Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Réunion du 1er décembre 2015 à 17h50

Résumé de la réunion

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La réunion

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La réunion est ouverte à 17 h 50.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. le ministre, nous sommes très heureux de vous accueillir. Nous avions sollicité votre venue dès l'examen de la loi qui porte votre nom, ayant de nombreux sujets à évoquer avec vous.

La question des sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) nous a beaucoup occupés il y a un an. Le groupe de travail coprésidé par Jean-Jacques Filleul et Louis-Jean de Nicolaÿ a fait des propositions et beaucoup insisté sur la nécessité d'une plus grande transparence des relations entre l'État et les SCA. J'ai écrit deux fois au Premier ministre pour connaître la teneur des accords conclus en avril, mais l'ai découverte, comme tout le monde, dans le Journal officiel du 23 août... Les travaux prévus par le plan de relance ont-ils commencé ? Quel est le calendrier ? Le versement de 100 millions d'euros à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) sera-t-il effectif dès cette année ? Le fonds d'investissement durable sera-t-il mis en place avant la fin décembre ?

Quel est le bilan de la mise en place du transport par autocar ? Quels en sont les effets sur le transport ferroviaire ?

La semaine dernière, Patrick Chaize et moi-même avons présenté un rapport sur l'aménagement numérique du territoire, fruit d'un groupe de travail créé en mars. Nous aimerions vous présenter nos dix-sept recommandations.

Nous avons dit, en séance, que nous nous réjouissions de vous voir rouvrir le dossier de la couverture mobile. Nous souhaitons que le processus se mette en place dans des conditions satisfaisantes. Mais il semble que les listes de communes non couvertes ne soient pas exhaustives... Dans l'Eure, dont je suis l'élu, le secrétaire général pour les affaires régionales a identifié huit communes quand le département en recense cent. La réalité est peut-être entre les deux... La concertation a manqué.

Le très haut débit fixe soulève deux grandes questions : comment l'État fera-t-il respecter leurs engagements aux opérateurs ? Comment faire pour que ceux-ci viennent sur les réseaux d'initiative publique (RIP), qui représentent un investissement de 11 milliards d'euros ?

Debut de section - Permalien
Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Je suis désolé de ne pas avoir pu venir devant vous plus tôt... Les sujets que vous venez d'évoquer sont importants ; ils ont été éclairés par vos travaux ou suscités par nos propres débats.

La négociation entre l'État et les sociétés d'autoroutes s'est achevée pendant l'examen de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. L'option retenue n'a pas été la résiliation des contrats, qui comportait des risques juridiques et budgétaires, mais la mise sous pression des sociétés afin de parvenir à un accord. La difficulté à communiquer les informations était liée au secret des affaires demandé par les sociétés d'autoroutes ; et certains détails techniques, dont le traitement fiscal de leurs contributions, étaient en discussion jusqu'à ces dernières semaines.

Nous avons progressé dans la mise en oeuvre du plan de relance, qui porte sur 3,2 milliards d'euros d'investissements pour les sept sociétés autoroutières en contrepartie d'une extension de la durée des contrats, et doit créer une dizaine de milliers d'emplois. Les sociétés ont signé les premiers contrats d'études, publié les premiers appels d'offres pour des travaux qui devront être effectués aux trois quarts par des PME, dont 55 % ne seront pas liées aux groupes autoroutiers - elles s'y sont engagées. L'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) y veillera. Les investissements sont concentrés sur la période 2016-2019, mais les travaux se poursuivront jusqu'en 2025. Trente opérations sont prévues partout sur le territoire pour améliorer la sécurité ou fluidifier le trafic. Le processus se déroule conformément aux accords signés avec les sociétés. Quelques problèmes techniques ou fiscaux doivent être réglés pour que les derniers décrets paraissent. Les contrats de concession ont été rééquilibrés et stabilisés, les hausses tarifaires gelées en 2015, sans rattrapage avant 2018.

Les sociétés d'autoroutes se sont engagées à verser 1 milliard d'euros à l'Afitf, dont 300 millions d'euros au cours des trois premières années - 100 millions d'euros seront versés d'ici la fin 2015. Elles abonderont, à hauteur de 200 millions d'euros, le nouveau fonds d'investissement durable, géré sous mandat par la Caisse des dépôts. Le premier versement est prévu en décembre. Elles ont par ailleurs pris des mesures commerciales - étudiants, véhicules propres...

