Intervention de Françoise Cartron

Réunion du 21 février 2012 à 14h30
Responsabilité civile des pratiquants sportifs et encadrement de la vente des titres d'accès — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Françoise CartronFrançoise Cartron :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la culture, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, plusieurs orateurs viennent d’intervenir sur cette proposition de loi, dont une des ambitions est de mieux encadrer la vente des titres d’accès aux manifestations sportives, commerciales et culturelles, ainsi qu’aux spectacles vivants.

Tel est le sens de l’article 2, issu d’un amendement voté à l’Assemblée nationale, adopté sans modification par notre commission, sur lequel je vais concentrer mon propos.

Il vient compléter le code pénal par un article punissant d’une amende de 15 000 euros les pratiques de revente massive et répétée, considérées comme habituelles, des titres d’accès à ces événements, et ce quels qu’en soient le support et la forme.

Mes chers collègues, pourquoi prévoir un tel dispositif aujourd’hui et dans ce texte en particulier ?

À mes yeux, deux raisons principales le justifient. Cet article 2 tend, d’une part, à répondre à des pratiques recrudescentes, lesquelles perturbent l’organisation de certaines manifestations depuis plusieurs années et menacent, au final, l’accès à la culture pour tous. Il vise, d’autre part, à combler un vide juridique, parachevant les travaux législatifs entrepris au cours des derniers mois sur cette problématique.

Le législateur a donc constaté que la revente des billets s’est amplifiée de manière incontrôlée et spéculative, aux abords des stades, des salles de concert, à l’entrée des festivals et, surtout, sur les sites internet de revente. Cette économie souterraine crée une situation préjudiciable, tant pour les spectateurs que pour les producteurs et organisateurs des spectacles.

En effet, lors de la mise en vente des droits d’accès à un événement sportif ou culturel très couru, si une personne physique ou morale achète massivement des tickets d’entrée en vue de réaliser un bénéfice, le prix nouvellement fixé devient le plus souvent prohibitif. Cette augmentation artificielle de la demande exclut donc une partie importante du public, ce qui n’est pas acceptable.

Par ailleurs, il est anormal que l’intermédiaire autoproclamé, alors qu’il n’a pas été autorisé par le producteur, l’organisateur ou le propriétaire d’exploitation, avec qui il n’entretient aucun rapport contractuel, puisse s’enrichir.

De plus, ces reventes sont susceptibles de créer des troubles à l’ordre public. C’est le cas lorsque des personnes ont acquis des titres non valables sur ce second marché.

Ensuite, force est de constater que, face à ces réalités, le dispositif juridique est actuellement insuffisant, même s’il a été partiellement renforcé dans le cadre de la loi visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs.

La commission de la culture, de l’éducation et de la communication s’était alors prononcée en faveur de la création d’une infraction constituée par la revente de billets lors des manifestations sportives. Le vote du texte a permis de combler en partie ce vide juridique, mais en partie seulement puisque le champ d’application reste très restreint.

Certes, la loi de 1919 portant répression du trafic de billets de théâtre s’applique encore et prévoit l’interdiction de reventes de billets à des prix supérieurs à ceux qui ont été fixés initialement, mais son champ d’application, celui des « théâtres et concerts subventionnés », reste très limité. Aussi, pour cette raison, les députés ont choisi de reprendre la disposition concernant les manifestations sportives, en l’étendant à la revente des billets d’entrée à une manifestation culturelle, commerciale et au spectacle vivant. Cette extension est pertinente en ce qu’elle offre un dispositif global plus protecteur dans le code pénal.

Au Sénat, une initiative prise dans le cadre de la loi dite lLOPPSI 2 avait été censurée par le Conseil constitutionnel, notamment parce que la disposition en cause n’autorisait pas la revente occasionnelle faite par des particuliers. Ce n’est plus le cas dans ce texte.

D’autres textes de loi ont prévu des dispositifs élargis. Une proposition de loi, déposée en juillet 2011 par certains de nos collègues, visait à inclure les manifestations culturelles et le spectacle vivant, mais elle n’a toujours pas été inscrite à l’ordre du jour.

La procédure accélérée étant engagée sur le présent texte, l’adoption de l’article 2 permettrait une avancée législative qui fait globalement consensus, à droite comme à gauche, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

Parce que l’accès à la culture pour tous doit être défendu et que le lien entre le public et l’artiste se fait essentiellement sur scène, il nous faut lutter efficacement contre ce phénomène pernicieux qu’est la revente spéculative des tickets d’entrée. Il s’agit d’une pratique préjudiciable pour tous ceux qui se voient ainsi privés de la possibilité de vivre des moments culturels, sportifs, festifs. De tels moments de partage doivent rester accessibles à tous.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les artistes se sont manifestés pour dénoncer, eux aussi, une telle pratique : aussi est-il nécessaire de voter cet article 2 en particulier. Au demeurant, le groupe socialiste soutiendra la proposition de loi dans son ensemble. §

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