Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 1er mars 2012 à 9h30
Mesures conservatoires en matière de procédures de sauvegarde de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur, rapporteur :

J’aborderai, pour conclure, deux sujets importants à mes yeux.

Tout d’abord, la question de l’information des salariés constitue une préoccupation tout à fait légitime, partagée par les membres de la commission des lois.

Le droit actuel des procédures collectives comporte déjà de nombreuses dispositions permettant d’assurer de manière me semble-t-il satisfaisante l’information tout au long du déroulement d’une procédure collective. Je pense notamment aux rapports que l’administrateur judiciaire doit faire régulièrement au comité d’entreprise.

Sur l’initiative du groupe SRC de l’Assemblée nationale, un amendement, modifié par trois sous-amendements du Gouvernement, a été adopté s’agissant de l’information des représentants des salariés.

L’article L. 631-10-2 du code de commerce qui en est résulté organise l’information des représentants des salariés – le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel –, par l’administrateur ou le mandataire judiciaire, lorsqu’une mesure conservatoire est ordonnée dans le cadre d’une action en extension prévue à l’article L. 621-2 du même code.

À cet égard, je note que seule l’action en extension est visée, ce qui semble omettre l’action en responsabilité instituée par l’article 2 de la proposition de loi comme l’action existante pour insuffisance d’actif.

La commission des lois considère qu’il aurait été judicieux de mentionner, outre l’article L. 621-2, les deux articles L. 631-10-1 et L. 651-4 du code de commerce.

Néanmoins, la commission des lois n’a pas proposé d’amendement, considérant comme prioritaire que les mesures soient prises et applicables le plus vite possible. Toutefois, nous tenons à souligner – comme vous le savez, monsieur le garde des sceaux, les propos tenus en séance peuvent être utiles pour l’interprétation de la loi – que ce nouvel article se place dans le titre relatif au redressement, alors qu’il vise une disposition du titre relatif à la sauvegarde. Nous considérons donc que les administrateurs et mandataires judiciaires feront très probablement une interprétation large de leur nouvelle obligation d’information. Telle est, en tout cas, la position de la commission des lois que je tiens à affirmer très clairement : l’intention du législateur est bien que l’information des représentants des salariés, en cas de mesures conservatoires, ait lieu de manière exhaustive, dans les trois cas prévus aux articles L 621-2, L. 631-10-1 et L. 651-4 du code de commerce.

Par ailleurs – c’est le second point très important –, nous avons été informés du fait que les salariés avaient très mal perçu le rejet par l’Assemblée nationale d’un amendement portant sur leurs droits, leurs acquis et les garanties qu’ils ont pu obtenir au fil des années.

Monsieur le garde des sceaux, vous venez de confirmer, comme vous m’en avez informé hier soir, ce que vous avez écrit conjointement avec M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique aux représentants des salariés.

Je tiens donc à dire ici, à la suite des débats que nous avons eus en commission, qu’il nous paraît très important que l’action en extension de la procédure de sauvegarde, liquidation et redressement à une tierce personne emporte « des obligations sociales » – ce sont les termes mêmes figurant dans le texte. Aussi, nous nous réjouissons que vous ayez déclaré à cette tribune, au nom du Gouvernement, que vous entendez par « obligations sociales », non seulement pour l’entreprise, mais aussi pour ses filiales éventuelles, ce qui relève de quatre sources : le code du travail, les conventions collectives, les accords d’entreprises et les contrats individuels.

À mon sens, en l’absence de la disposition qui n’a pas été adoptée par l’Assemblée nationale, ces quatre garanties ici proclamées engagent le Gouvernement – et même, oserais-je dire, les gouvernements futurs – et valent interprétation des termes « obligations sociales » figurant dans la proposition de loi.

Mes chers collègues, au regard de ces différentes observations et après en avoir longuement délibéré, la commission des lois vous propose d’adopter la présente proposition de loi sans modification. §

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