La réforme du transport par autocar, entrée en vigueur le 6 août, est d'application directe pour les liaisons de plus de 100 kilomètres. Nous avons publié les dispositions précisant la réglementation en matière d'équipement, de contrôle éthylique, de sécurisation des véhicules. Un décret autorisant les liaisons de moins de 100 kilomètres a été publié, après réception de l'avis conforme de l'Arafer. Toute ouverture d'une liaison de ce type doit être notifiée ; l'autorité organisatrice de transports (AOT) peut être saisie dans un délai de deux mois ; elle doit ensuite s'exprimer sur la base d'un avis conforme de l'Arafer, ce qui homogénéise le traitement des dossiers sur le territoire et facilite la prise en compte des équilibres. Nous n'avons rencontré aucun obstacle à ce stade. Le développement a plutôt porté sur des liaisons de plus de 100 kilomètres, mais le cadre juridique a été posé.

Reste le travail sur les gares routières, qui nécessite une ordonnance ; elle sera déposée dans les prochains jours au Conseil d'État après un travail technique important, mené notamment avec la sénatrice Fabienne Keller, le député Gilles Savary et les associations d'élus. L'objectif est de parvenir à un déploiement harmonisé des gares et des arrêts sur tout le territoire, avec les infrastructures nécessaires, et de prévoir des règles pour que les différentes sociétés de transport en partagent l'usage - il faut éviter les infrastructures exclusives. J'ai demandé qu'on procède à un recensement, notamment à la SNCF qui détient ou gère beaucoup de gares routières, de sorte que nous ayons une vision consolidée de la situation. M. Alain Vidalies et moi-même disposerons dans les prochains jours d'un cadre de déploiement harmonisé, l'idée étant de clarifier la réglementation applicable tant aux gares publiques que privées.

Les entreprises n'ont pas attendu l'ordonnance sur les gares routières pour démarrer leur activité. Près de 250 000 passagers ont été transportés depuis la réforme - deux fois plus qu'au cours de toute l'année 2014 ; 75 villes sont nouvellement desservies ; 275 autocars assurent chaque jour des liaisons ; 20 emplois sont créés par jour. J'aimerais que d'autres secteurs aient la même vitalité...

Nous devons désormais construire une filière. En France, seul Iveco à Annonay, construit des autocars. Je regrette d'ailleurs que, si l'équipe des All Blacks s'est déplacée dans un autocar Magelys produit à Annonay, l'équipe de France de rugby a préféré un car produit en Allemagne... Il faut que les entreprises améliorent leurs pratiques d'achat. Je leur ai demandé de privilégier les autocars produits en France ou de négocier avec les producteurs afin de favoriser l'implantation de structures de production en France. J'ai moi-même discuté avec des constructeurs tels que Daimler, actionnaire de référence de FlixBus, qui achète des autocars Iveco pour son déploiement en France et sous-traite avec beaucoup de PME. Les Allemands, qui comptaient 12 millions de voyageurs par car en 2014, contre 110 000 chez nous, fonctionnent de cette façon : 80 % des autocars circulant en Allemagne y sont produits. J'engage des discussions avec Scania, Volkswagen et Daimler. Des emplois industriels doivent être créés à côté des emplois de transport et de service dans les gares routières.

Il est un peu tôt pour connaître l'impact de la réforme sur les sociétés de transport et le ferroviaire. L'Arafer se montre très vigilante. La SNCF a considéré elle-même que la multimodalité avait un sens, puisqu'elle s'est massivement engagée dans la réforme : son opérateur Ouibus fournit, avec Transdev, l'offre la plus agressive sur le marché, en complément du ferroviaire. Le site Voyages-sncf.com propose des interconnexions entre train et autocar. La multimodalité est la bonne manière de développer le transport collectif. A ce stade la réforme n'a pas d'impact négatif.

Les difficultés de la filière ferroviaire sont antérieures à la réforme. Celles qui portaient sur la partie amont, notamment chez Alstom pour la période 2017-2020, sont en train d'être résolues grâce à la signature de contrats à l'étranger, qui rouvrent des perspectives aux sites de La Rochelle et de Belfort. Nous avons, de plus, accéléré les investissements au titre du Programme d'investissements d'avenir (PIA) avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et la SNCF, pour développer une nouvelle offre et donner du travail à Alstom-ingénierie. Enfin, Alain Vidalies a annoncé en juillet la réactivation de l'enveloppe d'investissements pour les TER et les TET.

