Ces remarques étant faites, je vais à présent donner notre point de vue sur ce texte et indiquer quelle autre direction nous aurions pu prendre.
Il aura donc fallu quelques visites d’entreprises en difficulté et une couverture médiatique minimale ou, pour le moins, réduite aux faits et gestes de quelques candidats à l’élection présidentielle, pour que l’on se souvienne, d’un seul coup, que la France est d’abord, et avant tout, celle qui travaille, qui produit les richesses et qui, parfois, désespère de garder son emploi ou de voir ses enfants en trouver un.
Pour des raisons politiciennes qui n’échapperont à personne, une proposition de loi a été déposée par cinq députés de l’UMP de Seine-Maritime, le 22 février dernier, et nous sommes, ce 1er mars – soit huit jours après le dépôt du texte ! –, pratiquement mis en demeure de l’adopter conforme, afin qu’il soit appliqué le plus rapidement possible. La preuve est donc faite que « quand on veut, on peut ». Ce vieux proverbe populaire prend soudain tout son relief, mais aussi toute sa saveur !
À la vérité, cette apparente précipitation dissimule assez mal les intentions réelles des véritables auteurs de la proposition de loi.
En tant que parlementaire de Seine-Maritime, je suis interpellé, depuis plusieurs années déjà, par les salariés de la raffinerie Petroplus, ex-Shell France, inquiets pour le devenir de l’activité de leur site.
Le temps me manque évidemment pour évoquer la situation de cette entreprise historique des bords de Seine et pour souligner dans quelles conditions la Shell s’était délestée – déjà ! – de cette unité de raffinage, comme elle s’était débarrassée de la raffinerie de Berre-l’Étang, actuellement gérée par le groupe LyondellBasell.
Voilà donc plusieurs années que les salariés du site m’informent de la situation de leur entreprise.
Le groupe suisse de raffinage Petroplus, douillettement installé dans le canton de Zoug, dont la « spécialité » est d’être le paradis des paradis fiscaux, est aujourd’hui au bord de la cessation de paiement.
Il aura donc fallu que je convoque une conférence de presse sur le site de l’entreprise, vendredi 17 février, afin de présenter une proposition de loi relative à notre politique industrielle, élaborée en concertation avec les salariés de l’entreprise, notamment l’intersyndicale, et relative, entre autres dispositions, au renforcement des droits des salariés dans le cadre des procédures collectives et de la gestion courante des entreprises industrielles importantes, pour que, dans le secret des cabinets ministériels, quelques plumes commencent à rédiger le texte de la proposition de loi dont nous débattons ce matin.
Sans surprise, les choses n’ont pas traîné ! Et comme il fallait aller vite, on a cru bon de tirer de leur torpeur cinq députés seinomarins qui n’avaient jamais déposé, ni même inspiré, la moindre proposition de loi depuis le début de la législature, afin qu’ils assument le « portage » du texte et que son examen puisse intervenir au plus tôt.
Il est évident que, pour le Gouvernement et le Président de la République, la situation appelait des réponses, même partielles, au plus haut niveau, ne serait-ce qu’en raison de l’illusoire croyance en l’adhésion de quelques travailleurs au discours électoral de campagne présidentielle.
Que le Président de la République se rassure : il n’est pour rien dans la décision de Shell de confier à l’unité de Petit-Couronne six mois de raffinage, puisque la chose était réglée avant.