale qui veut remettre l’égalité au cœur de la société, de l’autre, celle d’une majorité présidentielle – plus pour longtemps, espérons-le – qui veut faire de l’ultra-liberté le vecteur économique essentiel permettant à chacun de s’enrichir – sachant toutefois qu’il est plus facile de devenir plus riche quand on est riche que quand on est pauvre !
Aussi comprendra-t-on que le groupe socialiste soutienne cette proposition de loi en se fondant sur des thèmes qui lui tiennent à cœur : le partage, la solidarité et la redistribution. §