À la suite des travaux du Sénat, la couverture numérique a été réintroduite avec volontarisme dans la loi pour la croissance et l'activité. Un arrêté du 7 novembre a établi une première liste de communes non couvertes, notre objectif étant que celles-ci soient toutes couvertes en 2G d'ici à fin 2016, et en 3G d'ici au printemps 2017. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a désormais un pouvoir de sanction contre les opérateurs qui ne s'y conforment pas. Le recensement a été mené sous l'égide des préfets, les opérateurs effectuant les tests. En cas de problème posé par la liste du 7 novembre, faites m'en part afin que je me retourne vers les préfets de région.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Macron, ministre

Ce n'est pas encore venu jusqu'à moi. Quelque 171 communes ont été identifiées. J'appelle votre attention sur la distinction entre « commune » et « centre-bourg » : la loi précise que c'est celui-ci qui doit être couvert. Les opérateurs se sont rendus dans certaines communes signalées comme non-couvertes, or le centre-bourg l'était. Deux autres mécanismes aident les communes mal couvertes : l'amélioration de la transparence sur la réalité de la couverture, pour faire jouer la concurrence, et la mise en oeuvre de solutions de couverture dans les logements, en utilisant l'accès fixe à l'Internet - encore faut-il qu'elles soient disponibles chez tous les opérateurs et connues des consommateurs.

Au-delà des centres-bourg, 800 zones prioritaires seront recensées dans les prochains jours avec les associations d'élus, les opérateurs, l'Agence du numérique - le préfet Mirabaud est mobilisé et fait un travail remarquable -, selon des critères économiques, stratégiques, touristiques, de vie, pour un déploiement d'antennes-relais en complément de la couverture 2G et 3G. En juin dernier, l'ensemble des opérateurs ont signé la convention de déploiement et de financement, pour un budget de 800 millions à 1 milliard d'euros. Les travaux débuteront en 2016.

Je me suis expliqué avec les opérateurs au sujet du haut débit fixe dans les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii). La fusion entre SFR et Numéricâble a conduit à une demande de révision des accords de 2011 avec Orange, qui répartissaient la couverture à 20 %-80 %. Le dogme persistant de la concurrence par les infrastructures est une idée fausse qui crée des rentes injustifiées, une mauvaise couverture et une capture par les prix, alors que nous souhaitons une concurrence par l'offre. Si SFR-Numéricâble se déploie au-delà des 20 %, je suis prêt à rouvrir le dossier de l'équipement des zones Amii. Nous n'y sommes pas.

Dans les zones les moins rentables, où les collectivités territoriales et l'État accordent des financements dans le cadre du plan France Très Haut Débit, les projets de RIP sont regroupés. Cet été, nous avons élaboré un cahier des charges homogénéisant les offres et encadré les tarifs, certaines offres à très bas coût étant de moindre qualité. Je me suis engagé à clarifier la nature de l'offre. Un arrêté est en cours de discussion, qui distinguera la fibre du câble - ce dernier est surtout important en zone urbaine. Nous pouvons rattraper notre retard d'équipement en câble et fibre sur nos voisins en favorisant la seconde. Ce serait une erreur de déployer le câble alors que ses propriétés sont moins bonnes que celles de la fibre, surtout si nous voulons développer les objets connectés dans tous les secteurs. C'est pourquoi nous avons souhaité, avec l'Agence du numérique, que les RIP soient homogènes en matière de prix, de système d'information, d'ingénierie. L'Arcep a publié un projet de lignes directrices pour les opérateurs. L'objectif est de lancer tous les travaux dès le début de l'année 2016, puis d'accélérer. Nous sommes passés de 5 % du territoire couvert en très haut débit en 2012 à 25 %. Tous les départements ont fait part de projets. Nous devons désormais avancer à marche forcée.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Beaucoup de dossiers ont été présentés, mais les délais d'instruction sont de l'ordre de trois ans... Alors que le montant total des dossiers déposés est de 11 milliards d'euros, seuls quelques millions d'euros ont été décaissés, les collectivités territoriales assurant l'avance.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Dans la loi du 4 août 2014, l'État se qualifie de stratège en matière ferroviaire. Quelle en est votre vision ? Lors du comité stratégique de la filière ferroviaire du 20 juillet 2015, vous avez affiché votre soutien à celle-ci, mais la situation ne s'est pas améliorée. Le plan 2017-2020 est en train de s'effondrer. Je ne suis pas opposé à des contrats à l'étranger s'ils apportent du travail en France, mais si un constructeur national a signé à l'étranger un contrat pour des centaines de locomotives et que seules cinq sont construites dans notre pays...

