Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera essentiellement sur la TVA sociale.
Nicolas Sarkozy souhaite abaisser le poids des charges pesant sur les entreprises et promouvoir des accords compétitivité-emploi dans ces dernières, afin d’adapter le temps de travail et les salaires.
Concrètement, 13, 2 milliards d’euros de charges dédiées à la branche famille seront supprimées et compensées par une hausse de 1, 6 point du taux normal de TVA et une hausse de 2 points de la CSG sur les revenus du capital.
Dès lors, qui va y gagner et qui va y perdre ? La question mérite d’être posée, car cette mesure va faire des gagnants et des perdants.
Les perdants seront les salariés. Sur le plan fiscal, la TVA sociale signifie l’augmentation immédiate de l’impôt sur la consommation. Si les prix augmentent, les ménages devraient en effet perdre en pouvoir d’achat. Alors que M. Sarkozy voulait être le président du pouvoir d’achat, celui-ci n’a pas cessé de baisser ces cinq dernières années. Et aujourd’hui, c’est de nouveau au pouvoir d’achat qu’il décide de faire mal !
Tous les Français vont être concernés, mais surtout les classes moyennes et populaires, lesquelles consomment plus qu’elles n’épargnent.
Les allocataires seront également perdants, puisque le montant des prestations d’allocations familiales ne sera plus indexé sur le niveau de l’inflation.
Les gagnants seront les employeurs. La baisse des charges patronales va immédiatement abaisser le coût du travail et permettre aux entreprises de baisser leurs prix hors taxes sans grever leurs marges.
Nous savons très bien que, lorsque les charges baissent, les prix, eux, ne baissent quasiment pas. J’en veux pour preuve ce qui s’est passé lorsque le taux de TVA a été réduit de 19, 6 % à 5, 5 % pour l’hôtellerie-restauration.
Ainsi, la TVA sociale consiste à faire endosser aux ménages la responsabilité de la crise, en laissant principalement aux plus défavorisés d’entre eux le soin de rembourser, en partie, la facture de dette.
Vous commettez en cela une grave erreur économique car, avec ce texte, vous amputez la consommation, l’un des principaux moteurs de la croissance. C’est consternant !
Et tout cela se passe, bien sûr, sans que vous ayez pris le soin de rencontrer les différents partenaires concernés.
De plus, cette mesure est discriminante. En effet, en raison des barèmes imposés par le Gouvernement, l’industrie, pourtant censée profiter en priorité de la TVA sociale, ne devrait gagner que 3, 3 milliards d’euros, quand, dans le même temps, les services empocheront 8, 3 milliards d’euros. Il n’y aura donc pas un intérêt commun à toutes les entreprises.
Comble de l’injustice, la banque et la finance devraient même pouvoir tirer leur épingle du jeu, puisqu’elles gagneront jusqu’à 700 millions d’euros, soit plus que l’agroalimentaire, l’automobile ou l’industrie des biens de consommation !
Lorsque le 29 janvier dernier, à la télévision, M. Sarkozy a annoncé sa décision d’instaurer une TVA sociale, il l’a présentée comme une nécessité pour la France. Et quelle nécessité : puisque l’Allemagne l’a adoptée, nous devons l’adopter !
En effet, certains veulent imiter l’Allemagne, la copier, ou même l’épouser ! Il ne se passe pas un jour sans qu’un responsable de la majorité vante les réussites de nos voisins d’outre-Rhin. Quelle erreur !
Regardons d’un peu plus près ce modèle. L’Allemagne compte 6, 5 millions de travailleurs pauvres, soit 20 % de la population active. Entre 2000 et 2009, le taux de pauvreté a augmenté de 50 %. Depuis dix ans, le pouvoir d’achat en Allemagne est en forte baisse, de 4, 7 % selon une étude. Les salariés de l’est du pays gagnent 17 % de moins que leurs collègues de l’ouest. Le nombre d’emplois très mal payés a fortement augmenté ces dernières années. La flexibilité et la productivité ont été assurées par le recours au travail précaire : il y a les « mini-jobs », dont le salaire ne peut pas dépasser 400 euros par mois, et ce sans limitation dans le temps ; il y a ensuite les « midi-job », dont le salaire doit être compris entre 400 euros et 800 euros mensuels ; enfin, les « ein-euro-jobs », destinés aux chômeurs de longue durée. Ces derniers sont des emplois à durée déterminée, indemnisés entre 1 euro et 2, 5 euros de l’heure.
Sous prétexte de favoriser la compétitivité des entreprises et de réduire le chômage, le gouvernement allemand n’a pas hésité à paupériser la population active en pratiquant la compression salariale et en favorisant le développement du travail précaire.
Telle est la triste réalité de l’Allemagne : travailleurs pauvres, précarité, inégalités, déclin démographique ! Ce modèle est dangereux pour la société française et les Français n’en veulent pas ! Seuls Nicolas Sarkozy et le patronat souhaitent l’importer. Pourtant, d’autres solutions existent pour permettre le redressement indispensable de nos finances publiques et le soutien de la croissance.
Madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous comprendrez, dans ces conditions, que nous votions la question préalable. §