Intervention de Jean Boyer

Réunion du 28 février 2012 à 21h30
Conseil national des communes « compagnon de la libération » — Suite de la discussion et adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean BoyerJean Boyer :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le mois de février 2012 restera indiscutablement comme un moment où nous avons marqué notre volonté de léguer aux générations futures la mémoire des moments forts de notre passé, de notre Histoire.

Après avoir renforcé, au début du mois, le symbole que constitue la date du 11 novembre, aujourd’hui, par cette proposition de loi, nous voulons pérenniser l’ordre de la Libération.

Cette exceptionnelle reconnaissance nationale a été instaurée par le général de Gaulle, alors à Brazzaville, le 16 novembre 1940. Un arrêté du 1er août 1941 a fixé la place de ce nouvel ordre dans le port des décorations : il arrive immédiatement après la Légion d’honneur et avant la Médaille militaire.

Entre le 16 novembre 1940 et le 23 janvier 1946, l’ordre de la Libération a rassemblé 1 061 titulaires, dont 238 à titre posthume. Les reconnaissances individuelles ont été de très loin les plus nombreuses – on en compte 1 038 –, mais la distinction a également été accordée à dix-huit unités combattantes et cinq communes.

Parmi l’élite que constituent ces 1 038 promus, figuraient six femmes et un Français d’exception, je veux parler de Jean Moulin, désigné comme le « caporal Mercier ».

Au début de ce mois, le décès de René Gatissou a ramené à vingt-huit le nombre des survivants. Les dix-huit glorieuses unités militaires disparaissent ou se restructurent. Demain, les cinq villes que j’évoquais précédemment seront donc la colonne vertébrale de la nouvelle structure.

En examinant l’insigne, on découvre les symboles qui y sont figurés et l’on est ému par sa beauté. Il s’agit d’un écu de bronze poli rectangulaire, traversé par un glaive qui porte la croix de Lorraine. Le revers de la décoration est timbré de la devise suivante : Patriam servando victoriam tulit, autrement dit« En servant la Patrie, il a remporté la victoire ».

À la vue de cette croix de Lorraine, on ne peut s’empêcher de penser à un grand Français, celui qui a institué l’ordre de la Libération et qui, le 15 août 1944, a adressé à la France message d’espérance par la voie des airs.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi de vous rappeler un moment fort de mon enfance. Je gardais le petit troupeau familial, à côté de ma mère – j’avais sept ans et demi et c’était plutôt pour moi ma « maman » –, lorsque des escadrilles de messagers aériens lâchèrent du ciel, vers onze heures, des centaines de tracts. Cela fera soixante-huit ans le 15 août prochain et, aujourd’hui, j’ai toujours à l’esprit ce message, que je me permets de vous citer de mémoire : « Les armées des Nations unies ont débarqué dans le Midi. Leur but est de chasser l’ennemi et d’effectuer une jonction avec les forces alliées, les forces de Normandie. Les forces françaises participeront à cette opération, à côté de leurs frères d’armes, sur mer, sur terre et dans les airs. La victoire est certaine. Vive l’âme de la France et tout ce qu’elle représente. »

Depuis cette date, la France a retrouvé sa liberté. Les générations se sont succédé et, au fil des années, l’ordre s’est progressivement étiolé. Aujourd’hui, je l’ai dit, moins de trente glorieux combattants, dont certains furent des combattants de l’ombre, résistent, mais en menant un autre combat : celui de la vie.

Dans un futur indéterminé – l’homme ne choisit ni l’heure de sa naissance ni celle de sa mort –, un relais, placé sous la tutelle du garde des sceaux, sera assuré par les cinq maires en exercice des communes dont je me permets de rappeler les noms par ordre chronologique d’attribution : Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et l’Île de Sein.

Les titulaires de la croix de la Libération ont fait magnifiquement leur devoir. Aujourd’hui, il est normal que la République fasse le sien en pérennisant leur mémoire individuelle et collective. Nous savons tous que c’est aussi cela, la mission de la France. §

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