J'entends vos propos sur le PIA, l'Ademe et la SNCF. Quelle en est la signification concrète ? Nous attendons tous une décision sur les TET depuis le mois de juillet. Les industriels souhaitent de la visibilité. Quelles sont vos propositions ? Quel est votre calendrier ?

L'École polytechnique de Lausanne a souligné à plusieurs reprises le mauvais état de notre réseau ferroviaire. Il est nécessaire, non de le renouveler, mais de le moderniser. SNCF Réseau dit être au maximum de ses capacités. L'industrie propose une aide en conception, en réalisation, voire davantage, pour améliorer la compétitivité. En tant que président de la Fédération des industries ferroviaires (FIF), j'ai soumis cette idée à M. Rapoport, président de SNCF Réseau. Son impression n'était pas négative. Avançons.

Vous avez courageusement ouvert le secteur des autocars à la concurrence - même si nous souhaitions tous ici que le seuil soit établi à 200 kilomètres. Je m'en félicite. Qu'attendez-vous pour faire de même pour les TER, dont le coût du train-kilomètre est de 19 euros en France contre 10 euros en Allemagne ? Les derniers sondages montrent que 80 % de la population française est favorable à l'ouverture à la concurrence... Nombre de régions y sont prêtes, non en 2026 mais dès 2019.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Le Gouvernement est en pleine contradiction : alors que la COP21 se déroule à Paris, de nouveaux permis d'exploration pétrolière ont été délivrés dans la Seine-et-Marne, la Marne et le Bas-Rhin. La schizophrénie est aussi de mise dans le domaine des autocars, qui dégagent davantage de CO2 que le train et assèchent les lignes ferroviaires en déshérence - qu'on finira par supprimer.

Comment l'industrie automobile réagit-elle à la crise que Volkswagen traverse en Allemagne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

L'emploi est la première préoccupation des Français. Depuis 2012, les politiques financières et budgétaires ont renforcé considérablement les moyens des entreprises, même si le Medef en demande toujours plus. Peut-on faire le bilan de ces aides ? Les emplois attendus ont-ils été créés ?

La relance du plan autoroutier favorisera-t-elle l'emploi dans le BTP ? Le président de la Fédération nationale des travaux publics, M. Cavagné, estime que le plan empêchera la casse des emplois mais n'en créera pas. Avez-vous procédé à une évaluation ? Si la SNCF met en place la multimodalité, pourra-t-on encore l'appeler ainsi et non SNCM, M pour mobilité ? Vous réaffirmez le gel tarifaire des autoroutes, mais j'ai entendu qu'on annonçait une hausse prochainement. Je souhaite des précisions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

L'argent de la cession par Alstom de ses activités énergétiques à General Electric réduira sa dette. Mais Alstom ne pèsera plus que 6 milliards d'euros, derrière Bombardier, 8 milliards, et les Chinois, entre 18 et 20 milliards. Alstom, l'un des acteurs les plus petits du marché, est-il en capacité d'acheter la branche transports de Bombardier ? Le carnet de commandes mondial d'Alstom est bien rempli. En revanche, l'entreprise connaît des difficultés sur le marché national, qui représente un quart de son activité. La contraction des budgets de l'État et des collectivités territoriales réduit significativement ses opportunités commerciales et fragilise sa base industrielle, qui concerne 30 % des effectifs du groupe, soit 9 200 collaborateurs répartis sur douze sites, et 25 000 personnes dans le réseau de ses fournisseurs. Quatre projets semblent structurants : le TGV du futur, le RER parisien, le métro du Grand Paris et le renouvellement des TET. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Merci, monsieur le ministre, de la précision de vos réponses. Je suis très favorable à la mise en place du transport par autocar. Peut-on déjà faire un bilan par département ou par région ? Quid de la desserte des territoires ruraux ? Quelles lignes ont été les plus fréquentées ? Je souhaite des informations complémentaires sur la mise en place des gares ou arrêts : qui les finance ? Des aides sont-elles disponibles ?

La couverture numérique des centres-bourg suffit-elle ? L'habitat peut être très dispersé, la zone commerciale située à quelques kilomètres du centre, en zone blanche. Les élus ne comprennent pas, ou contestent les études.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Jean de Nicolay

Dans la Sarthe, cinq communes sur 375 ont été identifiées comme n'étant pas couvertes par la téléphonie mobile. L'enquête que nous, sénateurs de la Sarthe, avons menée, révèle que 260 communes se plaignent de leur couverture. La proportion est un peu différente... Le département de la Sarthe investira 160 millions d'euros dans le numérique au cours des six prochaines années ; 30 à 40 millions d'euros resteront à la charge des communes. Les collectivités territoriales, qui souffrent de difficultés financières, peuvent-elles contracter des prêts à très long terme pour financer ces investissements dans le très haut débit ? Il reste à charge entre 300 et 500 euros par prise... Sans moyens exceptionnels, elles n'y arriveront pas.

