Intervention de Éric Jalon

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 17 janvier 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Eric Jalon directeur général des collectivités locales

Éric Jalon, directeur général des collectivités locales :

L'année 2003, année de la révision constitutionnelle, est le point de référence retenu pour le ratio d'autonomie financière : nous étions, à cette époque, à la fin du processus de suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, intégralement compensée par des dotations, et avant la phase du transfert de compétence compensé fiscalement pour garantir toute baisse. Je propose de ne pas revenir au débat sur la compensation du RMI devenu RSA, ni à celui sur la TIPP, mais il reste que cette dernière a été attribuée aux départements par la loi de finances. Le Conseil constitutionnel nous a d'ailleurs immédiatement mis en garde sur le fait que cette compensation ne pouvait pas descendre en dessous du niveau d'origine, ce qui a conduit l'Etat - parce que la TIPP n'avait pas le dynamisme qu'on attendait - à opérer des transferts financiers au bénéfice des collectivités territoriales, chaque année.

Je comprends bien que l'autonomie financière n'est pas l'autonomie fiscale, mais je veux vous rappeler aussi que la compensation des transferts de compétences ou la compensation des remplacements de recettes de fiscalité locale par des transferts de fiscalité, même non modulable, est toujours mieux que la compensation par des dotations qui, elles, peuvent être soumises à des rabots ou à des redéploiements.

Il faut garder à l'esprit ce contexte dans lequel s'est opérée la réforme de la taxe professionnelle, pour laquelle nous avons dû mobiliser beaucoup de ressources fiscales, achever complètement le transfert de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances, transférer la TASCOM ou encore diminuer lourdement les frais d'assiette et de recouvrement. Et cela, parce que l'exigence d'autonomie financière des collectivités locales nous imposait de limiter le montant de la fameuse dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), qui est bien une dotation. Cette exigence du principe d'autonomie financière nous imposait également de ne pas compenser la suppression de la taxe professionnelle uniquement par des dotations. J'ai bien conscience que nombre d'élus préfèreraient l'autonomie fiscale à l'autonomie financière, mais je rappelle que l'autonomie financière a constitué un progrès notable par rapport à des pratiques passées.

Pour ce qui concerne les dépenses, je dirais d'abord que nul ne conteste que les intercommunalités ont participé pleinement à l'amélioration des services rendus à nos concitoyens, en particulier en milieu rural. Si, aujourd'hui, beaucoup de zones rurales se repeuplent, c'est notamment parce que les Français se sont habitués à des standards de vie liés au fait que les couples travaillent et ont donc besoin d'une crèche, d'un accès internet, etc. Beaucoup de ces services peuvent être apportés par l'intercommunalité, ce qui explique une partie des coûts. De même, il faut reconnaître que les intercommunalités ont assumé une grande partie de la mise à niveau de notre pays au regard des normes communautaires en matière d'environnement, notamment pour la politique de l'eau ou des déchets par exemple. Les exigences normatives se sont accrues en la matière, expliquant une partie de ces évolutions.

Néanmoins, il est avéré qu'il existe des doublons entre communes et intercommunalités. Nous n'avons ainsi pas forcément utilisé toutes les capacités de mutualisation et c'est la raison pour laquelle, dans la loi de décembre 2010, nous avons renforcé la boîte à outils juridiques autorisant ces mutualisations.

D'autre part, au-delà de ces explications sur les événements de ces vingt-cinq ou trente dernières années, il ne faut pas aborder le sujet uniquement sous un angle rétrospectif. Il convient de voir si, aujourd'hui et pour les années à venir, les taux d'augmentation de dépenses des collectivités locales, tels que nous les connaissons ou tels que nous les avons connus ces dernières années, sont, ou non, soutenables sur le long terme. Il ne s'agit pas de dire que tout ce qu'on a fait dans le passé était erroné, mais simplement de se poser ensemble la question de la soutenabilité de notre trajectoire à venir.

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