Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les enjeux socio-économiques des ports maritimes sont énormes pour les départements d’outre-mer. Plus que de simples zones d’activités, ces ports constituent les portes d’entrée indispensables à l’approvisionnement de ces collectivités et à leurs échanges commerciaux avec l’extérieur.
Ces ports sont des maillons importants des chaînes de transport, qu’il s’agisse de continuité territoriale, de cabotage ou de transport intercontinental.
Les ports des départements d’outre-mer constituent pour la France et pour l’Europe un emplacement commercial et stratégique de première importance.
L’arc Caraïbe et le plateau guyanais sont d’autant plus stratégiques que les travaux d’élargissement du canal de Panama lancés en septembre 2007, et qui doivent s’achever en 2014, permettront d’y livrer passage à des navires de très gros tonnage. En Guadeloupe et en Martinique, on espère des retombées considérables de l’ouverture de la troisième écluse du canal de Panama.
La Guadeloupe, afin de se doter d’un port moderne, performant et attractif, a entrepris un chantier pharaonique. Ce projet de 600 millions d’euros sera réalisé en deux étapes : d’abord l’approfondissement du port, puis son agrandissement.
Nos départements français d’Amérique ne sont pas les seuls à s’être positionnés sur le marché des ports pouvant accueillir de très gros navires. Ainsi Kingston, en Jamaïque, est-il actuellement un port d’éclatement, en raison, notamment, de sa position stratégique sur la route de la côte est des États-Unis.
Il apparaît donc comme une nécessité de faire évoluer l’administration de ces ports vers une gestion plus entrepreneuriale et plus compétitive.
À la Réunion également, le port dispose d’infrastructures, d’équipements et d’outillages conformes aux standards européens, et sa situation géographique, au cœur de l’océan Indien, le place au rang de quatrième port français pour le volume des conteneurs traités.
Les ports français ultramarins se doivent d’adapter en permanence leurs équipements et leurs offres de service pour répondre aux besoins de leurs clients armateurs ou chargeurs, ainsi qu’à l’évolution du transport maritime et du commerce mondial.
Dans ses grandes lignes, le projet de loi aujourd’hui soumis à notre Haute Assemblée a fait l’objet d’un consensus parmi les acteurs locaux, ce dont nous pouvons nous féliciter. Ce n’est pas qu’un simple décalque de la réforme portuaire métropolitaine de 2008. Il eût été préjudiciable, en effet, de nous voir appliquer les mêmes règles alors que nos réalités sont bien différentes. Cette situation a d’ailleurs été singulièrement illustrée, à la suite de différentes études d’impact, par l’impossibilité de céder, dans les départements d’outre-mer, les infrastructures essentielles des ports, en raison de la situation monopolistique qui en découlerait, alors que ce fut une obligation légale en 2008 pour la métropole.
Par ailleurs, le transfert de la tutelle du port des chambres de commerce et d’industrie aux établissements publics fera l’objet de compensations financières, et j’espère sincèrement que l’État tiendra les engagements pris à ce titre.
En dépit de ces aspects positifs, nous regrettons cependant que ce projet de loi n’engage pas les collectivités concernées vers plus de responsabilité locale, alors même que cette voie est empruntée par les territoires engagés dans d’importantes réformes institutionnelles.
Nous débattons aujourd’hui d’un texte relativement consensuel au regard de cette réforme nécessaire. En effet, le diagnostic du mal est unanimement admis : une gestion économique peu efficiente, une gestion des infrastructures à revoir et un manque de participation des collectivités territoriales.
Toutefois, nous devons être attentifs à certains points qui me semblent essentiels.
Premièrement, il nous faut veiller particulièrement à ce que les principales personnes concernées soient les véritables acteurs de la réforme portuaire.
C’est la raison pour laquelle je vous proposerai tout à l’heure, mes chers collègues, d’adopter un amendement tendant à permettre la consultation des usagers des ports sur les politiques tarifaires menées. En effet, une gestion économique efficiente passera nécessairement par une transparence tarifaire, qui ne saurait voir le jour sans la consultation des principaux intéressés que sont les usagers. Et vous savez combien les tarifs, en outre-mer, constituent un véritable enjeu…
Deuxièmement, il nous faut appréhender correctement la coopération entre les collectivités domiennes concernées. Je pense ici surtout à la Guadeloupe et à la Martinique : il est hors de question que l’un de ces ports se développe au détriment de l’autre ; ils devront être complémentaires. Il est donc nécessaire d’instaurer un véritable dialogue entre les organes de direction des établissements publics de gestion des ports.
Troisièmement, nous devrons également veiller à garantir la mise en place d’une gestion vertueuse de la réforme. C’est pourquoi il faut prévenir les conflits d’intérêts, notamment par le non-cumul des mandats de présidence d’exécutifs locaux avec ceux de membres des instances dirigeantes au sein de l’établissement public.