Vous avez demandé aux sociétés d'autoroutes de faire travailler les entreprises françaises. Adoptez-vous la même démarche pour le développement de la fibre optique, en faveur d'entreprises comme Acome, dans le département de la Manche ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Filleul

Merci d'avoir tenu parole, monsieur le ministre. Lors des débats sur la loi pour la croissance et l'activité, vous aviez indiqué que les décrets d'application seraient concertés ; vous nous avez rencontrés trois mois après la promulgation de la loi. Il restait quelques décrets à publier. Où en êtes-vous ?

Je me félicite du bon travail de suivi sur les autoroutes. Le plan de relance se monte à 3,2 milliards, ce n'est pas rien. La promesse est tenue de faire leur place aux petites entreprises de travaux publics. Il est important de construire une filière dans le secteur des autocars, l'industrie française doit retrouver sa place.

Je me suis inquiété du sort d'Alstom auprès du ministre des transports. Quelle est la situation de l'entreprise et de ses usines en France ? Le président actuel et le futur président d'Alstom ont déclaré que les commandes en cours irrigueraient normalement la plupart des sites en France. Pouvez-vous faire le point ?

La création de l'Arafer représente un progrès fantastique. Elle suivra les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Son président Pierre Cardo s'est inquiété des moyens mis à sa disposition pour accomplir ses nouvelles missions. Confirmez-vous qu'ils lui seront accordés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Vous avez rappelé l'obligation faite aux sociétés d'autoroutes de faire travailler des entreprises locales. Cela devra être suivi de très près. Dans mon département de la Vienne, l'entreprise nationale qui construit la ligne à grande vitesse n'a pas tenu ses engagements en la matière...

Les contraintes administratives freinent la création de petites entreprises. La dématérialisation est source de nouvelles difficultés. Certains indépendants sont dans l'incapacité pratique de payer la cotisation foncière des entreprises (CFE) faute de trouver l'avis d'imposition sur leur compte en ligne. Le régime social des indépendants (RSI) n'est pourtant pas dématérialisé, mais le 11 novembre, certains indépendants n'avaient toujours pas reçu leur appel à cotisation à payer avant le lendemain. Il faut simplifier. Le ministère de l'économie compte-t-il se saisir de ce dossier ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Le recensement des zones couvertes en téléphonie mobile, engagé à votre initiative, est très hétérogène selon les régions et départements. Je vous remercie de laisser ouvert votre arrêté afin que des communes puissent être ajoutées. Vous avez évoqué l'encadrement nécessaire de la tarification du très haut débit pour éviter des prix trop élevés. Paradoxalement, la tarification proposée par l'Arcep pour les offres activées est jugée trop haute. Attention à ce que les petits opérateurs ne fuient pas les RIP. La notification à Bruxelles du plan France Très Haut Débit n'a pas reçu de réponse positive. À en croire Axelle Lemaire et Antoine Darodes, vous êtes plutôt optimiste. Qu'en est-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nelly Tocqueville

On ne peut que se féliciter de l'inscription dans la loi de dispositions relatives à la couverture mobile. Cependant, l'article 119 de cette même loi réforme le service universel en supprimant les cabines téléphoniques - symbole d'un paysage ancien mais utiles. Les élus ruraux s'en inquiètent, puisque la couverture totale de zones où l'habitat est dispersé ne sera jamais possible. Ne peut-on retarder la suppression des cabines en attendant la réalisation du programme de résorption des zones blanches ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Camani

Je salue l'ambition du plan France Très Haut Débit. Le déploiement de la fibre optique dans le département du Lot-et-Garonne, que je préside, représente un investissement de 130 millions d'euros, c'est-à-dire deux tiers de sa dette en capital. Grâce aux financements associés au plan, il devient possible. Nous attendons votre signature, monsieur le ministre, pour engager les travaux. Il faut accélérer les procédures.

