S'il s'agit d'enclencher un cercle vertueux, le jeu en vaut la chandelle. A l'heure actuelle, M. Juncker n'a pour secrétariat que son directeur du Trésor... Il ne serait pas inutile que chacun des États membres apporte son tribut de fonctionnaires. Car il est urgent de constituer un Trésor européen, ne serait-ce que pour coordonner les émissions de dette publique.
Je plaide pour une gouvernance effective dotée d'une légitimité démocratique. Et je ne parle pas d'une Cosac, d'une conférence interparlementaire ou des réunions des présidents des commissions des finances, faux alibis de démocratie, quand il faut une vraie surveillance à la zone. D'où l'idée d'une commission de surveillance de la zone, composée d'une centaine de représentants du Parlement européen et des parlements nationaux, capables d'assurer une mission permanente. Elle aurait aujourd'hui à mesurer, par exemple, si les remèdes proposés à la Grèce par la troïka sont soutenables dans la durée.
De la coordination dépend l'efficacité politique et, partant, la capacité à retrouver la croissance. Cette commission de surveillance pourrait être le lieu privilégié pour s'interroger sur la compatibilité entre les priorités du marché intérieur et les efforts pour accélérer la croissance. Car le fait est que ces priorités, où chacun y va de son coup de clairon - protection du consommateur, de l'environnement -, se traduisent souvent en un surcroît de dépenses publiques ou en freins à la compétitivité. C'est ainsi que le préfet de la Mayenne en est conduit à me demander de dresser une carte du bruit dans mon département, pour répondre à une ancienne directive de Bruxelles ! Un peu de cohérence ne ferait pas de mal !
Les dix premières années de l'euro, qui furent ses « années folles » - addiction à la dépense, excès de déficit s'y donnèrent libre cours - font, rétrospectivement, un peu honte. Comme si l'on n'avait pas compris qu'entrer dans la zone euro, c'était entrer dans un mécanisme de nature fédérale, appelant une vraie gouvernance. D'autant que la souveraineté, dans un monde globalisé, ne peut être qu'une souveraineté partagée, dont la première échelle est la zone euro. Nous ne pouvons faire marche arrière, au risque du chaos. N'oublions pas que les pères de l'Europe ont voulu y entrer pour assurer la paix.
Le nouveau traité doit être mis en oeuvre le plus vite possible. A qui parle de renégocier, je suis tenté de rappeler la campagne législative de 1997, où certains parlaient de renégocier le pacte de stabilité. Dominique Strauss-Kahn a vite fait, pourtant, de rejoindre les positions de Théo Waigel et cela a donné... la ratification du traité d'Amsterdam.
Ne demandons pas à l'Europe de régler nos problèmes à notre place. Elle a besoin d'une organisation institutionnelle lisible. Les gesticulations qui laissent croire que la souveraineté peut encore être nationale ne sont plus de mise : notre souveraineté ne peut plus être qu'européenne.