Je comprends l’argument pratique évoqué par Alain Fauconnier : si l’on veut que l’acheteur puisse tout de suite partir avec son produit, il faut autoriser la prise de paiement par le vendeur.
Toutefois, comment le consommateur pourra-t-il, dans ces conditions, exercer son droit de rétractation de manière effective ? Si le vendeur est parti à l’autre bout de la France, comment le contacter pour être remboursé ? Faudra-t-il que l’acheteur renvoie, à ses frais, la marchandise qui ne lui convient pas et qu’il a en réalité achetée sous une forme de contrainte, sans être sûr d’avoir des nouvelles du vendeur, lequel n’a pas d’établissement où le consommateur pourrait venir le trouver ? Et si le vendeur est un proche, voire un membre de la famille de l’acheteur, ce dernier osera-t-il lui demander de le rembourser ? Tout cela pose beaucoup de difficultés, pratiques elles aussi.
Si nous souhaitons le maintien du droit actuel, qui est en effet plus contraignant pour les vendeurs, c’est pour que le consommateur garde la liberté d’exercer son droit de rétractation et puisse toujours, en cas de litige, invoquer devant le juge la protection de la loi.
J’ajoute qu’il y aurait une incohérence dans le projet de loi si l’on maintenait ces dispositions dérogatoires pour les ventes à domicile. En effet, celles-ci sont déjà soumises à des conditions de remboursement bien moins favorables que celles qui sont prévues par le projet de loi pour les ventes à distance ou par démarchage, tant en matière de délai de remboursement – trente jours au lieu de quatorze – que de montant des pénalités de retard – le double du taux d’intérêt légal, au lieu de 10 %. Il serait assez singulier de réduire encore la protection qui leur est attachée.
Il me semble également qu’une telle disposition serait contraire à l’article 13 de la récente directive européenne du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, en ce qui concerne les obligations du professionnel en cas d’exercice du droit de rétractation.