Les opérateurs manquent de transparence. Comptez-vous prendre des mesures pour assurer le respect par les opérateurs privés du déploiement du très haut débit fixe, et assurer cette transparence ? Nous avons besoin d'une modification de la réglementation pour fédérer les RIP afin de les commercialiser.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Merci de votre respect pour les parlementaires, ce n'est pas le cas de tous vos collègues... Je ne remets pas en cause la facilitation du transport par autocar, mais je suis toujours inquiet du déséquilibre en défaveur du ferroviaire. Vous affirmez qu'il n'y a pas d'impact sur le rail, mais ce n'est pas ce que disent les dirigeants de la SNCF. Leur politique consiste à fermer les lignes très peu rentables - j'ai eu une entreprise : si j'avais coupé toute activité dès qu'elle n'était pas rentable, je n'aurais plus eu d'entreprise... En facilitant le transport par autocar, on renforce la mauvaise gestion des lignes. Le ferroviaire, le meilleur des transports, subit forcément une distorsion de concurrence avec la route puisque le passage sur les voies ferrées est cher. La SNCF est une belle entreprise qui souffre de gros défauts. Je ne connais que la mise en concurrence pour la stimuler. Je ne veux pas qu'on se réjouisse maintenant de la présence des bus sur la route et qu'on se désole, dans quelques années, de la mort à petit feu de la SNCF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mayet

Équiper les zones dépourvues de haut débit est un challenge pour les prochaines années ; il y va du développement économique, notamment du télé-emploi. La fibre est la solution royale mais elle coûte très cher en génie civil et construction de réseau. On aura du mal à en équiper les zones non densifiées. Je n'entends presque pas parler du satellite, parfaitement adapté à ces zones, comme il l'est en Afrique. Cette solution coûte moins cher que d'autres. Pourquoi ne pas l'étudier ?

La nuit dernière, près de chez moi, un accident très grave a été provoqué par un automobiliste qui avait emprunté l'autoroute à contre-sens. Ces accidents se multiplient, sans doute en raison du vieillissement de la population. Une solution peu onéreuse consisterait à installer un capteur sur les bretelles d'accès qui repère les véhicules en contre-sens et affiche un message « stop » sur un panneau. Pardonnez cette suggestion culottée...

Debut de section - Permalien
Emmanuel Macron, ministre

La rapidité de traitement des dossiers « très haut débit » par l'Agence du numérique aurait pu être accrue par une meilleure organisation. Les premiers dossiers, très hétérogènes, manquaient de cadrage, ce qui a rendu nécessaire l'élaboration d'un cahier des charges ; il fallait aussi attendre les lignes tarifaires de l'Arcep. L'accélération des délais de traitement est une priorité de mon ministère. Nous déploierons des moyens supplémentaires s'il le faut. Beaucoup de temps a été passé à accompagner les collectivités territoriales dans la constitution des dossiers. Le montant de 1,5 milliard d'euros engagé est suffisant. Nous sommes maintenant en phase de production. Je vous transmettrai le calendrier de programmation au premier trimestre 2016.

La tarification de l'accès aux RIP ne doit être ni trop basse, pour éviter le dumping, ni trop haute, pour ne pas pénaliser certaines collectivités territoriales. Le président de l'Arcep s'est fortement exprimé sur ce sujet. Les offres activées entrent dans ce cadre, parce qu'elles font émerger des propositions innovantes et intéressantes. L'incrément d'offre qu'elles apportent doit être ajouté aux plafonds des lignes directrices classiques. S'ils étaient trop bas, ils pénaliseraient ceux qui apportent une offre différenciée.

La couverture des centres-bourg sera améliorée. Je saisirai à nouveau les préfets de région. Les désaccords entre maires et préfets reposent sur le fait que les essais sont réalisés sur une zone fixe à partir d'un point de référence, la localisation de celui-ci étant parfois difficile, et sur le fait que l'intérieur des bâtiments peut être mal desservi. Au-delà de ces points techniques, l'insatisfaction des communes porte sur les zones éloignées du centre-bourg. La réconciliation ne sera jamais complète...

Les regroupements de projets RIP font l'objet d'une disposition dans le projet de loi sur le numérique. Nous serons vigilants à ce que l'offre corresponde à ce qui est le plus efficace.

Le plan Juncker peut financer les projets d'infrastructures par des prêts longs à faible taux. Un guichet de la Caisse des dépôts propose également des financements longs dans le cadre du plan France Très Haut Débit.

Le soutien à la filière française de fibre optique a été signifié aux opérateurs. Je me suis déplacé chez Acome dans la Manche, une entreprise remarquable. Draka est aussi un acteur d'importance. La France produit 50 % de la fibre européenne. Les acteurs sont au sommet de leur art, leurs carnets de commande sont remplis.

