Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 16 février 2012 à 9h00
Licenciements boursiers — Rejet d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

… y compris en matière de pétrole, produit où les bénéfices sont pourtant aisés à réaliser, dans un contexte de pénurie organisée et de poussée continue de la demande – il faudrait peut-être songer à faire quelque chose, monsieur le ministre, car tous les Français se plaignent de l’augmentation du prix de l’essence –, que Shell, comme d’autres grands groupes pétroliers, a décidé de changer son mode de fonctionnement.

L’essentiel des profits pétroliers étant réalisés sur l’exploitation – en général dans des pays où la législation sociale et les contraintes salariales sont limitées –, les Exxon Mobil, Royal Dutch Shell, BP et autres Total ont décidé de changer leur fusil d’épaule et d’abandonner peu à peu leurs activités de raffinage en France et, de manière générale, en Europe, d’autant que les États producteurs avaient tendance à associer les nouveaux permis de prospection et d’exploitation à des demandes renforcées de raffinage sur place. Shell ne fit évidemment pas exception à la règle, car l’existence d’un accord commercial privilégié entre l’Europe et les Antilles néerlandaises, où le groupe jouit du monopole du raffinage, lui permettait en outre d’inonder le marché européen de produits offrant une plus grande rentabilité.

Sachant, de plus, que le marché chinois, en pleine émergence, semble plus juteux, le groupe Shell ne rencontre aucune difficulté, pour se refaire une bonne santé financière, à vendre le site de Petit-Couronne en 2008, tout comme il vend, d’ailleurs, sa raffinerie de Berre.

Il vend le site de Petit-Couronne à Petroplus, groupe raffineur domicilié dans l’accueillant canton suisse de Zoug, un endroit que nous appelons, avec d’autres, un paradis fiscal, béni des dieux de la finance, où le taux d’impôt sur les sociétés maximal est de 7 %. Il est largement financé par le fonds américain Blackstone Capital Partners, dont le siège se situe dans l’État américain du Delaware.

Il vend également celui de Berre à LyondellBasell. Ma collègue Isabelle Pasquet pourrait d’ailleurs parler longtemps des agissements de ce groupe pétrochimique américain, qui s’est placé pendant plus de quinze mois sous la protection de la loi américaine sur les faillites.

Ce qui est en jeu dans l’affaire du site de Petit-Couronne, monsieur le ministre, mes chers collègues, est particulièrement net.

Premièrement, un groupe pétrolier, largement bénéficiaire, a procédé à la cession d’unités de production essentielles pour notre économie nationale – le raffinage pétrolier induit, vous le savez, cinq emplois pour un poste sur site en moyenne – et, plus spécialement, l’économie régionale de la Haute-Normandie et de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Deuxièmement, les opérateurs choisis, malgré toutes les « garanties » dont ils avaient entouré leur activité – implantation dans des paradis fiscaux, séparation juridique des activités permettant de jouer sur les flux de TVA et les prix de transferts entre entités du groupe –, n’ont pas résisté à la pression spéculative sur les prix du brut ni à la volonté de leurs actionnaires comme de leurs prêteurs en dernier ressort, des fonds de pension notamment, et se sont ainsi trouvés en situation de difficulté financière majeure.

Aujourd’hui, des centaines d’emplois directs – 550 à Petit-Couronne, sans compter les sous-traitants, au nombre de 1 500 environ –…

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