Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 29 février 2012 à 21h30
Majoration des droits à construire — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Si la crise financière a eu des conséquences sur le secteur de la construction, aucun pays n’a mieux résisté que la France en matière de production de logements, notamment grâce au plan de relance, qui a permis de soutenir ce secteur.

Le Gouvernement a déposé un projet de loi qui s’inscrit dans le cadre de la politique menée depuis 2007, avec, successivement, la loi de cohésion sociale, la loi portant engagement national pour le logement, la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion et le volet urbanisme de la loi Grenelle II portant engagement national pour l’environnement, auxquelles s’ajoutent l’ensemble des mesures fiscales adoptées en lois de finances.

Ce texte traduit une volonté forte, affirmée par le Président de la République, celle de relancer encore davantage la construction de logements.

La crise du logement étant une crise de l’offre, c’est du côté de cette dernière que le Gouvernement souhaite agir, en augmentant les possibilités de construire sur un terrain donné. Il s’agit donc de renforcer les possibilités de « construire plus », pour « habiter mieux ».

Le dispositif du texte présenté par le Gouvernement s’adresse aux communes couvertes par un PLU ou par un POS ; les autres ne sont pas concernées, puisqu’elles ont déjà la faculté d’appliquer la densification qu’elles souhaitent, avec le taux qu’elles décident.

Ce sont aujourd’hui environ 17 000 communes qui sont concernées par ce projet de loi, dont l’article unique porte à 30 % la majoration des règles de constructibilité, cela pour une durée de trois ans, sauf délibération contraire de la collectivité. Celle-ci peut d’ailleurs revenir à tout moment sur son choix initial, soit pour écarter l’application de la majoration, soit pour l’introduire. Le principe de libre administration des collectivités locales est donc totalement respecté.

Il est bien entendu que la majoration ne sera applicable que dans les zones constructibles, où les autorisations d’urbanisme devront toujours être sollicitées et seront délivrées selon les mêmes règles.

Elle ne sera donc pas applicable dans les zones agricoles, ni dans les zones naturelles, ni dans les secteurs sauvegardés, ni sur les territoires couverts par un plan de prévention des risques ou un plan d’exposition au bruit.

Cette mesure est particulièrement intéressante, puisqu’elle s’adresse aussi bien au particulier qui souhaite agrandir sa maison qu’à la collectivité qui développe un programme de logements sur son territoire ou au professionnel de l’immobilier.

Elle donne également aux copropriétaires qui le souhaitent la possibilité de surélever leur immeuble ou de le réhabiliter avec une augmentation des surfaces permettant la création de logements supplémentaires.

La majoration de constructibilité est susceptible de se traduire pour les maisons individuelles par l’ajout de surfaces, qui peuvent être une réponse aux besoins de familles recomposées plus nombreuses, ou permettre la création de petits logements indépendants accueillant une personne âgée ou un jeune actif.

Elle peut également permettre, après une division de terrain, la construction d’un nouveau logement.

Cette mesure devrait donc aider non seulement à augmenter le nombre de logements offerts, mais aussi à diversifier l’offre, entre neuf et ancien, petits et grands logements, logements pour personnes âgées ou pour jeunes actifs ou étudiants.

De son côté, l’État montre l’exemple, puisqu’il s’est engagé à libérer, entre 2012 et 2016, 1 500 hectares de terrains qu’il détient, dont 880 hectares en Île-de-France, afin de dynamiser la construction.

Par ailleurs, le recours proposé aux baux emphytéotiques de longue durée est également très positif.

L’architecture générale du projet de loi est de bon sens, puisqu’il s’agit d’augmenter l’offre de logements sans augmenter la dépense publique, de densifier les constructions sur le territoire et de favoriser un mécanisme moins consommateur d’espace, permettant ainsi de limiter les déplacements et de rentabiliser les équipements existants.

Il s’agit aussi de favoriser les économies d’échelle, en permettant par exemple la transformation de bureaux en logements, de manière à améliorer l’équilibre financier des opérations de réhabilitation.

De plus, ce texte permet de répondre à l’évolution de notre société, dans laquelle l’accroissement des familles recomposées est notoire, tandis que les besoins d’adaptation des logements pour le maintien des personnes âgées ou handicapées à domicile sont, eux aussi, grandissants.

L’objectif de la mesure est bien d’accroître l’offre de logements tout en permettant une meilleure utilisation de l’espace, en densifiant la ville et en prévenant l’étalement urbain.

On ne peut pas, en effet, d’un côté, s’alarmer de la disparition tous les sept ans environ de l’équivalent d’un département en espace agricole, et, de l’autre, refuser la densification. Il y aurait une certaine incohérence dans tout cela.

Une autre conséquence de la mise en place de cette mesure est la relance de la construction, parce que le bâtiment est un secteur essentiel à la croissance et représente, sur l’ensemble de la chaîne, 2, 4 millions d’emplois, dont 1, 5 million pour le seul BTP. Monsieur le ministre, vous l’avez rappelé, chaque nouveau logement représente 1, 5 emploi.

Cette disposition va donc profiter au secteur du BTP et, en amont, aux architectes, qui se verront confier de nouvelles opérations, lesquelles n’étaient pas nécessairement programmées dans leurs carnets de commandes.

Il y a, par ailleurs, un point qui me tient à cœur et que je souhaite aborder, monsieur le ministre, car il constitue un frein considérable à la construction de logements : il s’agit des recours, plus particulièrement des recours abusifs. J’ai d’ailleurs cosigné avec mon collègue Daniel Dubois un amendement à ce sujet.

En effet, il n’est pas une opération de zone d’aménagement concerté, une opération de lotissement ou même de simples permis de construire qui ne fassent l’objet d’un ou de plusieurs recours, généralement infondés, venant soit d’un voisin, soit d’un groupe de riverains, soit encore d’associations ayant un intérêt masqué. C’est ainsi que les constructions sont fortement retardées, au minimum de plusieurs mois, voire bloquées ou abandonnées.

S’ajoute souvent, dans les opérations d’aménagement, le délai de procédure de la déclaration d’utilité publique : sa durée minimum d’un an peut geler un projet souvent pour une seule parcelle dont le propriétaire fait de la résistance, laquelle bloque l’ensemble du périmètre d’opération, sauf à pouvoir commencer une première tranche où le foncier est maîtrisé avant de disposer de l’arrêté préfectoral de DUP, ce qui ne semble pas être autorisé. Peut-être pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur ce point ?

Enfin, si ce texte n’est pas le bon vecteur pour traiter des recours et des délais qui freinent les constructions de logements, quelles possibilités entrevoyez-vous pour qu’un commencement de solution soit apporté ? J’ai pris note qu’un décret devrait être prochainement publié ; c’est peut-être un début.

Enfin, et pour en revenir à la version initiale du projet de loi relatif à la majoration des droits à construire, texte simple et pragmatique, compte tenu des garde-fous mis en place avec le dispositif, mes collègues du groupe UMP et moi-même souhaitions y apporter notre soutien.

Or le rapporteur de la commission lui a trouvé tous les défauts possibles…

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