Le plan France Très Haut Débit a été notifié à la Commission européenne. L'interrogation porte sur le financement de la montée en débit de l'opérateur historique sur la partie cuivre - une spécificité française. J'ai discuté lundi avec la commissaire Vestager, qui m'a envoyé des signaux très favorables. La Commission, qui reconnaît l'absence d'abus, doit construire un cadre juridique justifiant cette situation unique sans qu'il puisse être répliqué ni détourné. Aucun pays ne dispose d'un réseau de cuivre porté par l'opérateur historique comme le nôtre. En l'espèce, Orange n'agit pas comme opérateur de premier rang mais pour le compte des autres opérateurs et des collectivités territoriales. Je continue à être rassurant, le débat ne portant pas sur le fond.

Nous avons modernisé la notion de service téléphonique universel. Quand la couverture sera satisfaisante, les cabines téléphoniques seront enlevées, sauf à envisager des usages autres que la téléphonie ou l'attachement à un symbole de notre imaginaire collectif... Orange s'est engagé à ne supprimer aucune cabine sans vérification de la couverture, sans concertation locale préalable, sans proposition de solutions alternatives aux collectivités territoriales telles que l'installation de bornes d'appel d'urgence.

Les lignes directrices de l'Arcep ont pour objectif d'apporter de la transparence sur les tarifs ; quant à la transparence sur la nature de l'offre, elle fait l'objet de l'arrêté qui sera pris dans les prochaines semaines.

La solution satellitaire, qui a été étudiée de près, est une bonne solution pour les zones très peu denses, comme en Afrique, mais n'est pas satisfaisante sur notre territoire car son maillage est beaucoup moins fin. En outre, nous ne pouvons pas la déployer dans un délai qui remettrait en cause le plan France Très Haut Débit. Nous l'envisageons à titre expérimental, et participons aux opérations africaines.

L'État est stratège dans le ferroviaire parce que la France est la troisième économie ferroviaire au monde après la Chine et l'Allemagne, parce que 70 % de l'activité est encore liée au territoire français, parce que ce secteur représente des emplois, de l'excellence industrielle, de la commande publique, parce que l'État est actionnaire de nombre des entreprises du secteur. L'État est aussi présent chez Alstom puisqu'il a repris les droits de Bouygues au capital.

L'État est stratège aussi parce qu'il accompagne la transformation du modèle. Le ferroviaire ne sera pas dans trente ans ce qu'il est aujourd'hui. Le double défi réside dans la modernisation du parc français et la conquête des marchés à l'international. En France, il faut améliorer l'offre en innovant et penser les nouvelles formes de mobilité. La SNCF doit se repenser dans la multimodalité et la complémentarité. Nos concitoyens à l'avenir ne voudront pas prendre le train mais un service de mobilité les conduisant rapidement d'un point A à un point B, dans la sécurité. La SNCF a un rôle critique à jouer. Où sera à l'avenir la valeur ajoutée ? Dans la capacité à créer des offres, dans la connaissance du client. Le site Voyages-sncf.com produit déjà une grande part de valeur pour de la SNCF. À l'avenir, la matière lourde perdra de la valeur, et la capacité à créer des solutions pour le consommateur final en gagnera.

La bataille à l'international, voilà le vrai plan de charge. Ces deux dernières années, l'État a prêté 1,5 milliard d'euros sur des projets ferroviaires à l'étranger. De nombreux marchés ont été gagnés hors de nos frontières, au Maroc, en Algérie, en Suisse... L'offre française est excellente. L'équipe de France doit jouer groupé, c'est vrai aussi dans le nucléaire. Elle peut être compétitive de deux manières : en proposant une équipe du ferroviaire, des sociétés de transport jusqu'au constructeur, ou une offre groupée « ville et mobilité ». Quand un pays vous a accordé le marché du métro dans sa capitale, il vous choisit pour le train... Le défi à court terme est le plan de charge de 2017-2020. Je m'engage à ce que la situation des TER-TET soit clarifiée d'ici la fin de l'année. Je suis confus que nous ayons tant tardé, même si c'est pour des raisons juridiques légitimes. Je travaille main dans la main avec Alain Vidalies.

J'avais proposé, dans le projet de loi pour la croissance et l'activité, l'ouverture des TER à la concurrence. Il en a été décidé autrement. Le rapport Duron propose des pistes pour les TET. Cela participe d'une amélioration de la compétitivité du secteur. La SNCF est prête, elle est performante ; l'ouverture ne se fera pas contre elle.

M. Pointereau m'a interrogé sur la cohérence de notre politique. Les permis accordés en matière d'hydrocarbure sont des renouvellements totalement conformes à la loi. Mon principe est simple : quand des entreprises ont investi, font travailler des employés et émettent une demande conforme à la loi, il est mieux de nous y conformer nous-mêmes. Cohérent ou pas, c'est l'idée que je me fais de mon rôle. Nous ne pouvons pas ouvrir aujourd'hui le débat sur le code minier, mais le texte est prêt. Je suis prêt à vous le transmettre. La charte « mine responsable » fournit, elle aussi, un cadre.

La réforme du transport par autocar est véritablement verte. L'impact carbone serait négatif si les voyageurs qui prenaient massivement le train se reportaient tous sur l'autocar. Le train va certes plus vite et est plus confortable... En fait, l'autocar se substitue à une couverture ferroviaire défaillante, au covoiturage, au véhicule individuel ou à l'absence de mobilité. Ce dernier cas apporte le seul bilan carbone négatif. Il faut penser la mobilité. Veut-on une société comme celle des Amish, s'éclairer à la bougie, se déplacer en charrette ?

Le Volkswagengate n'est pas un dieselgate. Nos constructeurs ont fourni beaucoup d'efforts pour réduire les émissions de leurs véhicules. Ne confondons pas les sujets. Volkswagen est un acteur de l'industrie automobile française, comptant beaucoup de sous-traitants. Nos constructeurs sont soumis à des tests, dont les résultats seront publiés. L'amélioration de la transparence de l'information est un défi collectif. Les tests sont effectués sur banc d'essai et non en conditions réelles, ce qui explique les écarts qu'on constate. Il n'y a pas en France de pratiques comparables à celles de Volkswagen.

Les villes desservies par autocar sont mentionnées sur une carte disponible sur le site economie.gouv.fr, à la page sur la loi pour la croissance et l'activité. 60 % de ce texte est d'application directe. Une douzaine de décrets ou d'arrêtés ont déjà été publiés, notamment sur les autocars, le travail du dimanche et le permis de conduire. Plusieurs dizaines de décrets sont en préparation ou soumis au Conseil d'État, afin que mon engagement de publication de 85 % des textes réglementaires six mois après la promulgation de la loi soit tenu. J'organiserai une réunion d'étape fin janvier ou début février.

L'Arafer recevra les moyens nécessaires. Son plafond d'emploi a été passé de 62,5 à 68 ETP dès 2016. Son budget atteint 12 millions d'euros en 2016.

Je ferai des propositions dans le projet de loi Nouvelles opportunités économiques (Noé) pour faciliter la vie des indépendants et simplifier les éléments déclaratifs. Il faut souhaiter aux indépendants de devenir mandataires sociaux... Je ne gère pas le RSI. À titre personnel, je pense que les indépendants gagneraient à rejoindre le régime général. Le RSI a été créé par une majorité précédente, à leur demande. C'est une mauvaise idée. Les indépendants doivent aller au bout de leur logique. Il ne faut pas confondre l'existence du régime et les charges, celles-ci couvrent des risques. Le régime des indépendants, en raison de son équilibre démographique, est débiteur du régime général.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Les indépendants croient que le taux est élevé parce qu'ils sont au RSI, or il est élevé pour tous.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Macron, ministre

Il y a un peu de pédagogie à faire... Les difficultés qu'ils rencontrent sont plus économiques que fiscales. Et l'augmentation massive de la CFE est imputable aux intercommunalités, non au Gouvernement. Le système doit être simplifié dans son ensemble.

Plusieurs projets du Grand Paris ont été lancés. L'opération concernant Alstom a été subie dans un premier temps, l'État n'étant pas actionnaire. Je veux vous rassurer. Des garanties ont été obtenues. Les interrogations portent plus sur les sites allemands que les sites français.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Macron, ministre

Le site alsacien dépend largement de la clarification appelée par le président Nègre. Le défi d'Alstom est de grandir. Assez peu de synergies existaient entre l'énergie et le ferroviaire. Maintenant qu'Alstom est concentré sur le ferroviaire, nous allons l'aider à se développer ; son désendettement lui permettra d'investir, d'acquérir des concurrents à l'étranger. L'État, qui détient 20 % des droits de vote, accompagnera sa croissance. Alstom affronte deux défis : le plan de charge intérieur et la conquête de marchés à l'international, où les deux concurrents chinois nous taillent des croupières. Le déploiement international est prioritaire. La logique est offensive.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Merci pour toutes ces réponses précises. Nous avons noté que vous étiez prêt à venir une fois par trimestre et aurons plaisir à vous accueillir à nouveau.

La réunion est levée à 19 h 30.